Dans l'imaginaire collectif, le chef-d'œuvre de John Carpenter, Halloween, la nuit des masques, a ouvert le bal des slashers (sous-genre horrifique mettant en scène un tueur masqué à la poursuite de jeunes âmes innocentes). Sorti en 1978, le long-métrage, porté par le désormais iconique Michael Myers, secoue le monde de l'horreur et inspire une vague de projets similaires dans les décennies qui suivent, de Vendredi 13 en 1980 à Scream en 1996. Mais avant Michael, il y avait Billy.
Réalisé par Bob Clark en 1974, le film canadien Black Christmas reste le véritable point de départ d'un genre qui a connu de nombreuses mutations (bien qu'il soit sorti quelques jours plus tôt, le Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper s'inscrit, lui, dans une autre catégorie : le survival). Adaptée d'un scénario de Roy Moore, l'intrigue suit le calvaire des membres d'une sororité terrifiés par l'intrusion de Billy, un psychopathe tapis dans l'ombre, dans leur résidence étudiante la veille de Noël. Basé sur une légende urbaine bien connue des amateurs de frissons, le thriller connaît un accueil glacial de la part de la critique et un succès plutôt timide dans les salles. Ce n'est qu'au fil des années, et probablement après la sortie d'Halloween, que Black Christmas s'offre une seconde vie et gagne un statut de film culte auprès des cinéphiles.
En avance sur son temps
Sous ses airs de pur divertissement, l'œuvre de Bob Clark bénéficie d'une mise en scène terriblement efficace et d'une ambiance qui défie l'épreuve du temps. Le film a notamment le mérite d'aborder des thèmes engagés comme l'avortement, qui était au cœur des débats après sa légalisation au Canada en 1969. Bien qu'il ne soit pas féministe pour autant, Black Christmas fait la part belle à une galerie de personnages féminins très réussis, notamment grâce aux talents des actrices qui les incarnent, d'Olivia Hussey (Roméo et Juliette) à Margot Kidder, qui tournera Superman quatre ans plus tard.
Très populaire, le long-métrage n'a pas échappé à son lot de remakes. En 2006, le scénariste de Destination Finale, Glen Morgan, propose une nouvelle adaptation avec Mary Elizabeth Winstead et Michelle Trachtenberg. Très mal reçu par la presse américaine, le film est un échec au box-office et sortira directement en DVD sur le sol français.
Treize ans plus tard, c'est une toute nouvelle relecture qui pointe le bout de son nez. Réalisé par une femme, Sophia Takal (qui co-scénarise également le film avec April Wolfe), ce troisième Black Christmas propose une intrigue radicalement différente, celle d'une bande d'étudiantes menacée par une mystérieuse fraternité aux relents misogynes. Comme le faisait l'original en son temps, ce remake s'inspire des sujets de notre époque (comme la culture du viol et la déconstruction du patriarcat) pour s'inscrire dans un courant de longs-métrages post-#MeToo. Une proposition radicale qui risque de s'attirer des foudres mais qui reste néanmoins totalement assumée.
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