Nous sommes à la fin des années 90. Ian McKellen, brillant acteur britannique dont les derniers rôles ont commencé à lui ouvrir un chemin vers la scène internationale, passe l'après-midi chez lui, en Angleterre, quand soudain, on frappe à la porte.
Sur le seuil de la maison, un homme plutôt trapu, au franc sourire enluminé d'une jolie barbe brune, accompagné de son épouse. Il est réalisateur, elle est scénariste et productrice. Tous deux arrivent de Nouvelle-Zélande, et à l'instar de Gandalf frappant à la porte de Bilbon au début du Hobbit, ils sont venus proposer à Ian McKellen d'embarquer pour la plus belle aventure de toute sa vie (même s'il est encore loin de s'en douter). Leurs noms : Peter Jackson et Fran Walsh.
Dubitatif, l'acteur ne sait pas encore très bien comment recevoir ces cinéastes, dont les premiers films plutôt confidentiels ont tendance à flirter entre le gore et le fantastique. "Ils sont venus chez moi, un peu comme un couple de hobbits," se souvient Ian McKellen aux BAFTA Insights, l'air amusé. "Je ne suis même pas sûr que Peter Jackson portait des chaussures, il n'en portait jamais en Nouvelle-Zélande. Ils se sont assis sur mon canapé et ils m'ont montré quelques croquis, m'ont parlé de l'histoire."
"L'histoire" en question n'est pas n'importe laquelle, puisqu'il s'agit du légendaire, de l'immortel, du grandiose et réputé inadaptable Seigneur des anneaux de J.R.R. Tolkien. Quant au rôle que Ian McKellen doit y tenir, c'est tout simplement l'un des plus importants : celui du magicien Gandalf, sage et puissant guide de la Communauté qui doit accompagner Frodon dans sa quête.
Pourtant, à ce moment-là, le comédien ne semble pas saisir la portée de l'enjeu. Pour plusieurs raisons. D'abord, l'éventualité d'aller passer un an à l'autre bout du monde (en Nouvelle-Zélande) ne l'enchante guère. Ensuite, le script des films (il y en aura trois) n'est pas tout à fait terminé. Enfin, à part une rapide lecture de Bilbo le Hobbit dans ses jeunes années, il ne connaît pas la moindre ligne de l'oeuvre de Tolkien, et l'histoire du Seigneur des anneaux lui est donc parfaitement inconnue.
Malgré tout, Ian McKellen décide de se lancer dans l'aventure. Bryan Singer arrange même le tournage de son X-Men (où McKellen doit interpréter le mutant Magneto) pour lui permettre d'arriver en temps et en heure sur le plateau du Seigneur des anneaux. En ce qui concerne son interprétation de Gandalf, étant donné que l'acteur britannique part quasiment de zéro, il décide de puiser son inspiration directement à la source.
En compagnie de Peter Jackson, ainsi que ce dernier l'a raconté plus tard dans une interview pour le Huffington Post, McKellen s'inspire donc de J.R.R. Tolkien lui-même pour donner vie au magicien :
"Nous avons écouté des enregistrements audio de Tolkien en train de lire des extraits du Seigneur des anneaux," explique ainsi Peter Jackson. "Nous avons regardé quelques interviews de la BBC avec lui (...) et Ian a basé sa performance sur une imitation de Tolkien. Il a littéralement calqué Gandalf sur Tolkien. Il a la même voix, utilise les mêmes expressions de langage, et ses tics sont nés de la même rugosité trouvée dans les archives de Tolkien. Donc Tolkien se serait reconnu dans la performance de Ian."
Pour résumer, sachez donc que pour vous faire une idée plus ou moins précise de comment était l'auteur du Seigneur des anneaux, il vous suffit de regarder la prestation de Ian McKellen en Gandalf dans les deux trilogies de Peter Jackson.
L'autre solution, bien sûr, consiste à aller voir le biopic "Tolkien" (centré sur les jeunes années de l'auteur), en salles à partir du 19 juin...