De quoi ça parle ?
Suite à une opération de police qui a mal tourné, Samuel Kepler, un flic à la santé mentale chancelante, est mis au vert au commissariat de Calais, où il tente de se reconstruire avec sa femme Anne et leur fille Marion. Affecté à un simple travail de bureau, Kepler pense tenir ses démons à distance. Mais une mort va tout bouleverser. Le corps d'une jeune fille est retrouvé sur le terrain de l’ancienne jungle de Calais... celui de Lucie Martel, une lycéenne qui lui rappelle sa propre fille.
Poussé par sa hiérarchie, Kepler va devoir faire ce qu'il craignait le plus : enquêter à nouveau et retourner sur le terrain, au milieu de la souffrance des migrants. Pour trouver le tueur, il doit faire équipe avec Alice Haddad, une jeune flic locale qui va être son guide et le témoin inquiet de sa chute.
Tous les lundis à 21h sur France 2 à partir du 4 mars
À quoi ça ressemble ?
C'est avec qui ?
Devant la caméra de Frédéric Schoendoerffer, qui s'était déjà essayé à la série sur la saison 1 de Braquo en 2009, Marc Lavoine, que l'on n'avait plus revu dans un rôle récurrent depuis Crossing Lines il y a cinq ans, incarne Samuel Kepler, un flic en perdition qui souffre d'une dissociation de la personnalité et doit lutter au quotidien pour empêcher que ses "passagers", ses autres "lui", ne prennent le dessus.
À ses côtés, Sofia Essaïdi, vue récemment dans Insoupçonnable sur TF1, campe Alice Hadad, la partenaire au caractère bien trempé de Kepler, qui, au cours de l'affaire très complexe sur laquelle ils enquêtent, va peu à peu révéler ses failles, qui expliquent sans doute en partie son comportement intransigeant vis-à-vis du monde qui l'entoure, et plus particulièrement des migrants. Un rôle qui prouve le chemin parcouru par la comédienne depuis l'émission Star Académy, qui l'a révélée en 2003.
Le reste de la distribution de Kepler(s), solide dans l'ensemble, comprend notamment Isabelle Renauld, Elodie Navarre, Serge Riaboukine, Cyril Lecomte, ou encore Stéphan Guérin-Tillié, dans la peau d'Antoine Metzger, le psy du héros.
Ça vaut le coup d'oeil ?
Dès sa scène d'ouverture, durant laquelle Samuel Kepler, assailli par ses personnalités multiples, franchit la limite au cours d'une intervention de police, Kepler(s) promet de nous offrir quelque chose de différent, loin des séries policières ultra formatées que l'on a trop l'habitude de voir à la télévision française. Un joli pari pour France 2 et pour les scénaristes Jean-Yves Arnaud et Yoann Legave qui ont donc choisi de faire de cet anti-héros hors norme la figure centrale de cette série sombre, froide, et violente chez qui il y a forcément, toutes proportions gardées, un petit quelque chose de Split à la sauce polar télévisuel.
Au fil de ses six épisodes, Kepler(s), qui devait à l'origine s'intituler Charon (en référence au nocher des Enfers de la mythologie grecque, évoqué à plusieurs reprises dans la série), tisse un récit qui tient en haleine, autant du côté de l'intrigue policière, qui multiplie les rebondissements, les moments choc, et les interrogations, que sur l'aspect plus personnel de la lutte de Kepler contre ses démons intérieurs. Car il est vrai que tout au long du premier épisode, assez lent, qui sert vraiment à poser les bases de l'histoire, une question s'impose forcément au téléspectateur : à quel moment les "passagers" qui habitent l'esprit du héros vont-ils finir par prendre le dessus, faisant ainsi possiblement vasciller l'enquête ?
Malheureusement, malgré un scénario bien ficelé qui nous pousse à attendre sa résolution, la série souffre d'une accumulation de clichés dont on se serait bien passé. En effet, si le cadre de Calais et de sa jungle apportent une atmosphère à part bienvenue, les migrants, le trafic des passeurs, ou encore les crimes commis par d'obscures milices xénophobes d'extrême droite ne semblent être présents, en toile de fond, que pour servir une déferlante de violence et de glauque peu subtile. Mais c'est finalement surtout du côté des séquences se déroulant à l'intérieur de la tête de Samuel Kepler que le bât blesse. Frédéric Schoendoerffer (Agents secrets, Truands, Le Convoi), dont la réalisation léchée et toute en tension est pourtant l'un des points forts de la série, a fait le choix de montrer concrètement à l'écran la lutte intérieure de Kepler, via des scènes durant lesquelles les "passagers", incarnés par différents comédiens, tentent de passer les barreaux d'une prison pour rejoindre leur hôte et ainsi quitter leur état de sommeil. Le résultat, quelque peu risible, n'ayant finalement pour effet que de nous pousser à affirmer que n'est pas Shyamalan qui veut et qu'un peu plus de mystère, ou en tout cas de nuances, aurait davantage servi le propos.
Mais malgré ces faux pas, les téléspectateurs de France 2 friands de polars devraient trouver leur compte dans cette nouvelle série qui ose l'originalité et est servie par une jolie distribution. Marc Lavoine et Sofia Esaïdi en tête, qui forment un duo de flics peu ordinaires convaincant, qui ont l'un comme l'autre leur particularité et leurs démons, et se complètent bien en dépit de leur différences. Rappelant ainsi par moments Broadchurch ou encore Tunnel. Ce sont indéniablement eux qui portent la série et, s'ils se débattent parfois comme ils peuvent avec ce qu'ils ont à jouer - on pense évidemment à Marc Lavoine durant les fameuses scènes avec les passagers de Kepler -, ils le font globalement très bien. À tel qu'on se dit qu'une saison 2, ou en tout cas une récurrence de ces deux personnages sur d'autres enquêtes, ne serait pas une mauvaise idée, même si tout porte à croire que Kepler(s) est et restera une mini-série bouclée.