Présente depuis quelques semaines dans Demain nous appartient, Morgane, la nouvelle infirmière scolaire du lycée Paul Valéry incarnée par Marie Catrix, a fini par révéler son "secret" au cours de l'épisode diffusé ce soir sur TF1. Incapable de se lancer à corps perdu dans sa relation naissante avec Sandrine et accusée par cette dernière de ne pas faire preuve d'honnêteté par rapport à son passé, Morgane lui a donc avoué être transgenre.
"Aujourd'hui je m'appelle Morgane, mais il y a encore quatre ans, aux yeux de tout le monde, j'étais un homme", confie la mère de Gabriel à Sandrine pour expliquer son comportement fuyant de la veille. "Toute ma vie je me suis sentie coincée dans le mauvais corps et j'ai gardé ça pour moi. J'avais peur qu'on me rejette alors je suis rentrée dans le rang. Mais je me suis mise à me haïr. Je n'arrivais plus à aimer les autres, à m'aimer. J'ai failli me foutre en l'air. C'est à ce moment-là que j'ai décidé d'assumer. Ça a pris pas mal d'années, mais je suis devenue moi. En revanche, la peur qu'on me rejette, elle est toujours là".
Avec cette révélation, Demain nous appartient débute une intrigue importante sur la transidentité, que nous avions annoncé la semaine dernière en exclusivité. Mais en ne choisissant pas une comédienne transgenre pour incarner Morgane, la production et TF1 s'exposent à une potentielle polémique, comme cela avait pu être le cas avec Louis(e), mini-série en deux épisodes diffusée en 2017 sur la première chaîne déjà, dans laquelle Claire Nebout incarnait une femme transgenre. Nous avons donc interrogé Sarah Farahmand, la productrice de Demain nous appartient, sur cette intrigue très forte à venir et sur le choix de la comédienne Marie Catrix.
AlloCiné : Dans l'épisode diffusé ce jeudi 21 février, les téléspectateurs ont appris que le personnage de Morgane, incarnée par Marie Catrix, est transgenre. C’est une intrigue très importante en terme de représentation à l’écran, et cependant vous n’avez pas engagé une actrice transgenre pour incarner Morgane. Vous vous attendez à ce que cela suscite la polémique, comme cela a pu être le cas avec Louis(e) ?
Sarah Farahmand (productrice) : On peut l’entendre, on a vu ce qui s’était passé avec Louis(e) oui, on n’est pas naïfs et on s’y attend. Mais le casting a été lancé très simplement. On a vu toutes les comédiennes qui correspondaient au rôle. Et une femme transgenre c’est une femme. À l’écran on présente une femme. Elle a été un homme précédemment, oui, mais on ne va pas commencer à dire qu’il n’y a que des transgenres qui peuvent jouer des transgenres ou que des homosexuels qui peuvent jouer des homosexuels. Ce n’est pas du tout ce qu’on avait envie de défendre. On a pris la meilleure comédienne pour ce rôle-là. Après, effectivement, il y a une description physique qui va avec et on a cherché quelqu’un avec des traits qui pouvaient rappeler un petit peu un homme. Est-ce que c’est la mâchoire, est-ce que c’est les mains, est-ce que c’est la voix ? On a travaillé dans ce sens-là, comme pour chaque casting finalement, où il y a toujours des critères physiques. Mais on s’est dit c’est un personnage de femme donc on cherche une femme. Le casting a été aussi simple que ça.
Comment est-ce que vous avez préparé cette intrigue avec les auteurs ?
Les auteurs se sont rapprochés d’associations pour recueillir des témoignages, mais pour nous ce n’est pas une intrigue qui est sur la transition. C’est déjà fait depuis plusieurs années dans le cas de Morgane. Et les gens le savent. Le fils de Morgane, Gabriel, est au courant. Effectivement il a du mal à intégrer ça et il a des paroles très dures envers sa mère. Lorsqu’il lui dit "Tu as tué mon père", c’est très violent. Mais on traite tout autant cela qu’une relation amoureuse avec Sandrine. Deux personnes un peu fragiles et à la dérive qui se rencontrent, avec cette question : est-ce qu’elles vont arriver à être la bonne personne l’une pour l’autre ? Et est-ce que Sandrine a la place pour quelqu’un dans sa vie en ce moment, entre sa femme qui vient de sortir de prison, un fils qui est parti, et l’autre qui est en train de virer limite réac, ou en tout cas petit con ? Et de même pour Morgane. Est-ce qu’elle est prête à vivre sa première histoire d’amour dans ce corps qu’elle a tant désiré mais qu’il faut encore qu’elle adopte ?
Vous avez discuté en amont avec Juliette Tresanini de cette intrigue importante pour Sandrine ?
Pas tant que ça car on essaye généralement de garder la surprise pour les comédiens. On en parle quand on est sûr que cela va se faire. Elle savait qu’elle aurait droit à une nouvelle histoire d’amour, qu’on travaillait dessus, mais on lui a seulement dit un tout petit peu avant qu’on lance le casting qu’elle aurait une histoire avec une femme transgenre. Et elle-même, Juliette, est assez renseignée sur la question donc elle était ravie.
Morgane et Gabriel sont des personnages qui sont voués à rester dans la série au-delà de cette arche narrative ?
Pour le moment oui. Mais après, bien sûr, les aléas de l’inspiration des auteurs dictent toujours l'évolution des intrigues. Mais on travaille en tout cas pour qu’ils restent oui. Il n’y a pas de fin prévue pour ces deux personnages.
Propos recueillis par Jérémie Dunand le 8 février 2019.