AlloCiné : Qu'est-ce qui fait le sel de cette saison 3 selon vous ?
Harold Valentin, producteur de Dix Pour Cent : Contrairement à la saison 2, très centrifuge, où tous les personnages partaient dans leurs histoires qui les éloignaient un peu de l'agence, cette saison 3 les rassemble davantage. Les assistants continuent d'être des personnages centraux; on n'a d'ailleurs pas eu besoin de rajouter des nouveaux comme on l'avait fait avec Hicham. Les épisodes sont encore plus riches, chaque acteur a quelque chose à défendre.
Est-ce que vous avez été tenté de proposer plus d'épisodes en saison 3 que les 6 habituels ?
On était tenté, France 2 et Fanny Herrero, la showrunneuse, aussi. Mais de notre côté, la validation des guests arrivant assez tard, en général lors de la deuxième version dialoguée du scénario, on ne pouvait pas se permettre de prendre ce risque si certains nous faisaient faux bond au dernier moment et qu'il fallait réécrire dans l'urgence. Déjà avec 6 épisodes, on était un peu juste sur la livraison des textes. Au final, heureusement qu'on a dit non pour 8, on aurait pas réussi à tenir les délais. Et de plus, c'était indispensable pour nous de revenir maximum 18 mois après la saison précédente. Au niveau des plannings des uns et des autres, c'est un casse-tête, reculer de deux mois le tournage c'était prendre le risque de perdre des acteurs.
Du côté des guests justement, c'est plus simple en saison 3 de les convaincre de participer ?
C'était plus simple en saison 2 et ça l'était toujours en saison 3. Il y a une véritable envie des acteurs de jouer avec leur image maintenant. Au niveau des refus, c'est soit pour des questions d'agenda, soit à cause d'intrigues qu'ils jugent trop proches d'eux. Mais ce n'est jamais l'idée de jouer dans la série qui ne leur plait pas.
Et certains viennent directement vers vous, vous réclament un rôle ?
Il y a beaucoup de sollicitations effectivement, qui passent en général par Dominique Besnehard (ndlr : autre producteur de la série et ancien agent de stars), mais ce sont les histoires qui nous guident, toujours. Il faut une bonne histoire, profonde, qui va jouer avec l'image du guest. Il arrive qu'on ait très envie d'un guest et que l'on ne trouve pas la bonne histoire pour elle ou lui. Ce sont toujours des choix complexes.
Que pouvez-vous nous dire de l'adaptation québecoise, qui devrait arriver prochainement ?
Je ne l'ai pas encore vue, mais j'ai lu les textes. C'est très drôle, très proche de la série originale. Mais le format est un peu différent : ce qui est chez nous un 52 minutes se transforme chez eux en deux fois 40 minutes. Il y a donc plus d'épisodes. C'est Sophie Lorain qui s'est chargée de l'adaptation, qui réalise, et c'est pour la principale chaîne privée canadienne : TVA.
Et du côté de l'adaptation britannique, ça avance ?
Oui, le pilote a été co-écrit par Georgia Pritchett, qui a travaillé sur Veep et The Thick Of It, et Ted Cohen, qui a écrit sur Friends. Le scénario circule actuellement entre les principales chaînes et il y a de grandes chances pour que ça voit le jour.
Le rôle de l'agent en France correspond davantage à celui du manager en Amérique.
D'autres pays en ont acheté les droits d'adaptation ?
Oui, il y a les Chinois par exemple qui travaillent dessus actuellement. Chez eux, ce qui est amusant, c'est que les agents des stars sont souvent les frères, les soeurs, les parents... c'est très familial, donc ça créé d'autres mécaniques. Et les Indiens tout récemment également. Bollywood est très différent, ça va être génial de voir comment ils vont se l'approprier.
Et pour les Etats-Unis, toujours rien ?
On a eu un certain nombre de propositions. Là-bas, les agences sont gigantesques, donc fatalement ça ne peut pas être tout à fait la même série. Chaque acteur a un agent, qui prend 10%, et un manager, qui en prend 15. Le rôle de l'agent en France correspond davantage à celui du manager en Amérique. Les agents s'occupent surtout des contrats. Donc selon nous, ce serait plus intéressant de le faire sur les managers. Mais pour le moment en tout cas, la proposition en langue anglaise qui nous a le plus convaincue, c'est celle des anglais. Chez les américains, ce qu'on nous dit surtout c'est "Nicole Kidman a adoré votre série, Jennifer Aniston est fan de Call My Agent!..." mais ils ne nous parlent jamais de showrunners... Et puis les anglais nous proposent de co-produire, ce qui est forcément plus intéressant pour nous à tous points de vue.
Vous rêveriez de quel showrunner pour s'occuper de la version américaine ?
Je pense que Chuck Lorre, qui fait The Big Bang Theory, pourrait être pas mal. Y'a ce même décalage dans le ton que l'on retrouve dans Dix Pour Cent.
Que diriez-vous de Shonda Rhimes, la créatrice de Grey's Anatomy et Scandal, qui maîtrise bien le mélange du professionnel et du personnel ?
Ce serait intéressant aussi, même si elle est plus drama que nous. Elle a une sincérité. Le New Yorker avait fait un article sur le succès de Call My Agent! sur Netflix dans le monde entier, et ils disaient que contrairement à Entourage par exemple, on ne misait pas sur le cynisme. C'est vrai, on a des personnages qui sont passionnés, qui défendent sincèrement quelque chose. Et ça fait du bien. Et ça colle bien avec Shonda Rhimes en effet. Ce que les américains adorent par exemple, c'est que ça baise au bureau ! "It's so french!" nous disent-ils. Chez eux, les règles sont plus strictes.
L'appellation "Netflix Originals", ça vous dérange ?
C'est la règle chez eux, c'est même mentionné dès le générique, c'est du marketing dominateur mais c'est le prix à payer. Puis que dire ? Le monde entier a accepté alors...
Propos recueillis lors du Festival de la Fiction TV de La Rochelle en septembre 2018
Notre interview de Camille Cottin pour la saison 3 :