Quelques semaines après la sortie de La Finale, qui a remporté le Grand Prix lors du dernier festival du film de comédie de l'Alpe d'Huez, et alors que Tamara Vol.2, suite de la comédie à succès d'Alexandre Castagnetti, est attendue dans les salles le 4 juillet prochain, Rayane Bensetti est déjà en plein tournage de son prochain long métrage : Let's Dance. Un film qui attire la curiosité à plus d'un titre puisque, en plus d'être l'une des rares tentatives françaises à s'essayer au genre très anglo-saxon du film de danse, il marque aussi le premier passage derrière la caméra du metteur en scène de théâtre et de comédies musicales Ladislas Chollat, à qui l'on doit les pièces Le Père, Une heure de tranquillité, Momo, et encore Le Fils de Florian Zeller cette année, ainsi que le spectacle musical Résiste.
Alors que le tournage, débuté le 16 avril, battait déjà son plein, nous nous sommes rendus dans les coulisses de Let's Dance le 15 mai dernier, à Paris, dans le quartier des Halles, où se déroule une partie des scènes de ce long métrage survitaminé. Et le moins que l'on puisse dire c'est que les séquences auxquelles nous avons pu assister ce jour-là, tournées sous la Canopée des Halles et au sein de l'un des studios du centre culturel de hip-hop La Place, donnent le ton du film, qui s'annonce rythmé par des chorégraphies impressionnantes...
Let's Dance, de quoi ça parle ?
Joseph, danseur passionné de hip-hop, refuse d’entrer dans l’entreprise de son père pour tenter sa chance à Paris. Avec sa copine Emma et son meilleur ami Karim, il intègre le crew parisien de Youri, un célèbre breaker, pour tenter de gagner un concours international de hip-hop. Mais le jour des sélections, rien ne se passe comme prévu : Joseph est trahi par Emma et Youri, le groupe explose. Recueilli par Rémi, un ancien danseur étoile devenu professeur, Joseph découvre le milieu de la danse classique et rencontre la brillante Chloé, en pleine préparation du concours d'entrée au New York City Ballet. À travers cette rencontre, orchestrant l’alliance inattendue entre le hip-hop et la danse classique, Joseph va apprendre à se sentir légitime en tant que danseur et leader, et ainsi devenir artiste.
L'histoire de la naissance d'un jeune artiste
La journée de tournage débute par une séquence en extérieur, entre le jardin des Halles et la Canopée, qui voit Joseph (Rayane Bensetti), Emma (Fiorella Campanella) et Karim (Mehdi Kerkouche) faire leurs premiers pas dans la capitale et se rendre au studio de danse de Youri (Brahim Zaibat), qu'ils espèrent pouvoir impressionner afin de rejoindre son crew de danseurs. Une scène située au début du film, comme celles auxquelles nous assistons ensuite, qui retranscrit bien tout l'enjeu du rêve de Joseph et de ses amis, au centre du long métrage, comme nous l'explique entre deux prises Ladislas Chollat, réalisateur et co-scénariste du film avec Joris Morio.
"Je voulais raconter la naissance d’un artiste", confie le réalisateur de Let's Dance. "C’est l’histoire d’un type qui, au moment de l’heure des choix, de décider ce qu’il va faire de sa vie, décide d’être danseur et arrive à Paris avec sa copine et son pote. Ils ont le même rêve, cette envie-là, et se retrouvent dans la galère car entre le rêve et la réalité il y a tout un tas d’étapes. Et on voit Joseph se battre, à la fois avec les autres et aussi avec lui-même, car il est dans ce questionnement qu’on a tous en tant qu’artiste. "Pourquoi moi ? Est-ce que je suis la bonne personne au bon endroit ?". On attend toujours une validation des autres, jusqu’à ce qu’on se rende compte que cette validation on doit se la donner à soi-même".
Il y a beaucoup de magie à filmer la danse
Et si le réalisateur et metteur en scène de théâtre réputé avoue volontiers que "filmer la danse c’est compliqué car on est dans le mouvement en permanence", il nous explique également que ce passage des planches au cinéma, et le sujet du film, se sont un peu imposés à lui comme une évidence. "Souvent quand je faisais de la mise en scène on me disait "C’est très cinématographique ce que vous faîtes", et à force de l’entendre j’ai eu envie de faire du cinéma", explique Ladislas Chollat. "Ce film c’est les producteurs qui sont venus me voir en me disant "Est-ce que tu voudrais faire un film de danse ?". Un genre qu’on ne sait pas vraiment faire en France. Et du coup ce challenge m'a plu. (...) Arriver à faire un film de danse dans lequel il y a du sens et où on n’est pas seulement dans une course de performance. Un film qui raconte un récit un peu initiatique. Et j’ai senti que je pouvais donner ce souffle-là au film de danse. (...) Il y a beaucoup de magie à filmer la danse, le corps qui bouge dans l’espace".
De Danse avec les stars à Let's Dance, il n'y a qu'un pas (ou presque)
Une fois à l'intérieur de La Place, et plus précisément du studio 2, changement d'ambiance avec une scène plutôt tendue entre Rayane Bensetti et Brahim Zaibat. Un moment charnière du film, durant lequel Youri, célèbre breaker incarné par Zaibat, met Joseph au défi de l'impressionner en improvisant une chorégraphie devant lui. Dans cette salle de répétition où s'affairent les équipes techniques du film, une caméra a été installée au plafond afin de filmer d'en haut les figures et mouvements de breakdance effectués par Rayane Bensetti. Après quelques échauffements, le silence est demandé, la caméra tourne, sous l'oeil attentif et minutieux de Ladislas Chollat, et Bensetti se met à exécuter au sol les figures de la chorégraphie avec une apparente facilité assez bluffante.
"Travailler avec des personnes comme Rayane, qui ont de vraies capacités, c'est assez exceptionnel", confie Brahim Zaibat, qui ne tarit pas d'éloges sur son partenaire et ami, une fois la séquence en boîte. "Il aime tout ce qui est explosif. Tout ce qui est acrobaties, tout ce qui est technique, tourner sur la tête, tourner sur la main. Il vient, il s’entraîne, il essaye les mouvements une ou deux fois, et il arrive à le rentrer. C’est magnifique". Et si l'aisance de Rayane Bensetti, qui boucle en trois prises (dont une dernière "juste pour assurer au cas où") cette chorégraphie impressionnante, pourrait paraître normale pour un gagnant de Danse avec les stars, il convient tout de même de rappeler que le jeune comédien de 25 ans n'avait jamais réellement dansé avant de participer à l'émission de TF1.
Travailler avec des personnes comme Rayane, c'est assez exceptionnel
"J'ai vraiment fait mes premiers pas de danse dans Danse avec les stars", nous confie l'interprète de Joseph. "Mais avec Brahim [Zaibat] on se connaissait déjà de Lyon à l’époque. J’ai toujours été fasciné par les breakers. J’ai toujours eu une passion pour les trucs un peu acrobatiques, mais pas forcément la danse. C’est vraiment une première pour moi en danse hip-hop. J’ai plus l’habitude de faire des acrobaties que de la danse debout. C’est ça ma principale difficulté sur le film". Une difficulté vraisemblablement plutôt bien surmontée par Rayane Bensetti qui était l'unique choix de Ladislas Chollat pour incarner le personnage de Joseph : "Franchement, en France, il n’y a pas beaucoup d’artistes de son âge qui ont à la fois la notoriété pour porter un film, ses qualités d’acteur, et ses qualités de danseur", avoue le réalisateur.
Un vrai pari pour toute l'équipe
Le tournage de Let's Dance, qui s'est étalé sur huit semaines et s'achève dans quelques jours, a été précédé d'une phase intensive de répétitions pour les comédiens et danseurs, comme nous l'explique Mehdi Kerkouche, notamment connu dans le milieu pour être le chorégraphe d'émissions de divertissement à succès comme The Voice ou Miss France, et qui incarne dans le film Karim, le meilleur ami du héros : "On a commencé à répéter un mois avant le début du tournage. Pendant 15 jours on a travaillé avec Marion Motin, la chorégraphe, pour répéter toutes les chorégraphies du film. Et ensuite on a fait 15 jours avec Ladislas, où j’ai travaillé avec Rayane, avec Guillaume de Tonquédec [qui incarne un professeur de danse classique "et n'a jamais fait de danse classique de sa vie"], et où on a tous tenté de créer un vrai effet de groupe".
Une préparation nécessaire pour apprendre les différentes chorégraphies pensées par Marion Motin, qui a notamment été chorégraphe pour Stromae et Christine and the Queens, mais aussi pour se "former" davantage au métier d'acteur pour une partie des comédiens/danseurs du film, qui n'avaient jamais joué la comédie auparavant, ou très peu. Un pari qui a déjà fait ses preuves pour Ladislas Chollat : "C’est un vrai pari mais quand j’ai monté Résiste au Palais des Sports c’était vraiment essentiellement avec des jeunes qui n’étaient jamais monté sur scène auparavant et c’est toujours un pari heureux et joyeux pour un réalisateur".
Au vu de ce que l'on a pu observer sur le tournage, le talent des danseurs dans les différentes séquences de chorégraphies n'est en tout cas plus à prouver. Un sentiment partagé par Brahim Zaibat qui confie au sujet de ses petits camarades : "Ce sont des très bons danseurs français. Donc là on ne va pas mentir, ça va être de la vraie danse. (...) J’espère vraiment que la France va accepter ce genre de films et que les gens vont aller voir [Let's Dance]. C’est quelque chose d’assez fort, vous verrez". Fort au point d'impressionner les Américains et de rivaliser avec Save the Last Dance ou Sexy Dance, dans le sillage desquels Let's Dance semble s'inscrire ? "Oh que oui" répond immédiatement avec humour Rayane Bensetti, conscient que le but n'est "pas de copier les Américains mais de se différencier à notre manière". Un pari réussi ?Verdict en salles très probablement au premier semestre 2019.