La diffusion des Bracelets rouges, la série événement de ce début d'année 2018 sur TF1, s'est achevée lundi soir, devant 6 millions de téléspectateurs en moyenne. Un vrai succès, d'ores et déjà renouvelé pour une saison 2, qui a permis de révéler toute une brochette de jeunes comédiens talentueux, dont Audran Cattin, l'interprète de Thomas, que l'on avait pu apercevoir auparavant dans Trepalium et L'Ascension, dans des petits rôles.
Auréolé du succès des Bracelets rouges, Audran Cattin est actuellement en plein tournage de Philharmonia, nouvelle série qui devrait être diffusée d'ici la fin de l'année sur France 2 et qui compte notamment à son casting Marie-Sophie Ferdane, Lina El Arabi (Noces), François Vincentelli, Charlie Bruneau (En Famille), Tomer Sisley, Jacques Weber, et Véronique Jannot. Un thriller psychologique créé par Marine Gacem et Laura Piani, d'après une idée de la productrice Rose Brandford Griffith (On va s'aimer un peu beaucoup), qui nous plonge dans les coulisses de l'univers de la musique classique, alors qu'Hélène Barizet, une cheffe d'orchestre surdouée à la réputation sulfureuse, est nommée à la tête du Philharmonia, l'Orchestre National.
Nous nous sommes rendus sur le tournage hier, à la Philharmonie de Paris, et avons pu nous entretenir avec Audran Cattin, qui nous a parlé de ses débuts, de sa passion pour le théâtre, des Bracelets rouges, et de son personnage dans Philharmonia, qui devrait créer l'événement dans les mois à venir sur France 2.
AlloCiné : Comment tout a commencé pour toi en tant que comédien ?
Audran Cattin : J'ai commencé à faire du théâtre à Bordeaux. J'étais dans un collège jésuite et chaque classe de sixième avait une ouverture en art, avec des activités extra-scolaires. Et moi je suis tombé un peu par hasard sur le théâtre. On a fait une pièce, ça m'a beaucoup plu, et ensuite j'ai rejoint la troupe de Béatrice Bénéro, qui gère Le Théâtre en plus à Bordeaux. Une troupe de 90 comédiens, qui vont de 7 ans à 20 ans. Quand tu commences à 11 ans et que tu as 800 personnes devant toi, c'est impressionnant. J'y suis resté sept ans, jusqu'à mon Bac, et après je suis parti à Paris. Je suis entré au Cours Cochet, sous la direction de Jean-Laurent Cochet, qui a formé Depardieu, Luchini, ... Il m'a appris la rigueur, la diction, la respiration. J'étais un petit branleur, donc il m'a un peu recadré (rires).
J'ai beaucoup appris durant deux ans, et après je suis parti dans un jeune cours, qui s'appelle Le Foyer. J'étais dans la deuxième promo, mais c'était la première troupe qui se lançait, et on n'était que 20. Et en un an j'ai énormément travaillé. Et ensuite une de mes amies a voulu passer le concours de la Classe Libre [du Cours Florent, ndrl] et je l'ai accompagnée pour lui donner la réplique. Je ne devais donc pas passer le concours. Et un des gars du jury m'a dit "Est-ce que ça te dirait de passer le concours ?". Gratuitement du coup. Je l'ai passé, au troisième tour directement, et c'est comme ça que je suis entré à la Classe Libre.
Comment est-ce que tu gères le succès assez phénoménal des Bracelets rouges ?
Honnêtement, à part la petite notoriété des réseaux sociaux, je ne vois pas trop la différence. Mais je peux comprendre que ça puisse monter à la tête de certains jeunes. Mais si avant, comme moi, tu as travaillé et que tu as fait d'autres choses à côté, ça ne change pas grand-chose. Car là, en plus de Philharmonia, j'ai une pièce que je prépare pour avril, j'ai ma prépa au Conservatoire de Paris, ...
Et on ne doit pas forcément te reconnaître dans la rue vu que dans la série tu as le crâne rasé...
Oui, c'est ça, les gens ne me reconnaissent pas du tout, et c'est tant mieux, ça m'arrange (rires).
Qu'est-ce qui t'a plu dans le personnage de Thomas, que tu joues dans Les Bracelets rouges ?
Quand j'ai lu les scénarios, j'avoue que j'ai eu un peu peur. J'avais peur du côté pathos, larmoyant, mielleux. Je préfère la boue au miel (rires). C'est pour ça que j'ai adoré la version catalane, qui est très crue. Mais je trouve que Les Bracelets rouges a réussi à garder cet esprit-là, même si c'est plus doux. (...) Et plus je relisais les 6 épisodes, plus je voyais l'évolution du personnage et plus ça me plaisait. Et je me disais que c'était logique. Et j'avais envie de raconter une histoire comme celle-là, car j'ai connu un peu ça dans ma famille. Et plus ça allait plus je me rendais compte que Thomas et moi on est pareil en fait.
Il y a souvent des gens qui me demandent si c'est dur d'aborder un rôle comme ça, et de m'être rasé la tête pour le rôle. Et évidemment c'est dur. Mais je me suis rendu compte que la maladie, en plus de la douleur physique, passe aussi à 50% par le regard des autres. Et le fait d'être avec d'autres personnes qui ont la même maladie que toi, comme dans la série, ça permet d'oublier un peu la maladie. Albert Espinosa [le créateur de la série catalane originale, ndlr], qu'on a rencontré, nous disait que le plus triste ce n'est pas de mourir, c'est de ne pas vivre intensément. Le fait de se poser toujours des questions, de se dire "Je vais mourir", ou "On me regarde comme ça car je suis malade", forcément ça bouffe. Alors que si on est avec des gens qui n'ont pas ce jugement-là, on oublie un peu, ça rend les choses plus faciles.
En parlant du regard des autres, tu es allé dans le métro juste après t'être rasé la tête pour la série, pour te confronter à ce regard justement, c'est ça ?
Oui, je me suis rasé, je suis allé dans le métro, et là, oui, j'ai vu que ça changeait quand même pas mal le regard des gens. Mais ce n'est pas une construction que je fais tout le temps. Là ça m'amusait de voir ce que ça pouvait donner. Mais je n'avais pas vraiment besoin de me mettre dans la peau de Thomas. Il est tellement proche de moi qu'en me rasant la tête, la moitié du travail était déjà faite. Il fallait juste que je joue à être "moi".
L'une des forces de la série réside dans ses dialogues qui sonnent juste et naturel. Est-ce que tout était très écrit dès le départ ou est-ce qu'il y a eu une part d'improvisation sur le tournage ?
On a parfois remanié un peu les dialogues, oui. Car je pense que Marie [Roussin], la scénariste, écrivait en croyant que c'était le dialogue des jeunes. Alors que les dialogues des parents étaient très bien. Mais nous on avait besoin de mettre notre patte. D'autant plus que ça se rapprochait de notre personnalité.
Le tournage de la saison 2 est prévu en mai. Tu es prêt à rempiler ?
Oui, j'ai hâte car j'ai envie de retrouver ce personnage. J'avais peur au début, mais plus ça va et plus je suis content de cette série. Et même si ça n'avait pas fait des scores d'audience aussi élevés, c'est surtout les retours des gens hospitalisés et du corps médical qui font plaisir. C'est super que la série soit utile, surtout pour une fiction à grande audience. On reçoit des messages de personnes qui nous disent juste "Merci", et grâce à ça je me rends compte de l'ampleur de cette série. Si on arrive à répondre à des questions que des jeunes se posent, sur des sujets un peu tabous en famille, c'est super. Je suis content que mon métier serve à quelque chose.
Qu'est-ce que tu peux nous dire sur le personnage que tu joues dans Philharmonia, qui sera prochainement diffusée sur France 2 ?
Je joue Mattéo Borowski. C'est le fils du percussionniste de l'opéra. Il est très mélomane, il joue un peu de batterie, il a le rythme dans la peau. Il se rapproche pas mal de moi, c'est assez drôle. Je me suis imaginé qu'il faisait un peu de rap aussi, comme moi. (...) Ses parents sont séparés, il vit chez sa mère, et il entre dans la série alors qu'il attend son père. Et en l'attendant, dans les couloirs de la Philharmonie, il croise la cheffe d'orchestre qui lui demande ce qu'il fait là. Ils sympathisent et elle le fait entrer en tant que petit régisseur. Il est un peu le Jiminy Cricket de la cheffe d'orchestre. Et aussi un peu l'oeil du téléspectateur, qui découvre en même temps que lui tous les détails de l'orchestre. (...) C'est un personnage que j'adore et toute l'équipe de la série est vraiment géniale.
L'un des objectifs de la production et de France 2 avec cette série est de démocratiser la musique classique. C'est ce qui t'a plu dans le projet ?
Oui, je me suis dit "Enfin, une série chiadée avec un vrai orchestre". J'ai vu toutes ces références musicales, tous ces morceaux qui allaient être dans les épisodes, et je me suis dit "Putain, on va montrer ça à la télé !". Passer de la maladie, quelque chose qu'on ne montre pas trop à la télé, à la musique classique, qu'on ne montre pas beaucoup non plus, franchement je suis ravi. Je défends des trucs et ça me fait plaisir. C'est de la télé utile, qui donne du sens.
Est-ce qu'il y a des comédiens, d'autres générations notamment, qui t'inspirent ?
Steve Carrell. Ce mec, à chaque fois qu'il ouvre la bouche il m'émeut. Et chez les femmes, Vimala Pons, qui est une grande comédienne de théâtre et qui est incroyable. Golshifteh Farahani aussi, qui joue dans Paterson et dans Les Deux Amis. Et sinon, dans le travail et dans sa façon de choisir des rôles et de les travailler pendant longtemps, Daniel Day-Lewis. Pour moi c'est un exemple. C'est un vrai bosseur, et en plus il est très humble.
Un premier souvenir de spectateur ?
Ma vraie première claque, au théâtre, je crois que ça a été Vimala Pons justement, avec son spectacle GRANDE-. Mais j'ai aussi été impressionné par Robert Hirsch, que j'ai vu dans Le Père. Ou par Michel Bouquet. Quand tu les vois sur scène, tu te dis "Ok, je m'incline". Et en ce qui concerne le cinéma, je ne me souviens plus forcément du premier film qui m'a marqué, mais aujourd'hui mon film préféré c'est L'Etrange histoire de Benjamin Button de David Fincher.
La mise en scène, un jour, ça pourrait t'intéresser ?
Oui, j'aimerais bien. Là j'écris un scénario qui me tient vraiment à coeur. J'aimerais parler de l'âme, et du fait qu'on est des passeurs, notamment en terme d'éducation. Mais c'est compliqué car évidemment j'aimerais commencer par des choses avec beaucoup de moyens (rires).
La bande-annonce des Bracelets rouges :