Clint Eastwood et Warner Bros. sortent en salles Le 15h17 pour Paris, un long métrage portant à l'écran l'attentat avorté du Thalys, survenu le 21 août 2015. Il est adapté du livre éponyme signé par les trois Américains (Spencer Stone, Anthony Sadler et Alek Skarlatos) qui ont contribué à l'arrestation du terroriste. Dans le film, ces trois personnes et un couple de Français (Mark et Isabelle Moogalian) rejouent les événements qu'ils ont vécu de près. Rencontre avec ces "héros du quotidien".
AlloCIné : Qui de vous trois a reçu le premier le coup de fil disant "Clint Eastwood va faire un film sur votre histoire" ?
Spencer Stone : C'est moi ! Nous nous sommes rencontrés à une cérémonie au cours de laquelle il nous remettait une récompense. Nous savions que nous devions le voir après, et il adore les histoires vraies à propos des héros de la vie réelle. Nous cherchions une blague à lui faire, et comme nous écrivions le livre à l'époque, nous lui avons dit : "Eh ! On a écrit un livre, vous devriez en faire un film !" et il a dit "envoyez-le moi, on ne sait jamais". Nous l'avons fait, nous n'avons eu aucun retour pendant des mois. Je lui ai renvoyé le livre avec une lettre (...) et peu après le nouvel an 2017, il m'a appelé. J'étais assis devant chez ma mère, qui m'a demandé si elle devait me passer Clint Eastwood. [Je ne savais pas quoi répondre]. Nous avons échangé quelques mots et voilà !
Alek Skarlatos : Pour nous, c'était une icone. Aux Etats-Unis et même dans le monde, tout le monde le connait. Nous avons été élevé avec ses films. (...) Savoir qu'il allait réaliser le film a été un honneur et un soulagement, car nous savions qu'il allait faire du bon travail.
Mark Moogalian : C'était un choc quand [le producteur] Tim Moore m'a téléphoné, je ne m'y attendais pas du tout (...). J'avais déjà travaillé avec [Spencer, Anthony et Alek] sur le scénario pour savoir si ce qu'il allait raconter sur l'histoire du Thalys soit le plus fidèle possible. J'ai dit oui sans hésitation, car c'était pour [ma femme et moi] l'occasion unique de faire ce genre de chose.
Sans y avoir été confronté, on peut difficilement imaginer la dureté que cela peut représenter de recréer sa propre vie, et notamment vos actions à bord du train.
Anthony Sadler : Beaucoup de gens pensent que cela devait être difficile, mais cette situation s'est changée en quelque chose de positif pour nous. Côté logisitique par contre, c'était compliqué à recréer : pour tourner le film nous étions dans un train très étroit, avec des caméras, nous cherchions l'exactitude et tous les gens qui étaient vraiment dans le train à ce moment-là étaient là à chercher où ils étaient précisément [au moment de l'attaque]... Mais à part cet aspect logistique, pour nous émotionnellement, cela n'avait aucun impact.
MM : Le tournage [de la scène du Thalys] a duré 4 jours. Pour l'avoir vécue, j'espérais retrouver les émotions de ce jour-là. Une chose qui a jouée c'est que j'ai perdu mon père le matin du premier jour de tournage. Il voulait que je fasse le film, et je me suis inspiré des émotions que je ressentais pour les canaliser pour jouer mon rôle.
Isabelle Moogalian : Je ne me suis pas du tout préparée, j'ai fait ça à l'instinct et j'ai retrouvé par moment les mêmes émotions. C'était parfois un peu difficile.
Comment Clint Eastwood vous a-t-il dirigé ?
MM : Ce qui est intéressant, c'est que Clint Eastwood laisse faire, il nous dit "faites-le". On fait quelques prises, et on ajuste "un peu plus de çi, un peu plus de ça", mais tout est naturel et agréable. Son équipe et lui sont de formidables professionnels. Cela rend tout plus facile.
IM : Il nous a fait confiance en fait. Et traité comme des acteurs professionnels.
Avez-vous demandé à jouer vos propres rôles ?
SS : Non, [Clint Eastwood] nous l'a demandé, sinon on ne l'aurait jamais envisagé. Nous l'avions rencontré plusieurs fois à cette époque, son casting durait depuis un mois [sans aboutir] et nous étions à trois semaines du tournage. Nous avons reçu un mail nous invitant à manger avec lui. Et sur un ton naturel, il nous a dit "Eh ! ça vous dirait de nous rejouer la scène les gars ?" et on a répondu "évidemment", mais pour aider les acteurs ! Sauf qu'on sentait qu'il tournait autour du pot et on lui a demandé clairement. Il a répondu : "Ouaip, pourquoi pas". Et on n'allait pas dire non...
BA "Le 15h17 pour Paris" :