Pour plonger le spectateur dans l'horreur et illustrer la nostalgie des années 80 tout en narrant les affres de l'adolescence, la bande-originale de Ça se devait d'être solide. C'est le compositeur Benjamin Wallfisch qui a été choisi pour mettre en place les musiques et asseoir l'atmosphère du Derry de 1988. En marge de la musique originale composée spécialement pour le film, l'équipe a également introduit plusieurs chansons phares de l'époque, dont nous vous proposons ci-dessous un échantillon spécial...
"Antisocial", par Anthrax (1988)
C'est l'un des moments les plus marquants de Ça ! Alors que la bande des Losers s'arme de pierres pour défendre le jeune commis Mike contre la bande d'Henry Bowers, on peut reconnaître avec étonnement les notes d'une chanson ultra connue en France : "Antisocial". Si vous avez reconnu ce titre écrit en 1980 par le groupe français de hard rock, Trust, vous vous êtes certainement aperçus qu'il s'agissait de sa version anglophone. Ce titre engagé, qui a connu un énorme succès en France, a en effet été repris en 1988 par le groupe américain Anthrax avec des paroles aussi fortes que l'originale, mais toutefois différentes (les paroles n'ont pas été littéralement traduites).
Antisocial, tu perds ton sang froid !
C'est donc finalement assez naturel que cet hymne ultime de la rébellion soit utilisé lors de cette scène charnière, qui forge la cohésion du groupe, alors rejoint par Mike, leur dernier membre. A ce moment essentiel du film, les enfants décident aussi de ne plus se laisser faire, de prendre les armes, de se rebeller et de s'unir pour la première fois contre un ennemi commun.
A noter que cette reprise d'"Antisocial" figure sur l'album "State of Euphoria" du groupe new-yorkais Anthrax sur lequel on retrouve également la chanson "Misery Loves Company", référence directe à Misery, autre roman de Stephen King !
"Love Removal Machine", par The Cult (1987)
Après la glaçante scène d'ouverture du film, dans laquelle Georgie disparait, Ça se recentre vers une ambiance plus solaire et chaleureuse. Plusieurs mois ont ainsi passé et on découvre Bill et la bande des losers au complet (enfin, pas tout à fait) dans les couloirs de leur collège. L'énergie y est alors très électrique puisque l'année scolaire est finie. Les garçons s'empressent de sortir pour enfin profiter de leur été...
Cette scène de libération et d'émulation collective se fait au son de "Love Removal Machine", une chanson de hard rock signée du groupe britannique The Cult. Un titre sorti en 1987, influencé par le "Back in Black" d'AC/DC, qui avait alors permis au groupe de conquérir les Etats-Unis.
"You Got It (The Right Stuff)", par les New Kids on the Block (1988)
L'un des groupes américains les plus populaires des années 80 ne pouvait qu’atterrir dans Ça. Les New Kids on the Block, boysband de Donnie Wahlberg dans lequel son frère Mark a aussi commencé, ont d'ailleurs droit à plusieurs clins d'oeil dans le film. Le premier a lieu au début, à la sortie du collège. En cette fin d'année scolaire, Beverly, qui vient de se faire tyranniser par des filles de l'école, sort par la sortie située derrière l'établissement. C'est aussi par là que Ben, le petit nouveau, a choisi de quitter les lieux, à vélo, ses écouteurs sur les oreilles.
Beverly lui parle alors pour la première fois et lui demande ce qu'il écoute sur son walkman. C'est "The Right Stuff" qui retentit aux oreilles de l'adolescente devant un Ben plutôt gêné. En cette année 1988, le boysband américain, formé en 1984, connaît enfin une belle popularité, certes toute fraîche. "The Right Stuff" est ainsi le second hit des New Kids on the Block, sorti après "Please Don't Go Girl" (que Ben, un peu trop enthousiaste sur le moment, chante d'ailleurs à Beverly lorsqu'elle s'éloigne !), une balade qui aurait signé la fin du groupe si elle n'avait pas marché in extremis.
You got the right stuff, baby
Un autre titre des New Kids, ou plutôt un refrain, est entendu lorsque Ben emmène la bande dans sa chambre pour leur montrer ses recherches sur Derry. Lorsque Beverly ferme la porte, elle remarque que, derrière, se trouve justement un poster des New Kids on the Block ! A ce moment, éclate le refrain de "Hangin' Tough" ! Beverly sourit devant l'affolement de Ben avant de refermer la porte. Elle garde le secret de son ami qui, comme nombre de ses comparses de l'époque, avait un peu honte de gigoter au son des New Kids on the Block, qui ne remportaient pas que le coeur des adolescentes...
"Dear God", par XTC (1986)
Après leur première confrontation musclée avec le terrible Pennywise, les membres du Club des losers en ressortent lessivés. Sur ces images, on peut alors entendre la chanson "Dear God", du groupe anglais XTC. Datant de 1986, cette chanson avait été éditée sur la Face B du single "Grass", paru sur l'album "Skylarking". Elle était inspirée par une série de livres pour enfants du même nom, censée aider les enfants à répondre aux questions qu'ils se posaient sur Dieu.
Le titre commence ainsi comme une lettre, chantée par un enfant avant d'être reprise par le chanteur de XTC, Andy Partridge, qui s'adresse à Dieu, dénonçant la souffrance des êtres humains et leur abandon. "Dear God" est on ne peut plus approprié à cette scène, les enfants venant de voir l'horreur dans toute sa splendeur.
"Six Different Ways", par The Cure (1985)
C'est l'une des autres scènes du film où le groupe se solidifie à travers les épreuves. Alors que chaque membre du club des Tarés a eu droit à sa petite visite du Clown sous diverses apparences, Beverly, elle, a eu droit à une scène de film d'horreur. Alors qu'elle s'est réfugiée dans sa salle de bain et s'est assise dans sa baignoire pour découvrir en toute intimité la carte de son admirateur anonyme, elle entend des voix d'enfants l'appeler. Elle réalise que ces voix viennent du lavabo et, plus particulièrement, du conduit de l'évier.
Six different ways inside my heart
Elle y introduit un mètre qui ressort ensuite plein de sang et de cheveux. C'est alors que des litres et des litres de sang en jaillissent, éclaboussant tout sur leur passage. Affolée que son père, venu voir pourquoi sa fille hurlait, ne remarque strictement rien, elle appelle ses nouveaux amis. Eux voient tout à fait la scène d'horreur telle qu'elle est : la salle de bain devenue rouge dans tous ses recoins.
Pendant que Richie fait le guet dehors, le groupe aide donc Beverly à nettoyer sa salle de bain au son de "Six Different Ways", chanson de The Cure présente sur leur sixième album, "The Head on the Door" (1985), qui avait permis au groupe culte britannique de conquérir un public plus large avec des titres très éclectiques. Ecrite par Robert Smith, comme toutes les chansons de l'album,"Six Different Ways" est à cet égard un titre ouvertement pop avec une mélodie sucrée et presque kitsch. Même si le coeur de Beverly en pince un peu pour Bill à ce moment-là, le titre pourrait toutefois évoquer en filigrane l'attachement de la jeune fille aux six garçons du groupe ("Six different ways inside my heart...").
"Bust a Move", par Young MC (1989)
Invitée par Bill à passer la journée avec eux, Beverly les étonne tous, d'abord, en les rejoignant puis en plongeant la première dans l'eau. Plus tard, après qu'ils se soient tous amusés au lac, Beverly fait bronzette en sous-vêtements, allongée sur un rocher, lunettes de soleil sur le nez et walkman en marche. Peu habitués à ce genre de spectacle, les losers la regardent bouche bée, totalement perdus dans les limbes. Lors de cette scène censée être légère et drôle en figurant les premiers émois sexuels et amoureux, c'est bien le "Bust A Move", seul tube du rappeur Young MC, que l'on entend.
Dans ce titre de 1989, dans lequel on peut entendre Flea des Red Hot Chili Peppers à la basse, Young MC donne une sorte de petite leçon de séduction à travers l'histoire d'un homme qui, de prime abord, est malchanceux avec les femmes. Mais, en choisissant de "Bust a move", c'est-à-dire de se lancer et de tenter quelque chose, il arrivait toujours à séduire la gente féminine.