AlloCiné : Demain tout commence est réalisé par Hugo Gélin, qui, avec Comme des frères, son premier long métrage, avait imaginé un film à la fois drôle, tendre et touchant. Est-ce l'idée de tourner avec ce réalisateur qui vous a attiré vers ce projet ?
Omar Sy, comédien : Quand j’ai accepté ce projet, Hugo [Gélin] n’était pas encore là, car c’est un film de producteurs. Ça part d’un film mexicain : il y avait déjà le squelette de cette histoire, de cette relation entre ce père et cette fille, mais ce n’est pas du tout le même film. Evidemment c’était à condition qu’on ait une version française qui vaille le coup, car vraiment entre l’idée de base et le film qu’on a aujourd’hui, il y avait une montagne de travail. Une fois qu’Hugo est arrivé, cette montagne est devenue une petite colline ! C’est comme si c’était un sujet qu’il aurait pu choisir lui-même. Il y a des films de commande, mais là vraiment, il avait tellement à dire à ce sujet, avec ce qu’il est, avec son vécu, avec sa sensibilité aussi. Quand on voit son film précédent, ce sont des thèmes un peu cousins.
Hugo est quelqu’un d’intelligent, qui a beaucoup de finesse, beaucoup de pudeur. C’est aussi un mec drôle. Il y a tout ça qu’il a réussi à mettre dans cette histoire qui est assez balèze. J’étais intéressé par le projet, mais j’ai accepté une fois qu’Hugo était là parce qu’il a amené ça à ce scénario, tout ce qui m’intéresse, et la manière élégante de dire tout ça, avec beaucoup de finesse, avec douceur. Ce qui fait qu’à la fin, il y a ce truc d’espérance qui est important dans une histoire comme celle-là. Dès le départ, il y avait le potentiel d’une bonne comédie, le potentiel d’un bon mélo et il fallait un bon équilibre pour avoir un bon film.
Et vous aussi, vous avez amené ce que vous êtes, votre bonne humeur, toutes ces choses qui font qu’on s’attache vraiment à ce personnage ?
Je crois que oui. Quand Hugo est arrivé, je faisais déjà partie du projet. Il savait déjà pour qui il allait écrire. Il était inspiré par ce qu’il connait et a vu de moi. Et puis, il a l’intelligence de l’écoute. Il échange avec tout le monde.
C’est vrai que dans ce film, il y a des endroits qui sont plus confortables que d’autres. Mais ce qui est bien, c’est qu’il y avait les deux : des zones de confort, et de nouveaux terrains à explorer. Le film était excitant pour ça. Il y avait plein de nouvelles choses à essayer, et en même temps aussi un endroit où je me dis, je vais remettre un peu de ça, de ce que les gens ont déjà et c’était bien de partir de quelque chose que tout le monde connait de moi.
Le Samuel du début ressemble plus à quelque chose qu’on a déjà vu, de ce que j’ai déjà joué, donc les gens sont en confiance. Ils me retrouvent. Et puis, petit à petit, on les amène ailleurs, et je trouvais ça intéressant comme manière d’utiliser la notoriété. Parfois, ça peut jouer contre nous. Mais quand on peut l’utiliser pour surprendre, c’est intéressant. C’est assez beau et habile dans le film.
Ça colle très bien avec Gloria Colston. Cette famille que vous formez, on croirait qu’elle existe vraiment ! On sent qu’il y a un truc qui s’est passé entre vous…
Oui, bien sûr ! Parce qu’on a passé du temps ensemble déjà. Et puis j’ai une fille du même âge. Très vite, on a connecté. Il y a eu le tournage, on a fait la promo, on a passé quasi le week-end ensemble. On est allé voir un concert. On en a vécu des choses. Mais dès le départ, il y avait quelque chose d’assez simple avec Gloria. Très vite, on a laissé tomber les conventions, la politesse, la timidité, tout ce qu’on peut imaginer, pour communiquer vraiment, purement quoi. Ça, c’est arrivé très tôt. C’était une chance.
On communique beaucoup par la vanne. C’est l’ensemble de tout ça. Et puis il faut dire qu’en tournage, on est loin de notre famille. Je n’avais pas mes enfants avec moi. Glo n’avait pas son père avec elle. Peut être qu’on comble un peu ? Je crois que je ne pourrais plus jamais ôter ce regard paternel sur Gloria. Je pense qu’à un moment donné dans sa vie, ça va la gonfler ! (sourire)
J'aimerais également revenir sur votre année plus généralement. Entre ce film, Inferno de Ron Howard sorti début novembre, et Chocolat de Roschdy Zem en début d'année, vous avez pu vous montrer dans différents genres, vous illustrer dans différents styles de film. Est-ce que vous avez l'impression que c'était un peu une année idéale ?
Bien sûr, oui ! Quand on regarde ces trois films, ça montre la chance que j’ai aujourd’hui. Pour Chocolat et Demain tout commence, c’était la chance d’être en direct avec des producteurs pour choisir un sujet. Et puis aussi la variété, la diversité des sujets.
Ça montre le choix que j’ai aujourd’hui. C’est la chance que j’ai en tant qu’acteur et c’est celle dont j’ai envie de profiter le plus. De pouvoir faire les uns et les autres, c’est la richesse de mon métier. Etant un autodidacte, en apprenant en faisant, je suis obligé de passer par des choses différentes pour apprendre plus.
Vous essayez toujours de trouver un équilibre entre des films comme celui-là dans lesquels vous portez vraiment le projet, et peut être des blockbusters où vous avez un rôle moins important mais où ça peut être enrichissant de voir comment se passe une grosse machine comme celle-là…
C’est exactement ça. Dans chaque projet, j’essaye de me dire : où est la nouveauté pour moi ? Où est le challenge ? Parce qu’il faut aussi que je dépasse des choses, que j’aille apprendre quelque chose. Un défi contre moi-même en fait, quelque chose à relever. J'ai besoin de ça.
Sur Inferno, avec Ron Howard comme réalisateur et Tom Hanks comme partenaire, ça compte dans le choix. En étant près de ces gens-là, je vais forcément apprendre. Ce que je peux y apprendre est important, mais ce que je peux y amener en tant qu'acteur compte, ce que je peux tenter de nouveau. Pour moi, ce sont des tentatives à chaque fois.
Est-ce que dans les propositions hollywoodiennes, vous refusez beaucoup de choses ? Ou il y a encore cette curiosité qui fait qu'on a envie d'essayer...
Pour être très honnête avec vous, j'ai plus refusé qu'accepté à Hollywood ! Parce que déjà je n'ai pas beaucoup de temps. Et puis, je ne prends pas tout ce qui vient ! Tout ce qui vient n'est pas forcément ce que j'ai justement envie de tenter. C'est la curiosité, l'envie qui me guident. Donc oui, j'ai envie de tourner là-bas, ça m'éclate. Il y a vraiment des projets super, j'ai fait des super choses là-bas. Mais je ne suis pas prêt à tout et je n'ai pas envie de tout là-bas ! Il y a des choses à prendre et à jeter, comme partout, comme en France.
En France, c'est pareil, je ne prends pas tout non plus. Aujourd'hui, ma chance, c'est que je peux prendre ou jeter, et je suis conscient qu'il y a des acteurs qui ne peuvent que prendre. J'essaye que chaque projet ne soit pas une répétition de l'autre. Pour pouvoir me dire un jour, j'ai tenté tout ce que j'ai pu tenter. Explorer des choses nouvelles. Et je suis encore plus soucieux de ça parce que c'est aussi mon école. L'air de rien, je suis acteur à plein temps seulement depuis quatre ans !
Je ne sais pas si vous aurez le droit de m'en parler, mais normalement au printemps, il y a la suite de Jurassic World qui se tourne. Est-ce que vous savez si vous ferez partie de l'aventure ?
Je peux le dire car maintenant j’en suis presque sûr. Je ne suis pas dedans. Voilà, je l’ai dit. C’est comme ça ! Ca se tourne au printemps et logiquement, à ce moment là, entre le temps qu’il reste pour tourner, si je devais être dedans, j’aurais eu un coup de fil. Ils ne m’ont pas appelé. Ca veut dire qu’à mon avis je ne suis pas dedans.
On sait bien, une fois n’est pas coutume. C’était déjà génial d’être dans le précédent et d’avoir participé à cette aventure-là. Après, c’était ni obligé, ni forcé que j’y sois. Et puis maintenant, c’est un autre metteur en scène, avec d’autres envies, d’autres sensibilités. Il se trouve que j’étais dans le premier parce que Colin Trevorrow avait vraiment envie de travailler avec moi, c’était une envie de metteur en scène. Il n’y a rien de mieux que ça, c’est à dire être sur un plateau et le metteur en scène a envie de travailler vous. Si on est imposé et que le metteur en scène n’a pas envie de vous, c’est horrible. Ce ne sont pas des expériences intéressantes. Voilà, une fois n’est pas coutume.
Colin Trevorrow va justement être occupé bientôt par Star Wars 9... Est-ce que ce serait une possibilité de rejoindre le projet ? Est-ce que ça vous ferait plaisir ?
Mais vous connaissez la réponse, quand même ! Evidemment, évidemment que oui ! Ca, j’ose même pas… Colin va faire son film et je ne sais pas. En tout cas, s’il m’appelle, même si c’est pour passer une porte, je le fais avec plaisir ! Vous ne vous rendez pas compte, Star Wars ! Après Star Wars, c’est bon ! Après Star Wars, c’est fini ! Je sais qu’il travaille déjà dessus.
C'est génial quand ces choses arrivent, mais en fait je suis assez prudent, je me protège en n’ayant pas ce genre d’envies. Pour que ça me surprenne. S'il m'appelle, c'est top, mais je ne me dis pas 'peut être qu'il va m'appeler' car s'il ne le fait pas, on est déçu. C'est pareil pour Jurassic : je ne me suis pas dit 'ah, je vais être dans le 2ème pour sûr', car c'est le meilleur moyen d'être déçu dans la vie. Il faut rester ouvert, mais ne pas attendre les choses précisément.
La bande-annonce de Demain tout commence, à l'affiche ce mercredi :
Propos recueillis par Brigitte Baronnet à Paris le 28 novembre 2016