De quoi ça parle ?
Patriote idéaliste et enthousiaste, le jeune Edward Snowden semble réaliser son rêve quand il rejoint les équipes de la CIA puis de la NSA. Il découvre alors au cœur des Services de Renseignements américains l’ampleur insoupçonnée de la cyber-surveillance. Violant la Constitution, soutenue par de grandes entreprises, la NSA collecte des montagnes de données et piste toutes les formes de télécommunications à un niveau planétaire. Choqué par cette intrusion systématique dans nos vies privées, Snowden décide de rassembler des preuves et de tout divulguer. Devenu lanceur d’alerte, il sacrifiera sa liberté et sa vie privée. En juin 2013, deux journalistes prennent le risque de le rencontrer dans une chambre d’hôtel à Hong Kong. Une course contre la montre s’engage pour analyser les preuves irréfutables présentées par Snowden avant leur publication. Les révélations qui vont être faites dans cette pièce seront au cœur du plus grand scandale d’espionnage de l’histoire des États-Unis.
Oliver Stone reprend du poil de la bête
Le projet Snowden est venu à point nommé, relançant l'envie d'Oliver Stone de s'atteler à nouveau à un cinéma politique et engagé, après avoir bataillé en vain pour tenter de mettre en chantier son projet de biopic sur Martin Luther King : "J’étais vraiment épuisé et je m’étais dit : plus jamais. Je ne ferai plus ce genre de films. Je ne m’approcherai plus de ces idéalistes, ces hommes de conscience. Ils me brisent le coeur", confie le cinéaste. Le producteur Moritz Borman, collaborateur de longue date de Stone, l’a appelé pour l’informer que l’avocat russe d’Edward Snowden, Anatoly Kucherena, avait pris contact avec lui. Kucherena avait écrit une fiction, un roman à la Dostoïevski, en partie inspiré de son expérience avec Snowden, et il voulait rencontrer Stone pour lui parler de l’adaptation de ce roman au cinéma : "À l’époque, nous ne savions pas si nous ferions le film, on avait seulement l‘idée que nous pourrions le faire à travers son histoire si nous décidions d’en faire une fiction", relate le metteur en scène. Un peu plus tard, il prendra l'avion direction Moscou pour rencontrer Snowden en personne. Le projet a ensuite été officiellement lancé.
La collaboration de Snowden
L'implication d'Edward Snowden a été déterminante dans le processus de création du film : "Je ne peux pas vous révéler exactement ce que Ed nous a confié. Il faut malheureusement que cela reste un mystère. Je crois que la seule solution, c’est qu’Ed écrive un livre un jour. Mais dans une histoire dont les faits de base ne seront jamais ni confirmés ni infirmés par la NSA, toute l’authenticité possible a été apportée grâce à l’aide de Snowden", explique Oliver Stone. "La NSA est un monde encore relativement inconnu et il était extrêmement précieux d’avoir son témoignage sur la façon dont les gens travaillent, se comportent et interagissent. Rien n’aurait été possible sans l’implication d’Ed. Oliver aurait refusé de le faire sans sa participation et moi aussi", ajoute le scénariste Kieran Fitzgerald.
Un documentaire sur le sujet
Un documentaire a récemment été consacré à l'histoire d'Edward Snowden ; il s'agit de Citizenfour, de Laura Poitras, qui a remporté l'Oscar du Meilleur documentaire. Après avoir réalisé My Country, My Country (2006), Laura Poitras avait été placée sur liste de surveillance aux États-Unis. Au moment où elle se penchait sur le cas de la "surveillance généralisée", Edward Snowden a pris contact avec elle sous le nom de Citizenfour, pour lui faire des révélations sur ce qu'il venait de trouver. La réalisatrice y a tout de suite vu le sujet de son prochain documentaire.
Un film pour changer les choses ?
Oliver Stone est résigné concernant le fait qu'un film puisse éveiller les consciences et changer les choses : "J’en suis arrivé à un point où je continue à faire ce que je fais mais sans m’attendre à des retombées spectaculaires. Je suis très content que ce soit une histoire qui tienne la route du point de vue dramatique. On la suit, si on la suit, et elle permet de se rendre compte que ce monde nous est dicté, nous est imposé. Et c’est ce qu’on peut espérer de mieux. Mais franchement, je ne crois pas que les films changent quoi que ce soit. Ils sont oubliés avec le temps… plein de gens ont déjà oublié. John Oliver a fait un sketch à ce sujet : les gens ne connaissent pas Snowden : « C’est pas le type de Wikileaks ou je ne sais quoi ?", déclare le cinéaste. "Le prix qu’il a payé est énorme et cela montre une chose, c’est qu’on est toujours aussi buté, je veux dire, notre gouvernement. On gracie plein de crapules, mais les gens qui nous rendent service… ceux-là, on leur fait vivre un enfer. Tout ce que je peux dire, c’est que toutes les saloperies qu’on fait laisseront une trace. Et au bout du compte, s’il y a des historiens dans les temps futurs, ils les découvriront, ils sauront quel empire nous sommes devenus et ce ne sera pas flatteur", déplore le réalisateur.
Collaboration scénaristique ambitieuse
Oliver Stone a écrit le scénario de Snowden avec Kieran Fitzgerald, auteur du script de The Homesman de et avec Tommy Lee Jones : "J’avais déjà travaillé avec lui, nous avions développé ensemble un bon script, même si le film ne s’est jamais fait", déclare Stone. "Kieran était un scénariste jeune, qui s’y connaissait en informatique et qui impressionnait Snowden", ajoute-t-il. "J’ai senti que cette histoire était sans doute la plus importante que j’écrirais jamais, alors j’ai dit oui. Et une semaine plus tard, j’étais à Moscou en rendez-vous avec Edward Snowden", confie le scénariste. Oliver Stone a d'ailleurs annoncé la couleur à Fitzgerald de manière claire dès le début : "Kieran, j'ai écrit Midnight Express en six semaines et ça m’a valu un Oscar. J’attends la même chose de toi !"
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