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    L'Odyssée sort en salle : pourquoi ne pas en profiter pour (re)voir "Le Monde du silence" ?
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Alors que "L'Odyssée", biopic consacré à Jacques-Yves Cousteau, sort en salle ce mercredi, pourquoi ne pas en profiter pour (re)découvrir "Le Monde du silence", le documentaire sous-marin qui lui avait valu une Palme d'Or et un Oscar ?

    En salle ce mercredi 12 octobre, L'Odyssée revient sur le destin de celui que les français ont longtemps appelé "l'homme au bonnet rouge", le commandant Jacques-Yves Cousteau. Co créateur du scaphandre autonome à air comprimé, pour respirer sous l'eau. Une révolution absolue, qui a notamment permis aux plongeurs - cinéastes de s'aventurer profondément sous l'océan et d'y capter une vie inconnue jusque-là, à commencer par Cousteau lui-même.

    L'amorce du Monde du silence remonte à une rencontre déterminante que fait le commandant Cousteau en 1944, à la Libération de la France. Son chemin croise en effet celui de James Thomas Dugan, reporter au magazine américain Yank. C'est lui qui achève de le convaincre de se lancer dans la vulgarisation océanographique. Dugan l'aidera d'ailleurs par la suite à traduire et publier ses livres en langue anglaise, dont celui que Cousteau co-écrit en 1953 avec un autre pionnier de la plongée, Frédéric Dumas, et qui a pour titre Le Monde du silence Toutefois, si le film documentaire de 1956 porte le même nom, il se concentre avant tout sur les expéditions menées à bord de la Calypso en 1954 et 1955.

    C'est en juillet 1953 que Cousteau entreprend son projet de périple d'exploration marine. Il s'adresse alors à l'IDHEC -l'Institut des hautes Etudes Cinématographiques- pour demander l'aide d'un étudiant qui l'aidera à filmer. L'Institut lui propose alors les services d'un tout jeune assistant de 21 ans : Louis Malle, le futur réalisateur d'Au revoir les enfants et Lacombe Lucien, qui fera ses premières armes de réalisateur avec Le Monde du silence. Après un stage de plongée du côté de l'île de Riou au large de Marseille durant l'été 1953, Il est fin prêt pour rejoindre l'équipage de la Calypso, qui appareille en 1954.

    L'Odyssée

    Sillonnant la Méditerranée, la Mer Rouge, l'Océan Indien et le Golfe Persique, l'équipe a utilisé pas moins de 25 Km de pellicule, qui seront réduit à 2500m pour le montage final du film. Les caméras sous-marines furent conçues par André Laban, présenté comme le chimiste à bord de la Calypso. Grâce à ses caméras, Le Monde du silence fut le second film à montrer des images en couleur des fonds marins, deux ans après Sesto Continente réalisé par Folco Quilici; mais le film de Cousteau fut le premier à offrir aux spectateurs émerveillés des images de fonds marins prises à 75 m de profondeur.

    Présenté en avant-première à Paris le 7 février 1956 au théâtre des Champs-Elysées, le film sortira le 26 mai, en plein le Festival de Cannes. Un timing on ne peut plus heureux : il remportera la Palme d'or à la 9e édition du Festival, sans compter qu'il fut aussi nommé pour le Prix de la mise en scène ainsi que le Prix spécial du Jury. Le film partage d'ailleurs, encore à l'heure actuelle, le privilège d'être le seul film documentaire à être palmé, aux côtés du Fahrenheit 9/11 de Michael Moore. Aux Etats-Unis, il remporte même le Prix du Meilleur film étranger décerné par le National Board of Review. Consécration suprême : en 1957, il remporte l'Oscar du Meilleur documentaire. A l'époque, la Critique, positive, est unanime, tandis que le public français, lui, se précipite en salle. Le Monde du silence attirera ainsi plus de 4,6 millions de spectateurs. Un chiffre toujours inégalé au Box Office pour un documentaire.

    Un film polémique... Dès les années 1990

    De plus en plus sensibilisés à l'écologie et à la cause animale au fil des ans (et heureusement !), certains n'hésitent pourtant pas à pointer du doigt dès les années 1990 le documentaire, qui comporte des scènes effectivement choquantes : lacération accidentelle d'un jeune cachalot par les pales de la Calypso, obligeant l'équipage à l'achever à la carabine; massacre de requins, destruction d'un récif corallien à la dynamite, membre de l'équipage se tenant debout sur le dos de tortues...

    L'an dernier, la polémique est revenue de plus belle. Dans l'émission sur internet "Là-bas si j'y suis" dont le site Slate s'est fait l'écho, le romancier et cinéaste Gérard Mordillat a flingué le film à bout portant dans une chronique où il jugeait le film "naïvement dégueulasse". Il terminait d'ailleurs sa chronique ainsi : "C’était prophétique, Le Monde du silence. Parce que c’est bien le silence qui couvre aujourd’hui cette destruction massive des récifs de coraux, l’extermination des animaux marins, la chasse, la pollution, le cynisme de tous les gouvernements au nom de la science, de la recherche et du profit. Des films honteux comme ça et ignobles, quand on les revoit aujourd’hui, on se dit qu’on a été aveugles".

    Voici sa chronique, en intégralité :

    Contacté par l'Express, l'océanographe François Sarano, conseiller scientifique de Cousteau durant 15 ans, tempère évidemment les propos de Mordillat : " A l’époque, nous étions certes épouvantablement naïfs, mais Cousteau a ouvert la mer et il est devenu protecteur de la nature (…). Cette réaction est normale, mais il est nécessaire de remettre le film dans son contexte : notre planète comptait 2,7 milliards d’habitants, la mer était une donnée inconnue, et à nos yeux, elle représentait une corne d’abondance inépuisable."

    Contacté également par le Nouvel Observateur en juillet 2015, l'intéressé livre d'ailleurs une anecdote intéressante sur ce sentiment de malaise déjà présent dans les années 1990. Questionné sur l'éventualité d'une nouvelle diffusion du Monde du Silence sur une chaîne publique, ce dernier répond : "Je comprends que ces images choquent, notamment les plus jeunes et ceux qui ont eu la chance de naître dans une société déjà sensibilisée aux questions d’écologie et de respect de la vie animale. C’est pourquoi je fais partie de ceux qui militent pour que le film soit accompagné d’un documentaire complémentaire qui permettrait de recontextualiser le film". Et d'ajouter : "Je me rappelle qu'en 1992, France 2 avait voulu diffuser Le Monde du silence à l'occasion du Sommet de la Terre à Rio consacré aux changements climatiques. La chaîne avait demandé à Cousteau de pouvoir couper la scène du massacre des requins. Bien évidemment, Il a refusé".

    Last But Not Least, on en profite pour vous dire justement que la chaîne Ushuaia TV diffuse en exclusivité les films du Commandant Cousteau :

    - Le monde du silence : 1ère diffusion le 11/10 puis rediffusions le 20/10 à 13h45, le 28/10 à 16h40 et le 3/11 à 22h30.

    - Le monde sans soleil : 1ère diffusion ce soir à 20h40 puis rediffusion le 24/10 à 13h45, le 31/10 à 23h05 et le 10/11 à 17h20.

    - Voyage au bout du monde : 1ère diffusion le 20/10 à 20h40 puis rediffusions le 25/10 à 23h50 et le 2/11 à 13h35.

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