Le cadre étiré de "Mommy"
Xavier Dolan a, dès ses débuts, montré à quel point il savait maîtriser le langage cinématographique pour faire passer les émotions les plus excessives. De tous ses films, virtuoses, Mommy est sans nul doute le chef d'oeuvre, sachant allier la fièvre du prodige passionné et la maîtrise du réalisateur confirmé. Emmenée par le jeune Antoine-Olivier Pilon, la scène clef du film se joue sur les accords du tube d'Oasis, Wonderwall.
Dans une séquence clipée au cours de laquelle il fait du skateboard en musique et en liberté, le jeune héros (sorte d'alter ego enragé du fougeux Dolan) écarte les bras et suivant son mouvement, le cadre s'élargit passant du format inhabituel choisi pour le film (1:1) à celui plus habituel (1:85:1) utilisé par le cinéma. Les bandes noires latérales qui, outre le fait d'oppresser le spectateur, ont jusqu'ici exprimé l'enfermement des personnages, disparaissent d'un seul geste, donnant de l'air au décor et à ses héros, autorisés à croire dès lors à un avenir meilleur. Une échappée belle audacieuse et ingénieuse, qui explose littéralement les cadres de la mise en scène, au plus près du ressenti des personnages.
A couper le souffle :