"Baccalauréat" a fait forte impression lors de sa projection aux journalistes...
Maria Drăguș: Je ne l'ai pas encore vu ! (rires)
Vous allez le voir quand ?
Le réalisateur Cristian Mungiu tenait beaucoup à ce qu'on le voit ensemble ce soir lors de sa projection officielle, avec tout le monde dans la grande salle du Palais de Cannes. Cela va forcément être très spécial, d'autant que mes parents seront également ici. C'est le plus important festival de cinéma et il s'agit de ma seconde venue ici pour un film dans une compétition (ndlr: elle jouait dans Le Ruban Blanc de Michael Haneke, Palme d'or en 2009).
Le film repose sur une dynamique de thriller. Une erreur, celle du père, déclenche une mécanique implacable.
Le scénario contenait déjà cette dynamique. Avant de tourner avec lui, j'avais regardé les précédents films de Cristian, mais ils sont très différents.
C'est la première fois que vous tournez pour Cristian Mungiu justement, un grand directeur d'acteurs. Quelle est sa méthode avec les comédiens ?
Il est très calme. Il considère que les erreurs n'existent pas. On fait beaucoup de prises, chacune est différente. On est toujours dans un dialogue, on parle énormément de nos personnages. Sur le plateau de tournage, on en parlait encore et encore, on rajoutait des couches successives qui se superposaient au personnage. C'est très enrichissant. J'étais très nerveuse à l'idée de travailler avec lui, forcément, mais quand j'ai vu sa méthode de travail avec les acteurs qui passaient le casting pour le rôle du père, j'ai compris que je ne devais pas avoir peur ou me sentir mal.
Le cinéma de Mungiu est également marqué par une rythmique très spécifique du texte. Comment vous réussissez à la créer ?
Oui, le dialogue a son rythme chez Mungiu ! On a beaucoup répété pendant une semaine avant le tournage, sur les lieux mêmes, avec tous les acteurs présents. Sur le plateau, il travaille vraiment sur des petites choses, sur les mots. Le scénario est très bien écrit. Parfois, lors d'un tournage, il peut arriver à un comédien de changer une ligne de dialogue, pour diverses raisons. Ce n'est pas le cas avec Mungiu.
Une des thématiques au coeur du film est celle de la volonté du père d'envoyer sa fille à l'université en Angleterre : il faut quitter à tout prix, d'une certaine manière, la Roumanie.
Oui, je sais. J'ai un rapport différent à cette thématique puisque je n'ai jamais vécu en Roumanie, je ne connais pas profondément cette société ni cette situation. J'ai grandi en Allemagne. Quand j'ai lu le scénario, j'ai justement parlé à Cristian de cette problématique que vous me soulignez. Je lui ai notamment dit que son film parlait de la corruption en Roumanie et des compromis "nécessaires" des habitants. Et là il m'a répondu clairement non : cette histoire parle d'autre chose. On a évoqué la relation père / fille, qui est le vrai moteur dramatique de Baccalauréat.
Ce que montre de manière très limpide le film, c'est que la première victime morale de la corruption est le corrupteur. C'est justement le compromis auquel est confronté ce père...
Personne n'est incorruptible. Le père veut tout faire pour sa fille au point justement de passer la ligne jaune.
A ce titre, la dernière réplique de votre personnage dans le film libère une puissance émotionnelle ahurissante.
Je sais. Pour moi aussi, cette réplique a été compliquée à dire. Et les circonstances du tournage n'ont pas aidé. Ce jour-là, il faisait très chaud, plus de 30 degrés, on était en plein soleil et ce plan séquence était techniquement difficile à mettre en place. Et effectivement cette réplique était dure. Je ne me l'explique as totalement. On a fait énormément de prises et je ne sais pas laquelle Cristian a gardé.
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