Vous avez raté Vinyl lors de sa première diffusion l'an dernier sur OCS ? Pas de panique, Canal+ vous propose une séance de rattrapage dès ce jeudi 6 juillet à 22h35. L'occasion, pour les amateurs de séries estampillées HBO, de se laisser entraîner dans l’univers résolument "sexe, drogue, et rock’n’roll" de ce drama d'époque qui, à défaut d'avoir fait un carton et d'avoir connu une saison 2, aura tout de même marqué l'histoire des séries... pour de mauvaises raisons ("accident industriel", tumultes en coulisses).
Produite notamment par Martin Scorsese et la légende du rock Mick Jagger, Vinyl, dont les deux premiers épisodes sont diffusés ce soir, a en tout cas le mérite de proposer une plongée léchée dans le New York des années 1970, en explorant une partie de l’histoire de la musique à travers le quotidien de Richie Finestra (Bobby Cannavale), qui tente désespérément de ressusciter son label sur le déclin. Et si on nous l'a trop souvent vendue comme "la nouvelle série de Martin Scorsese", Vinyl est pourtant aussi, et surtout, le nouveau bébé en date de Terence Winter, son co-créateur et showrunner. Un homme qui fait plus que jamais partie de l’écurie HBO et qui, depuis pas mal d’années maintenant, travaille dans l’ombre du géant Scorsese. Cette nouvelle diffusion de Vinyl est donc la bonne occasion de rendre à Winter ce qui est à Winter…
De Xena aux Soprano, il n'y a qu'un pas
Toutes les routes mèneraient-elles à HBO ? On est en droit de le penser en se penchant sur l’itinéraire de Terence Winter qui, après des débuts d’avocat sur la côte Est, envoie tout valser au bout de deux ans et part s’installer à Los Angeles en 1991, avec un objectif en tête : devenir scénariste. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a réussi ! Le natif de New York, qui intègre rapidement une formation d’écriture au sein des studios Warner, fait d’abord ses armes sur des séries telles que Sister, Sister, Les Nouvelles aventures de Flipper le dauphin, ou Xena, la guerrière (dont il écrira trois épisodes), avant de rejoindre la cour des grands en 2000, grâce à David Chase et au clan d’un certain… Tony Soprano.
Nouveau venu au sein de l’équipe de scénaristes des Soprano dès la deuxième saison, Terence Winter se retrouve alors propulsé en peu de temps sur les écrans radars de la planète séries, en écrivant pour l’un des dramas qui a changé la télévision, l’a précipitée dans ce qu’on appelle aujourd’hui "l’âge d’or des séries". Durant cinq saisons, il signe (ou co-signe, avec notamment David Chase ou Matthew Weiner) le scénario de 25 des 86 épisodes qui composent la série, s’essaie à la réalisation une fois (avec "Sois un homme mon fils", l’épisode 17 de l’ultime saison), et remporte pas mal de nominations et de prix pour son travail, dont deux Emmy Awards du meilleur scénario. Mais aussi prestigieuse soit-elle, cette première incursion dans la grande famille HBO n’est finalement qu’une mise en bouche pour Winter. En effet, sentant probablement qu’elle tient entre ses mains un talent rare, la chaîne HBO décide dès lors de ne plus lâcher son nouveau poulain.
Winter/Scorsese, accords parfaits
En 2008, HBO lui confie donc les rênes de l’adaptation en série du roman Boardwalk Empire : The Birth, High Times, and Corruption of Atlantic City. Une plongée dans les années 1920, en plein cœur de la Prohibition, qui permet au scénariste de collaborer pour la première fois avec Martin Scorsese, qui a choisi le projet, auquel il est attaché en tant que producteur délégué, pour faire son retour à la télévision (lui qui a réalisé en 1986 un épisode des Histoires fantastiques de Steven Spielberg). Résultat : après un pilote réalisé par Scorsese lui-même en 2009 (dont le coût s’élève à 18 millions de dollars), HBO est emballée par l’association des deux hommes et commande alors 11 épisodes supplémentaires. Lancée le 19 septembre 2010, Boardwalk Empire, qui compte notamment à son casting Steve Buscemi, Michael Pitt, et Michael Shannon, devient rapidement un succès pour la chaîne, qui connaîtra cinq saisons et remportera même un Golden Globe de la meilleure série dramatique en 2011.
Vinyl, le flop qui avait tout pour être un tube
Alors que Terence Winter a créé Boardwalk Empire, et en a été le showrunner du début à la fin, apportant ainsi sa propre vision à l’histoire, pour beaucoup de gens, elle reste, aujourd’hui encore, "la série de Martin Scorsese". Pourtant, contrairement à un Steven Soderbergh qui a réalisé l'intégralité des 20 épisodes de The Knick, Scorsese, lui, n’a réalisé "que" le pilote de Boardwalk Empire (mais est tout de même resté impliqué, notamment au niveau du casting). Et si "l’histoire d’amour" entre Terence Winter et Martin Scorsese a continué avec Le Loup de Wall Street (le troisième script de Winter pour le grand écran, après Réussir ou mourir et Brooklyn Rules), cette nouvelle collaboration a une fois de plus relégué le créateur de Boardwalk Empire au statut de "travailleur de l’ombre".
Avec Vinyl, dont il est là encore le showrunner, Terence Winter tenait peut-être enfin l'occasion de se faire un nom et de sortir de l'ombre de Scorsese qui, encore une fois, a été assez peu impliqué sur la série au-delà de la réalisation du pilote. Oui mais voilà... Hit assuré sur le papier, Vinyl, qui a mis des années à voir le jour (elle a d'abord été pensée comme un long métrage, puis intitulée History of Music dans une première version), n'a pas convaincu le public, pas plus que la critique d'ailleurs. Pourtant renouvelée par HBO pour une seconde saison 4 jours seulement après son lancement le 14 février 2016, la série ne parvient pas à voir ses audiences décoller (entre 530 000 et 764 000 téléspectateurs selon les épisodes). Le casting emmené par Bobby Cannavale et Olivia Wilde et l'ambiance glam de l'ensemble n'y feront rien. Dès lors, les tumultes se font sentir en coulisses, et Terence Winter est "viré" par HBO quelques jours avant la fin de la diffusion de la première saison de 10 épisodes.
La chaîne lui trouve rapidement un remplaçant pour la saison 2 (Scott Z. Burns, à qui l'on doit le scénario de La Vengeance dans la peau ou encore de Contagion), avant finalement d'annuler la série quelques semaines plus tard. Il fallait se rendre à l'évidence : la mayonnaise Vinyl n'avait pas pris, et une deuxième saison remaniée n'y aurait rien changé. Une décision qui s'explique en partie par le coût de la série (on parle de 100 millions de dollars la saison, avec 30 millions consacrés au premier épisode), que les faibles audiences ne sont jamais parvenues à justifier. Rapprochant ainsi Vinyl d'un bon gros accident industriel. Mais au moins, Terence Winter n'aura pas eu à voir son "bébé" potentiellement dénaturé par un nouveau showrunner.
Depuis, le scénariste, producteur et showrunner s'est fait plutôt discret. Tout juste a-t-il signé une version du scénario du remake à venir de Scarface par David Ayer, avant que le script ne soit retravaillé par les frères Coen. Prépare-t-il dans son coin le futur succès télévisuel qui lui permettra d'oublier l'échec de Vinyl ? L'avenir nous le dira. Mais ce qui est quasi certain, c'est que vu comment les choses se sont terminées entre lui et HBO, le chapitre de la collaboration entre Winter et la chaîne de Game of Thrones semble bel et bien clos.
La première et unique saison de Vinyl est diffusée tous les jeudis soirs à 22h35 sur Canal+ à partir de ce jeudi 6 juillet, au rythme de deux épisodes par semaine.
La bande-annonce de Vinyl :