AlloCiné : Comment avez-vous composé votre Belle(s) famille(s) ? Comment avez-vous formé votre casting, mêlant différente génération d'acteurs ?
Jean-Paul Rappeneau, réalisateur : J’ai eu la chance souvent d’avoir de grands acteurs avec moi. Là il s’agissait d’un sujet plus personnel, où je reviens sur des souvenirs, des choses qui recoupent un peu ma propre vie. Donc je tenais à ce que ce soit des gens que j’admire depuis longtemps et avec lesquels je n’avais jamais tourné.
C’est vrai que ça fait longtemps que j’avais envie de tourner avec Mathieu Amalric, et là ça m’a paru évident. S’il me fallait un représentant dans le film, ça ne pouvait être que lui. Mais ça faisait aussi très longtemps que je rêvais de tourner avec André Dussolier, Nicole Garcia, Karin Viard... Je n’avais encore eu personne, sauf Jean-Marie Winling, qui joue le notaire provincial, et qui était dans Cyrano. Pour moi, il est un peu, dans ce film, le lien entre Cyrano et Belles familles. Il vient d’une première famille et se retrouve dans la deuxième.
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Vous avez dit ce film qu'il s'agit d'une forme d'"autobiographie imaginaire". C'est à dire ?
Jean-Paul Rappeneau : C’est une sorte de puzzle qui rassemble des éléments divers, des éléments qui sont tous rattachés à des souvenirs. J’ai vécu 17-18 ans en province, puis après je suis monté à Paris. C’est un peu une histoire de « home coming », d’un homme qui revient.
Dans le film, Mathieu Amalric revient de Shangaï, où il a vécu pendant 15 ans. Cet endroit où il a vécu a beaucoup changé, il y a des éléments qui restent anciens, mais il y a des éléments nouveaux, et surtout le monde entier autour a changé. C’est la France d’aujourd’hui –une France ancienne et une France qui a changé, qui n’est plus celle que j’ai connu quand j’avais 15 ans- dans la mondialisation.
J’ai eu le sentiment en tournant le film que j’étais chez moi. J’ai connu ces gens-là, pas forcément dans ma propre famille. Ce sont des histoires que j’ai connu, que j’écoutais quand j’étais dans cette ville. Des fausses familles, des deuxièmes familles, des gens qui se trompent… Des choses que j’ai entendues. Mais je n’ai pas vécu à Shangaï, je ne vis pas avec une chinoise… Ce qui est raconté sur le personnage ne concerne pas ma propre vie. Pourtant, d’une certaine manière, ça me raconte… Enfin, c’est à vous de voir, et de me dire ! J’ai fait le film selon mon cœur.
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Quel regard portez-vous sur le cinéma français aujourd’hui ?
Jean-Paul Rappeneau : Je continue à me féliciter que ce soit l’un des premiers cinémas du monde. Avec les Etats-Unis, on se regarde non pas en chiens de faïence, mais des deux côtés de l’Atlantique.
Il y a une diversité. Chaque année, on découvre de nouvelles personnes. Je pense à Katell Quillévéré car un de ses comédiens joue dans Belles familles. Suzanne est un très bon film. Je prends l’exemple de l’apparition de Katell Quillévéré dans le paysage français, il y en a d’autres. J’admire profondément Jacques Audiard, François Ozon, Abdellatif Kechiche, Arnaud Desplechin… Le cinéma français dans sa diversité. Ça n’arrête pas d’apparaitre, de changer…
Je fais peut être un cinéma comme on en fait plus, j’allais dire. Mais quand on dit ça, il y a une vieillerie là-dedans. Non ! Parce que si vous avez vu le film, il y a –je l’espère- une énergie, une rapidité…
Notre interview-carrière avec Jean-Paul Rappeneau
Propos recueillis au Festival du film francophone d'Angoulême 2015