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    "La Révélation": Rencontre avec Hans-Christian Schmid

    Présenté en compétition à la Berlinale en 2008, "La Révélation" sort enfin dans nos salles aujourd'hui. AlloCiné a rencontré le réalisateur Hans Christian Schmid ("Requiem"), un des plus brillants représentants du jeune cinéma allemand.

    Qu’est ce que vous a poussé à faire un film sur les crimes de guerre et la Cour pénale internationale de La Haye ?

    Hans-Christian Schmid : La curiosité. On a su si peu de choses sur le droit international et la guerre en Bosnie. Ce sont des sujets tellement compliqués que je voulais en apprendre davantage. J'ai été marqué par ma rencontre avec une procureure. Elle était dans son petit bureau où des classeurs s'entassaient jusqu’au plafond, des dossiers sur les crimes de guerre. Cette femme n'a pas perdu de vue l'idéal qui était le sien au début.

    Est-ce que la justice est négociable ?

    La Justice est une notion très extensible. Je pense qu’on s’en rend surtout compte quand on doit subir une énorme pression du temps. Le personnage principal se demande : jusqu'à quel point peut-on s’éloigner de ses principes et pouvoir se regarder encore dans une glace ? C’est le conflit principal dans lequel se trouve cette femme. Normalement, la justice n’est pas négociable. Mais c’est toujours mieux de faire le travail comme ils le font à La Haye, c'est-à-dire avec les contraintes liées à la pression du temps, que ne pas le faire de tout.

    Comment pouvez-vous garder de la distance avec des histoires aussi fortes ?

    C’est clair que lorsqu'on s'attaque à un film comme La Révélation (Storm), on s'y consacre à 100%. J’essaie donc de ne pas avoir des autres obligations à côté. Je ne veux pas garder de la distance, mais être très près au sujet pour me concentrer sur mon travail. C’est évidemment très éprouvant pour nous. Après une journée de tournage, avec des scènes difficiles, on ne sort pas complètement indemne. On n’a pas tout de suite envie d’aller manger ou parler à des gens.

    Les personnages agissent de manière assez rationnelle malgré la haine qu’ils éprouvent...

    L’agression du frère de Mira se dirige envers lui-même et non envers des autres personnes. Les recherches qu’on a faites pour préparer le film nous ont montré que chaque personne réagit différemment. Il y a des femmes qui se sont suicidées, il y en a sûrement qui sont parties à la recherche de leur violeur. En général, les femmes ont besoin de beaucoup de temps pour commencer à parler. Pendant longtemps, elles n’en parlent pas du tout, même pas à leur mari. Quand le tribunal les demande de venir, c’est souvent une bonne expérience pour elles car elles rendent publique cette vérité. Elles ont le sentiment que c’est important de dire ce que s'est passé et de condamner l’éventuel criminel. Mais pour beaucoup de femmes c’est aussi traumatisant, car on leur demande raconter leur expérience en peu de temps. Elles auraient surement des très longues histoires à raconter, mais le tribunal leur en donne rarement l’occasion.

    Quels autres thèmes vous intéressent particulièrement ?

    J’ai déjà parlé plusieurs fois de la Pologne, pays voisin de l'Allemagne : dans Au loin, les lumières (Lichter) ou dans Et puis les touristes (Am Ende kommen Touristen), que j’ai produit. Je suis donc surement très intéressé par la Pologne, mais avec toujours un point de vue allemand sur les choses. Dans "The Wondrous World of Laundry" , on voit le voyage du linge sale d’un hôtel allemand à une blanchisserie polonaise. En tant que réalisateur allemand, je n’aurais pas choisi de filmer des ouvriers polonais qui partent en Irlande. C’est vrai que je poursuis souvent les mêmes sujets : le travail, l’Europe, les frontières qu’il y a toujours ou qui ont disparu...

    Propos recueillis à Berlin en février 2008 par Barbara Fuchs.

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