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    "The Fountain" : Rencontre avec Darren Aronofsky

    A l'occasion de la sortie de "The Fountain", Allociné a rencontré Darren Aronofsky, réalisateur culte de "Requiem for a dream", qui signe ici une fable métaphysique aussi fascinante que déroutante. Morceaux choisis.

    AlloCiné : La production du film a duré six ans. Que s'est il passé pendant toutes ces années ?

    Darren Aronofsky : Durant ces six années j'ai surtout passé du temps à réunir suffisamment d'argent et à obtenir le feu vert des studios. Le tournage quant à lui n'a duré que 60 jours.

    Au final, le film ressemble-t-il à ce que vous aviez en tête au début ?

    Non. Ce n'est jamais le cas. Certains réalisateurs arrivent peut être à se tenir à leur idée de départ mais ce n'est pas mon cas. Peu importe la masse de travail que vous pouvez faire en écrivant et en dessinant, dès que l'on se retrouve dans un espace en trois dimensions avec des acteurs, des objets, des couleurs, les contraintes de la caméra... Ca devient forcément quelque chose de différent.

    D'où vient votre intérêt pour la culture sud-américaine, très présente dans The Fountain ?

    Quand j'étais à l'université, je me suis fait plaquer par une fille le jour de mon anniversaire, en février. Comme j'étais vraiment déprimé, je suis allé dans un bar avec deux amis, dont Sean Gullette (ndlr : l'acteur principal de Pi). On en voulait au monde entier, alors on a décidé de prendre la route... On a acheté une voiture, des packs de bière, et on a roulé jusqu'au Mexique. Quand le fait d'être entre hommes a commencé à nous porter sur les nerfs, on s'est naturellement mis à la recherche de femmes... Les lieux les plus appropriés pour en rencontrer étaient les sites touristiques, alors nous sommes allés aux ruines Maya de Palenque. C'était la première fois que j'en voyais. J'ai trouvé ça magnifique ! Quand je suis retourné à l'université, j'ai pris des cours d'histoire sur la civilisation Maya. Depuis je suis resté passionné.

    Comme dans Requiem for a Dream, la musique est omniprésente dans le film. Comment avez vous travaillé cette fois ?

    Clint Mansell a d'abord composé une première version de la bande-originale. Il me l'a faite écouter et je lui ai donné quelques indications qu'il a prises en compte pour apporter des modifications. Quand il a terminé de composé les thèmes principaux, nous nous sommes rendus en Ecosse pour travailler avec le groupe Mogwai. Ensuite nous sommes allés à San Francisco pour enregistrer avec le Kronos Quartet, avec qui nous avions déjà collaboré sur Requiem for a Dream. Puis nous sommes revenus à New-York pour finaliser le mixage, c'était aux environs de Noël 2005. Le film était déjà monté alors.

    Vous avez beaucoup répété ?

    Hugh et moi avons passé près de quatorze mois à répéter ! C'est le temps qu'il lui a fallu pour s'entrainer à adopter la position du lotus, et pour apprendre le Tai Chi. Nous avons donc travaillé sur ces points une fois par semaine pendant quatorze mois.

    Vous avez dit que les acteurs représentent 90% d'un film. Le film aurait été entièrement différent alors avec Brad Pitt et Cate Blanchett qui devaient tenir les rôles principaux à l'origine. Vous éprouvez des regrets de ne pas avoir tourné avec eux ?

    Qui sait ce que le film aurait été avec Brad... On ne peut pas l'imaginer. Hugh était tellement impliqué dans le projet, je pense que je n'aurais pas pu faire le film avec un autre acteur. Un de mes producteurs avait l'habitude de parler des "Dieux du casting"... Dans Requiem par exemple, je n'ai pas pu avoir les acteurs que je voulais au départ. Tout le monde m'a laissé tomber.

    Qui étaient-ils ?

    Le premièr que nous avions contacté à l'époque était Tobey Maguire, avant même Spider-Man. Ensuite nous nous sommes tournés vers Joaquin Phoenix, mais à ce moment sa soeur voulait aussi un rôle dans le film donc il a refusé de s'impliquer plus. Adrien Brody a également refusé le rôle. Beaucoup de personnes ont refusé de travailler sur Requiem for a dream. Certaines le regrettent encore. A cette époque, la carrière de Jennifer Connelly n'était pas celle qu'elle a maintenant. Personne ne voulait que je la prenne pour ce rôle. Alors nous avons demandé à Milla Jovovich en premier. Quant au rôle de Marlon Wayans, nous avions demandé à David Chappelle. Mais il a eu peur du rôle donc il a refusé.

    Avec seulement deux longs-métrages, vous êtes devenu un réalisateur culte pour beaucoup de jeunes cinéphiles...

    Quand j'étais jeune, j'allais dans un cinéma à Manhattan où étaient diffusés des films comme Orange mécanique, Eraserhead ou encore Stop Making Sense... A l'époque, mon rêve était de faire des films cultes comme ceux-ci, qui sont programmés aux séances de minuit. Le fait que Pi et Requiem for a dream puissent toucher ce genre de spectateur est vraiment génial. Vous savez, j'adore les films que l'on aime tous quand on est jeune et qui parfois déroutent les personnes âgées. Je suis toujours punk, j'essaye constamment de me diriger vers des choses nouvelles. Et je pense que The Fountain se destine à un public jeune... Pour l'apprécier vous devez avoir l'esprit ouvert, vous devez aimer les comic-books, etc.

    Internet a également eu un bon impact.

    Ce n'est pas tout le temps mauvais. Mais c'est intéressant de voir comment c'est devenu une partie intégrante de la production. Les sites de fanboys ont un véritable impact sur beaucoup de choses. Beaucoup de réalisateurs communiquent directement avec eux. C'est une toute nouvelle manière de marketer un film et un réalisateur.

    A mon tour de vous poser une question. Dans le film, est-ce que vous avez compris ce que représentait l'inquisiteur ?

    Allociné : ...

    C'est assez subtil... Mais si vous voyez le film une seconde fois – et je vous encourage à le faire car le film est construit comme un puzzle – vous vous rendrez compte que l'inquisiteur est lui-même un cancer. Au lieu de gangrener le sang, il gangrène l'Espagne...

    Propos recueillis par Eric Kervern le 8 septembre 2006

    Fiche film

    Bande-annonce

    Les réactions des spectateurs après la projection du film au Festival de Deauville

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