Nous sommes à Sydney en juillet 2005, le tournage de Superman Returns a débuté depuis bientôt cent jours suivant un scénario élaboré par Dan Harris et Michael Dougherty (sous l'oeil vigilant du réalisateur Bryan Singer). Un duo qui avait déjà fait ses preuves sur X-Men 2 et qui cette fois s'attaque à une autre institution : Superman. Allociné les as rencontrés... Tout tout tout vous saurez tout sur le retour de l'homme d'acier, prévu pour le 12 juillet prochain.
Allociné : "Superman Returns" s'inscrit-il dans l'histoire développée dans les 4 premiers films ou est-ce un nouveau départ basé sur les comics ?
Michael Dougherty : Nous aimons qualifier Superman Returns de pseudo suite. Dan, Bryan et moi adorons les films de Richard Donner et je pense que ça aurait été une erreur de revenir sur la genèse de l'histoire. Tout le monde connaît les origines de Superman. Donner l'a très bien raconté à mon avis. La série Smallville le fait également et nous ne voulions pas deux incarnations différentes qui pourraient semer la confusion. Nous avons préféré pousser l'histoire un peu plus loin plutôt que de la reprendre depuis le début.
Dan Harris : Nous souhaitions aussi intégrer un langage visuel qui était important pour nous. Il y eu tellement d'incarnations de Superman au fil des années, tellement d'histoires autour de lui, tellement de détails... Combien de fois Superman a-t-il sauvé un avion ? C'est arrivé de nombreuses fois et de manières différentes... Nous avons juste mélangé ces diverses inspirations et décidé de s'éloigner des vieux films et des vieux livres.
Etes vous les deux seuls scénaristes à avoir travaillé sur "Superman Returns" ?
M.D. : Sur ce scénario, il n'y a eu que Dan, moi et Bryan.
D.H. : Il y a eu d'autres rédacteurs avant nous, J.J. Abrams a signé une première mouture du scénario pour McG et Brett Ratner il y a quelques années. Avant, Kevin Smith avait aussi écrit un scénario. Mais l'histoire était à chaque fois différente. Nous avons eu une approche complètement inédite pour notre scénario.
Quels éléments sont indispensables à tout film sur Superman ?
Mike et Dan : Les scènes de vol !! (Rires)
M.D. : Les films de Donner étaient tellement justes qu'ils font maintenant partie de l'inconscient collectif. Les décors, la musique et tous les personnages Clark, Superman, Jimmy, Lois, Lex, Perry White... Si jamais on laisse de côté un seul de ces éléments, tout film sur Superman serait incomplet.
D.H. : En même temps, il y a une histoire originale derrière tout ça, qui a déjà prouvé son succès. Mais nous n'avons pas fait de remake pour autant. Il y a aura beaucoup de choses que vous n'aurez jamais vu auparavant dans les autres films.
Vous pouvez nous en dire plus ?
D.H. : Oui, on vous enverra le scénario et vous verrez bien... (Rires)
Comment avez vous abordé la psychologie de Superman ?
D.H. : Superman s'est éloigné de la Terre pendant plusieurs années, et le monde a évolué dans un sens qu'il ne soupçonnait pas. Il revient alors que les règles ont changé. Dans les premiers films, il devait avant tout trouver sa place dans le monde. Dans Superman Returns, il va devoir se remettre en question pour retrouver sa place parmi les hommes.
Qu'est ce qui vous attire dans les films de super-héros ?
D.H. : Pour moi c'est quand la part d'humanité interagit avec des éléments surnaturels. Par exemple, dans Superman 1, quand Clark Kent arrête une balle... Les super-héros interagissent avec les éléments quotidiens d'une manière que vous n'avez jamais osé imaginé. J'adore ces petits moments où la magie s'immisce dans le quotidien.
M.D. : Superman est aussi, principalement, une histoire d'amour. On voulait savoir ce qui se passe quand un super-héros tombe amoureux. Superman est invulnérable mais son coeur ne l'est pas...
Ce sont les faiblesses humaines de Superman qui vous intéressent ?
D.H. : Emotionnellement...
M.D. : C'est un désastre !
D.H. : C'est un étranger. Il a grandi dans une ferme comme un enfant américain typique, et quand les choses changent cela l'affecte terriblement.
Qu'en est-il de Loïs Lane ?
M.D. : Les anciennes Loïs Lane étaient toutes des femmes d'affaires occupées, qui n'avaient pas de temps à consacrer à leur vie privée, à Clark Kent ou à qui que ce soit d'autre. Elle l'est toujours bien entendu, mais certains aspects de sa personnalité ont changé. Quant à Clark, il s'aperçoit que son premier amour est dans les bras d'un autre... On a tous connu cette impression au lycée...
Comment vous êtes vous partagés l'écriture du scénario ?
D.H. : Nous proposons toutes nos idées à Bryan et nous choisissons ensemble nos scènes favorites. On se les partage et on les écrit chacun de notre côté. On se les envoie ensuite par mail pour que chacun les réécrive, apporte ses idées, puis on les envoie à nouveau, et enfin on présente la version finale à Bryan. Il doit choisir parfois entre dix versions différentes d'une même scène. C'est lui qui tranche.
C'est important d'avoir un réalisateur à qui vous faites confiance et inversement ?
D.H. : Oui ça nous aide beaucoup. Il n'y a pas de coups bas entre nous. La seule chose qui nous intéresse est le film et son histoire. Nous avons toujours dit que X-Men 2 était un camp d'entraînement... Superman Returns est sans doute notre première bataille.
En quoi ce film s'inscrit-il dans son époque ? Est-ce un film de 2006 ?
D.H. : Nous pensons tous que le film est ancré dans une dimension intemporelle. Ce n'est pas un film post 11-septembre, nous n'y prenons pas de parti politique.
M.D. : Nous évitons vraiment d'intégrer des éléments qui puissent dater le film.
D.H. : Il n'y aura pas de références modernes. Les décors de Guy Dyas s'inscrivent aussi dans cet ordre idée. On ne peut pas exactement dire de quelle époque ils sont. Mais d'un autre côté les relations entre les personnages sont plus modernes que celles des films de 1978. Nous vivons dans une société plus libre, et certains tabous n'existent plus.
Parlez nous de Loïs Lane et de son fils...
M.D. : Loïs a une famille maintenant. Quand Clark revient il ne découvre pas qu'elle est simplement fiancée, elle a fondé une famille. Quand il regarde Loïs et Richard, il voit ce qu'il aurait pu être si il n'était jamais parti. Et je pense qu'au fond de lui, Clark veut une vie normale, une femme et un enfant...
Superman va briser une famille ?!
D.H. : Nous avons fait particulièrement attention à ce point. Ce n'est pas un briseur de couple et de famille. En même temps, les personnages ont une attitude moderne. Loïs Lane a tourné la page, elle a fondée une famille, même si elle n'est pas encore mariée. James Marsden (Richard White) est un quasi-Superman. Il est presque l'homme idéal mais...
M.D. : Il n'a aucun super pouvoir !
D.H. : Loïs Lane s'implique profondément dans sa relation avec lui, et malgré son fils, elle n'est pas allée au bout de tout ça. Ce monde est réel, les gens sont souvent indécis.
M.D. : C'est une relation à laquelle on peut s'identifier. Comme lorsqu'on retrouve notre amour d'adolescence 10 ans plus tard, marié avec des enfants. C'est quelque chose auquel on ne peut toucher ni chambouler même si on aurait envie du contraire...
D.H. : Clark va devoir se contenir, même si au fond il est loin d'être un briseur de couple. Ca va être très dur pour lui de gérer cette situation. Nous avons fait attention à ce ce que ça ne dérape pas et que les deux hommes se mettent à s'insulter. Mais cette situation dramatique donne du poids au film.
Du point de vue psychologique, où se situe Superman parmi les autres super-héros comme Batman ou Spiderman ? Est-il cynique, ou positif ?
D.H. : Il se situe au milieu. Mais il se rapproche quand même des super-héros positifs. Nous avons constaté ça après avoir vu les premières images montées du film. Son personnage évolue.
M.D. : Nous avons travaillé sur X-Men 2 qui était un film cynique et sombre sur les minorités opprimés. Mais Superman Returns est bien plus amusant.
Parlez nous de Lex Luthor...
M.D. : Tout le monde connaît Lex Luthor. Mais le notre ne sera pas aussi cabotin que celui interprété par Gene Hackman. Il ne sera pas non plus le sombre Lex Luthor dont la seule idée fixe est de détruire Superman.
D.H. : Ce n'est pas Dr Doom ! Il est plus amusant que ça. Avec Kevin Spacey, on s'aperçoit vite que c'est un homme qui peut devenir bien plus inquiétant que Keyser Soze...
L'interview se poursuit page suivante. Les deux scénaristes reviennent sur leur expérience avec les super-héros, évoquent la dimension religieuse de Superman et laissent échapper quelques informations au sujet d'une éventuelle suite...