La méthode de génie pour filmer des scènes intimes en toute sécurité... expliquée par la réalisatrice de Babygirl
Thomas Desroches
Thomas Desroches
-Journaliste
Les yeux rivés sur l’écran et la tête dans les magazines, Thomas Desroches se nourrit de films en tout genre dès son plus jeune âge. Il aime le cinéma engagé, extrême, horrifique, les documentaires et partage sa passion sur le podcast d'AlloCiné.

Dans "Babygirl", Nicole Kidman se donne corps et âme. La star d'Hollywood incarne une PDG impliquée dans une relation sulfureuse avec son stagiaire. La réalisatrice Halina Reijn nous raconte le tournage rock'n'roll de ce thriller.

Dans Babygirl, tout est une question de nuance et de pouvoir. Nicole Kidman joue Romy, PDG d'une grande entreprise de robotique, femme puissante et mère comblée. Sa vie se renverse quand elle croise le regard de son jeune stagiaire (Harris Dickinson) avec qui elle va entretenir une liaison basée sur la domination.

Le film, qui s'inspire des thrillers érotiques des années quatre-vingt-dix, renverse les mécanismes à travers le sexe. Hiérarchiquement supérieure à son protégé, Romy devient soumise à lui pour assouvir ses propres désirs.

Nicole Kidman, impressionnante, ne recule devant rien. Son interprétation lui a même valu le prix de la meilleure actrice à la Mostra de Venise. La réalisatrice, Halina Reijn, signe ici son troisième film. Ancienne actrice, notamment pour Paul Verhoeven, elle en connaît un rayon sur les histoires sulfureuses.

"Je voulais parler de pouvoir, de sexe et de consentement à travers une comédie de mœurs, une fable, pour qu'il y ait aussi beaucoup d'humour, explique-t-elle à AlloCiné. Mon souhait était d'aborder tous ces thèmes contre lesquels nous luttons tous et avec lesquels nous nous amusons, d'une manière ou d'une autre."

Des micros dans les murs

Les scènes de sexe, nombreuses, ont été tournées dans un environnement complètement sécurisé et inaccessible. La cinéaste détaille le procédé à travers une séquence qui se déroule dans une chambre d'hôtel :

"Nous avons construit ce décor de chambre en studio, nous avons monté les quatre murs et nous avons caché des micros partout. Il n'y avait donc personne à l'intérieur, à part les deux acteurs et ma cheffe opératrice, qui tenait elle-même la caméra. C'était complètement fermé."

La réalisatrice Halina Reijn à Paris, le 22 novembre 2024. Thomas Desroches
La réalisatrice Halina Reijn à Paris, le 22 novembre 2024.

Halina Reijn sait mieux que quiconque que ces séquences peuvent être difficiles pour les acteurs. "Au moins, il n'y avait pas 500 hommes autour avec des vestes North Face qui mangent de la pizza pendant que vous êtes allongée sur le sol en train de simuler un orgasme", lance-t-elle.

Nicole Kidman et Harris Dickinson ont également travaillé avec des coordinateurs d'intimité qui ont pensé les scènes de sexe comme des scènes de combat.

Le conseil de Paul Verhoeven

La réalisatrice l'affirme : ce film n'aurait pas été possible il y a quelques années. "Je fais partie du mouvement Me Too en tant qu'actrice et sans ce mouvement, je ne pense pas que je serais assise en face de vous en ce moment. Je ne pense pas qu'une cinéaste aurait autant de liberté pour raconter cette histoire."

Halina Reijn s'est beaucoup inspirée des conseils que lui avait donnés Paul Verhoeven, roi des films sulfureux, lors du tournage de Black Book : "Chaque film commence avec une question que l'on se pose à soi-même."

"Je fais du cinéma essentiellement pour aborder des choses plus sombres, des sujets qui nous font peur, des tabous. Surtout à une période où j'ai le sentiment que nous sommes en train de revenir en arrière. Mais je pense que la seule raison de raconter des histoires est de provoquer une conversation."

Propos recueillis par Thomas Desroches, à Paris, le 22 novembre 2024.

Babygirl est à découvrir au cinéma

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