Ça parle de quoi ?
Après une terrible tragédie, la famille Deetz revient à Winter River. Toujours hantée par le souvenir de Beetlejuice, Lydia voit sa vie bouleversée lorsque sa fille Astrid, adolescente rebelle, ouvre accidentellement un portail vers l’Au-delà.
Alors que le chaos plane sur les deux mondes, ce n’est qu’une question de temps avant que quelqu’un ne prononce le nom de Beetlejuice trois fois et que ce démon farceur ne revienne semer la pagaille…
Say his name
Le Tim Burton il a changé ! Pour beaucoup, y compris parmi ses plus grands fans, il y a eu un avant et un après Alice au pays des merveilles dans la carrière du réalisateur. Qui, s'il a connu son plus gros succès avec cette adaptation de Lewis Carroll, n'a jamais retrouvé ses sommets créatifs ensuite (exception faite de Frankenweenie).
Malgré quelques soubresauts (le très modeste Big Eyes et son discours sur une artiste dépossédée de son œuvre ; le côté best-of de son cinéma que contenait Miss Peregrine ; la tendresse et les tacles à peine déguisés à Disney dans Dumbo) et le succès monstre de la série Mercredi à laquelle il a participé en réalisant quatre épisodes de la saison 1, ce n'était pas assez pour que le public soit pleinement rassuré lorsque Beetlejuice 2 a été annoncé.
Peut-être aussi parce que cette suite a mis longtemps à voir le jour. Un projet intitulé Beetlejuice Goes Hawaiian a même été envisagé, après le succès du premier opus, mais Tim Burton a préféré aller voir du côté de Gotham City s'il n'y était pas.
L'idée d'un retour de Michael Keaton dans le costume rayé refait pourtant surface en 2011 et flotte dans l'air pendant près d'une décennie, avant de tomber à l'eau en 2019… et de se concrétiser en 2023.
Interprète de Lydia Deetz, dont elle reprend le rôle, Winona Ryder dit avoir travaillé le cinéaste au corps pour qu'il accepte de remettre le couvert. Dans une suite qui se déroule près de quarante ans après l'original, et inclut dans son récit le temps qui a passé entre chacun des deux films.
Marqués par un deuil, les personnages principaux sont contraints de revenir à Winter River. Et les événements vont de nouveau confronter la famille à Beetlejuice, qui n'a finalement cessé de hanter Lydia comme, on l'imagine, Tim Burton, via les rumeurs et demandes de suite qui l'ont accompagné pendant toutes ces années.
Salsa du démon
Au Festival de Venise, le papa de Sleepy Hollow a d'ailleurs révélé avoir songé à quitter Hollywood après l'échec de Dumbo (353 millions de dollars de recettes dans le monde) mais que Beetlejuice Beetlejuice lui a offert un regain d'énergie.
Un aveu qui fait d'autant plus résonner les passages où Lydia reconnaît être fatiguée et s'être perdue en utilisant ses talents à mauvais escient comme une confession.
Et explique d'autant plus pourquoi, comme l'héroïne lorsqu'elle renoue avec Beetlejuice, il semble s'amuser avec cette suite. En plus de revenir vers l'esprit de ses débuts, lorsqu'il faisait figure d'indépendant iconoclaste venu infiltrer les studios américains pour y mettre le bazar comme un gremlin.
Ce n'est plus vraiment le cas aujourd'hui, alors qu'il s'apprête à fêter ses 40 ans de carrière au cinéma, avec un style qui est désormais une signature que beaucoup ont voulu copier. Et il y a trop de personnages et de sous-intrigues pour le bien du récit, qui se conclut paradoxalement trop vite.
Mais il serait malvenu de reprocher sa générosité et son envie à un cinéaste qui paraissait en manquer dernièrement, surtout que Beetlejuice Beetlejuice renoue avec l'humour cartoon et l'ambiance horrifico-poético-gothique du premier épisode.
Notamment dans cet extrait en forme d'orgin story de Beetlejuice, avec des vrais morceaux d'accent italien dedans :
Cela passe notamment par des décors toujours aussi dingues, angoissants et beaucoup plus nombreux (signe d'un budget plus important que dans les années 80), qui lui permettent d'explorer davantage le monde des morts. Des costumes somptueux, des maquillages impeccables, une séquence animée image par image, et des effets spéciaux… à l'ancienne.
Si pas loin de quatre décennies séparent les deux films, cela ne se ressent pas vraiment à l'écran sur le plan visuel car, hormis une citation de Netflix, les marqueurs temporels sont rares. Et Tim Burton évite au maximum les effets numériques, au profit des maquettes, prothèses, jeux de perspectives et autres créatures en stop-motion.
Sans oublier une séquence musicale somptueuse, qui fait évidemment écho à celle sur fond de "Day O" dans le premier opus et s'avère aussi décalée, avant de devenir plus poétique et émouvante. Et qui réunit une bonne partie du casting.
Car Tim Burton ne s'amuse pas seul dans ce gentil de jeu de massacre qui égratigne de nouveau le monde de l'art, met des petits taquets à Disney et aux influenceurs.
Winona Ryder - Jenna Ortega, cœur battant du film
Anciens (Michael Keaton et Catherine O'Hara en tête) comme nouveaux (dont Willem Dafoe et Monica Bellucci) s'en donnent à cœur joie et participent à cette réunion de deux générations d'acteurs burtoniens, symbolisée par le duo mère-fille entre Winona Ryder et Jenna Ortega, qui incarnent le cœur battant du récit. Et dont la filiation était déjà évidente lorsque la seconde a été engagée pour jouer Mercredi.
La jeune comédienne est, sans surprise, comme un poisson dans l'eau (à tel point que l'on pense parfois trop à sa série dans la sous-intrigue d'Astrid, son personnage). Mais elle incarne ce regain d'énergie dont parle Tim Burton, entamé avec le show de Netflix et poursuivi avec ce Beetlejuice Beetlejuice.
Qui est assez plaisant pour que l'on souhaite retrouver la petite bande dans un troisième volet qui s'intitulerait Beetlejuice Beetlejuice Beetlejuice. Histoire de boucler la boucle, même si l'on sait très bien le chaos qui se déclenche lorsque l'on prononce trois fois le nom du démon. Mais c'est justement l'idée.