De quoi ça parle ?
Pablo et sa sœur Apolline s’évadent de leur quotidien en jouant à Darknoon, un jeu vidéo qui les a vus grandir. Un jour, Pablo rencontre Night, qu’il initie à ses petits trafics, et s’éloigne d'Apolline. Alors que la fin du jeu s’annonce, les deux garçons provoquent la colère d’une bande rivale...
Présenté à la Quinzaine des cinéastes et en Compétition française au Champs-Elysées Film Festival, Eat The Night est une petite pépite à découvrir. Ce second long métrage du tandem Jonathan Vinel et Caroline Poggi (Jessica Forever) est un étonnant cocktail, mêlant monde virtuel et tragédie, tendant vers le thriller.
Tout l'intérêt du film repose sur son hybridation : oser mêler drame français et l'univers du jeu vidéo. Si d'aucuns y voient une forme de Ready Player One à la mode film d'auteur français, la réelle influence de Eat The Night n'est pas le film de Spielberg, mais une série américaine plébiscitée par tous, The Wire !
Un film influencé par la série The Wire
Les réalisateurs ont notamment puisé dans la noirceur de la série culte HBO, mais aussi dans sa façon de raconter l'intrigue : "The Wire nous a (...) décomplexés quant à l’idée d’avoir non pas un personnage principal mais plusieurs, centraux, d’organiser le récit autour", indiquent-ils dans le dossier de presse.
L'intrigue de Eat The Night se focalise sur trois personnages, Pablo (Théo Cholbi) et sa petite sœur Apolline (Lila Gueneau), ainsi que Night (Erwan Kepoa Falé), qui va se rapprocher de Pablo à travers des petits trafics. Le film a notamment pour ambition de parler des familles qu'on se crée, et comment on trouve refuge.
L'un de ces refuges est le monde virtuel inventé de toute pièce pour Eat The Night : le jeu Darknoon. "C’est là que je vis et je m’y sens mieux que dans ma propre vie", dit un des personnages dans le film.
"C’est un jeu, dont le film ne dit jamais l’histoire. On les voit jouer mais on ne sait pas pour quels enjeux. Ce qui nous intéresse, ce sont les gens qui le chargent. Ce qu’ils se disent entre eux, les sentiments qui naissent, se tissent à travers lui. Je suis un gamer, mais j’aime beaucoup zoner dans les jeux, aller là où il y a peu d’action.
Le jeu m’a appris à voir autrement le cinéma de l’errance, de la contemplation
Le jeu m’a appris à voir autrement le cinéma de l’errance, de la contemplation. Gus van Sant, Béla Tarr ou Apichatpong Weerasethakul furent des chocs esthétiques quand j’ai commencé à m’intéresser au cinéma", indique Jonathan Vinel.
Et d'ajouter : "Eat the Night tente donc de creuser des galeries possibles entre le jeu et la vie. La différence, elle est dans la mort. Le jeu, on perd, on recommence. Dans le réel, la violence peut tuer".
Après le très remarqué Knit’s Island, L’Île sans fin, documentaire français qui explorait un monde virtuel, Eat The Night poursuit cette immersion à travers la fiction et un mélange des genres passionnant.
Précisons que ce second long métrage est moins expérimental que le précédent du tandem, Jessica Forever. "Ce film vient d’un fort désir de cinéma, celui de se confronter à un récit beaucoup plus narratif que ne l’était Jessica Forever, tout en gardant notre volonté d’hybridation."
Si vous souhaitez justement découvrir les précédents films du duo, courts et longs, ils sont disponibles sur la plateforme MUBI qui propose une rétrospective de leur travail à l'occasion de la sortie de Eat The Night au cinéma.
Programme du focus MUBI sur Caroline Poggi et Jonathan Vinel :
- Jessica Forever
- Tant qu'il nous reste des fusils à pompe
- Bébé colère
- Il faut regarder le feu ou brûler dedans
Eat The Night est actuellement en salles.