Ça parle de quoi ?
Chargée de redorer l'image de la NASA auprès du public, l'étincelante Kelly Jones, experte en marketing, va perturber la tâche déjà complexe du directeur de la mission, Cole Davis. Lorsque la Maison-Blanche estime que le projet est trop important pour échouer, Kelly Jones se voit confier la réalisation d'un faux alunissage, en guise de plan B et le compte à rebours est alors vraiment lancé...
Lune ou l'autre
Réalisateur de To the Moon ou Love, Simon, Greg Berlanti a aussi supervisé les séries DC de la CW. Et notamment The Flash et ses réalités alternatives, dont on retrouve des traces dans cette comédie romantique située à la fin des années 60.
Pas parce qu'elle contient des éléments fantastiques ou de science-fiction, mais parce qu'elle revient sur une question que certains se posent encore : et si l'Homme n'avait jamais marché sur la Lune ? Et si les images que nous connaissons par cœur avaient été tournées en studio, par Stanley Kubrick ?
Sans aller jusqu'à faire apparaître le réalisateur de 2001, qui n'est que mentionné, c'est l'un des sujets de To the Moon. Qui se focalise d'abord sur la manière dont la NASA fait appel à l'experte en marketing Kelly Jones (Scarlett Johansson) pour redorer son image. Et, par extension, aider à médiatiser le premier vol humain vers la Lune.
"À l’époque, le pays croyait que tout était possible", raconte Greg Berlanti dans le dossier de presse. "Deux catégories de personnes étaient nécessaires pour faire aboutir le projet d’alunissage : des gens courageux et âpres à la tâche qui s’investissaient corps et âme dans l’ingénierie du projet, et des hommes de communication et de marketing comme Kennedy qui étaient capables de vendre le projet au grand public, avant même de savoir si celui-ci était réalisable ou pas."
Toute ressemblance avec le milieu du cinéma, où l'on annonce parfois une date de sortie avant d'embaucher un scénariste, n'est sans doute pas fortuite. Mais To the Moon ne s'attarde pas trop sur l'aspect méta de son scénario, surtout que le 7ème Art occupe une place importante de la seconde moitié de son récit : lorsque le FBI commande la réalisation d'un faux alunissage, en guise de plan B… et décide de diffuser cette version en direct, en gardant le son de Neil Armstrong dans l'espace.
En choisissant cet angle, To the Moon s'éloigne ainsi du faux documentaire (ou mockumentaire) Opération Lune sorti en 2002, qui évoquait très sérieusement, interviews à l'appui, la théorie du complot impliquant Stanley Kubrick à laquelle 6% de la population américaine croyait alors… avant d'expliquer qu'il ne s'agissait d'une vaste blague.
Deux décennies plus tard, alors que les fake news sont légion dans l'ère de la post-vérité (aux États-Unis comme en France, surtout en période électorale), revenir sur ce sujet aurait pu être risqué. Même sous la forme d'une comédie à l'ancienne, où les échanges animés entre Scarlett Johansson et Channing Tatum évoquent ceux de Katharine Hepburn et Spencer Tracy.
Mais c'est justement pour rappeler, de façon légère, quelques évidences sur notre époque : "Pour moi le film parle de la vérité. De la raison pour laquelle elle est importante, aujourd'hui plus que jamais", nous dit Greg Berlanti en interview. "Nous avons donc dû nous pencher sur l'une des premières théories du complot, pour nous plonger dedans et pas nous en détourner."
"Même si nous nous amusons et que l'ensemble est divertissant, le thème central colle avec l'arc narratif du personnage principal, qui planche sur une escroquerie avant de prendre conscience de l'importance de la vérité. J'espère que c'est ce qu'on en retiendra."
Le film parle de la vérité. De la raison pour laquelle elle est importante, aujourd'hui plus que jamais
"J'imagine que des gens vont y aller avec des idées préconçues, en se demandant si nous donnons trop d'eau au moulin des théoriciens du complot ou si, au contraire, nous accordons trop d'importance à ce que la NASA a fait. Et j'espère qu'il y aura chez eux ce sentiment d'accomplissement, quand ils verront ce que l'on peut faire lorsque nous sommes unis au lieu de nous battre les uns contre les autres."
Si c'est fait avec autant d'élégance que la chanson "Fly Me to the Moon" de Count Basie et Frank Sinatra, qui donne au film une partie de son titre, c'est encore mieux.
Propos recueillis par Emmanuel Itier à Los Angeles le 3 juin 2024