Décidément, ces Coppola sont (génialement) fous. Alors que son oncle Francis Ford Coppola présentait son Megalopolis jeudi soir à Cannes, avec des expérimentations formelles et narratives qui n'ont laissé personne indifférent, son neveu Nicolas Cage (né Nicolas Coppola) a offert une Séance de Minuit mémorable aux festivaliers ce vendredi soir.
Visiblement très heureux de revenir enfin sur la Croisette, vingt-quatre ans après "un petit film intitulé Sailor et Lula de David Lynch", Nicolas Cage est The Surfer. Devant la caméra de Lorcan Finnegan (révélé par Vivarium), il campe, selon le synopsis officiel du long métrage, un père qui "revient sur l’idyllique plage de son enfance pour faire du surf avec son fils : leur escapade tourne au cauchemar lorsqu’un gang de surfeurs du coin leur interdit l’accès à l’océan ; humilié et menacé, le père de famille va devoir se battre pour reconquérir son territoire et l’estime de son fils".
L'enfer du parking de la plage
Sur le papier, The Surfer semble nous entraîner dans le revenge movie, approche finalement très adaptée à la Séance de Minuit sur la Croisette, traditionnellement réservée aux films de genre (L'Armée des morts, Dernier train pour Busan, Maniac, Blood Father...). Vengeance + Nicolas Cage : un cocktail idéal pour cette projection nocturne en somme. C'est pourtant un tout autre spectacle qui a été proposé aux spectatrices et spectateurs du Grand Théâtre Lumière.
De vengeance, il n'y en a pas dans The Surfer. Ou peu. Il y a en revanche un trip dément pour le personnage principal. Une véritable descente aux enfers sous l'implacable soleil australien alors qu'il refuse de quitter le parking de la plage et s'obstine à errer sur le bitume pour récupérer sa planche dérobée par les surfeurs ou attendre un hypothétique coup de fil garantissant un prêt immobilier.
Chute Libre + Point Break = The Surfer
Le résultat ? Un véritable cauchemar éveillé, halluciné et hallucinant, dans lequel Nicolas Cage pousse les "potards à fond", rappelant son interprétation culte de The Wicker Man. Avec un énorme potentiel de memes internet à la clé ! Pour illustrer la folie de son anti-héros, Lorcan Finnegan se livre à de nombreuses expérimentations formelles, que ce soit sur la colorimétrie, le montage, les effets de caméra ou le travail sur les images qui semblent se gondoler sous l'effet de la folie et de la chaleur.
Le cinéaste irlandais parvient d'ailleurs, et c'est l'un des points forts du long métrage, à rendre palpable la température ambiante. Nicolas Cage a chaud. Très chaud. Il peine à se mouvoir, il a soif, il transpire. Et nous avec lui. Le film est suffocant et poisseux, comme pouvaient l'être Que Dios Nos Perdone (2017) ou Chute libre (1993). Cette dernière référence est d'ailleurs centrale, puisque The Surfer se situe au croisement (improbable) du film avec Michael Douglas, de Point Break et de la Nouvelle Vague australienne des années 70, convoquant notamment le Wake in Fright de Ted Kotcheff.
Il y a aussi un peu de Fight Club dans The Surfer. Du moins de Tyler Durden. Le groupe de surfeurs des "Bay Boys", situé quelque part entre le gang masculiniste et la secte aux ordres de son charismatique gourou des vagues Julian McMahon (ex Charmed / Nip/Tuck / F.B.I.), rappelle ainsi le culte malsain que David Fincher avait illustré autour de la figure du personnage nihiliste campé par Brad Pitt en 1999.
Face à lui, et face à ce boy-club toxique qui ne cesse de le harceler, Nicolas Cage sombre un peu plus à chaque minute, mentalement et physiquement, jusqu'à devenir le clochard (ou "bum" en patois local) du parking de la plage, réduit à dormir dans une épave de voiture, à fouiller les poubelles, à boire à même le sol dans une flaque de bière... ou à manger un rat.
"Bouffe le rat !!!"
Sans en révéler trop, la séquence du rat restera assurément un grand moment de ce 77e Festival de Cannes. Pas tant pour le dégoût qu'elle peut provoquer que pour l'exclamation lancée par Nic Cage alors qu'il fourre le rongeur dans la gorge de l'un des surfeurs dans un pétage de plomb dont il a le secret. "Bouffe le rat !!!" La salle a littéralement explosé en cris et applaudissements face à ces images, galvanisée assurément par le fait de savoir que l'acteur profitait lui aussi de son interprétation hallucinée et participait au spectacle depuis son fauteuil.
Après six belles minutes de standing-ovation, la star, très touché par l"accueil, a d'ailleurs pris le micro sous les vivats des festivaliers pour hurler un inoubliable "Mangez le rat !!! Mangez le rat !!!" (traduction un peu approximative mais jouissive du "Eat the rat !!!" du film, proposée par Thierry Frémaux et son équipe alors que Nicolas Cage leur demandait comment déclamer la réplique en français). La séquence est à voir ci-dessous :
Au-delà de cet échange WTF entre Nic Cage et le public cannois, les festivaliers ont-ils adhéré à la proposition de The Surfer. Pas tout à fait, si l'on en croit les avis contrastés partagés sur X/Twitter. Restera en tout cas une Séance de Minuit culte.
"Folie douce qui touche plus à la comédie barbare qu’à l’horreur, #TheSurfer de Lorcan Finnegan plonge un Nicolas Cage en grande forme dans un cauchemar hallucinant et poisseux face à un gang toxique de surfeurs mascu à qu’il va faire manger du sable et du rat."
"#thesurfer de Lorcan Finnegan est fou. Chaque fois que vous pensez que ça ne deviendra pas plus fou, c’est le cas. Le film est à la hauteur de Nicholas Cage et va donner naissance à des mèmes sans fin. Le public a adoré et avec raison. Une autre victoire de Lorcan Finnegan".
"Nicolas Cage bolossé par des surfeurs mascu jusqu'à devoir boulotter un rat mort : ça aurait dû être un nouveau nanar pépite dans la généreuse collection de l'acteur, pourtant #TheSurfer peine à surnager par delà son idée de base : un huis clos à ciel ouvert. Pétard mouillé."
"Petit cauchemar jamais angoissant, à peine amusant et totalement inoffensif #TheSurfer, minuscule trip halluciné où Nicolas Cage perd la boule sous le soleil aride australien face à des mascus dégénérés."
"Ce que j’ai retenu de ma séance de #TheSurfer , c’est la standing ovation qui était géniale. Je n’ai pas beaucoup aimé le film en lui-même malgré la présence de Nicolas Cage et des visuels très beaux. Ça tourne en rond et c’est plutôt lourd. Assez décevant."
"Malgré de jolies promesses de série B régressive, #TheSurfer tourne rapidement à vide, incapable de se mesurer à l'énergie contagieuse de Nicolas Cage. Vivarium reste encore la seule fulgurance de Lorcan Finnegan !"
"#TheSurfer (2024) rend hommage au cinéma d'exploitation, dans la police de ses crédits comme ses effets de mise en scène outranciers, le postulat de départ est assez bête pour offrir un divertissement régressif mais se perd dans son récit malgré le cabotinage de Nicolas Cage".
"Après "Twilight of Warriors", #Cannes2024 sauvé par ses séances de minuit : "The Surfer" est une jouissive série B, une version sous LSD du remake de "The Wicker Man" avec un Nicolas Cage en roue libre et une réplique déjà culte : "bouffe le rat !!!"
"THE SURFER a été le plus amusant que j’ai eu à #Cannes jusqu’à présent. Un hommage psychédélique ensoleillé à la Nouvelle Vague australienne qui oscille entre comédie noire, thriller psychologique et pitreries brevetées de fous de Nicolas Cage. Pendant la standing ovation, la foule a scandé 'Les films sont de retour !'"