Jeudi 16 mai 2024, dans la salle Debussy du Palais des Festivals. La projection presse de Megalopolis est en cours depuis plus d’une heure, devant des spectateurs enthousiastes, surpris, médusés ou circonspects (rayer la mention inutile) devant le spectacle inédit proposé par Francis Ford Coppola.
PODCAST - On débriefe "Megalopolis"
Croisement futuriste entre la tragédie antique (trahisons, jeux de pouvoir, complots, manipulation des masses, tirades philosophiques…) et le postapocalyptique dans un New York utopique rebaptisé New Rome, Megalopolis est un spectacle unique qui brasse pouvoir, argent, création et amour, qui sera encensé ou détesté, mais qui ne laissera pas indifférent (voire notre décryptage du film).
A ce titre, l’une des expérimentations formelles et narratives de Coppola pour ce projet de trente ans a profondément surpris les festivaliers présents. Avec un moment suspendu comme on n’en a jamais vécu à Cannes...
Une question pour Adam Driver
Durant un court écran noir, qui survient brusquement à l’issue d’une scène, les lumières de la salle se rallument légèrement et un homme traverse silencieusement la scène, et se poste devant l’écran, un pied de micro à la main. Problème technique ? Intervention de la sécurité ? Mouvement de grève ? Il n’en est rien.
L’écran noir s’achève, et lui succède une séquence de conférence de presse, durant laquelle César Catilina (Adam Driver) prend la parole pour expliquer l’ambition de son ambitieux projet architectural (dans le film donc). La séquence est tournée face caméra, avec le regard du comédien tourné droit vers le public. La personne sur scène prend alors la parole, tel un journaliste "de la vraie vie" interrogeant le personnage du film, et pose directement une question à César - qui lui répond - puis reprend son pied de micro et quitte la scène comme il était venu.
Entre cinéma et théâtre
Si Deadpool était le champion pour "briser le quatrième mur" en s’adressant directement aux spectateurs, Coppola repousse ici les limites en croisant cinéma et théâtre dans un procédé aussi inédit que surprenant. Les exclamations de surprises et applaudissements nourris ont d’ailleurs salué cette audace formelle, qui prolonge l’expérience Megalopolis dans le monde réel.
On ignore toutefois si elle sera réitérée dans les futurs cinémas qui projetteront le long métrage. Est-ce une exclusivité cannoise qui, de fait, laisse entendre que le long métrage sera proposé dans une version différente pour sa sortie en salles ? Ou, au contraire, chaque séance demandera-t-elle à un exploitant, un projectionniste ou un comédien de tendre le micro à César Catalina ? Le mystère demeure mais l’expérience était, en tout cas, unique. Et mémorable.