De quoi ça parle ?
"Bienvenue dans ma vie", cette phrase, Sylvie Hofmann la répète à longueur de journée ou presque. Sylvie est cadre infirmière depuis 40 ans à l’hôpital nord de Marseille. Sa vie, c’est courir. Entre les patients, sa mère, son mari et sa fille, elle consacre ses journées aux autres depuis toujours. Et si elle décidait de penser un peu à elle ? De partir à la retraite ? En a-t-elle le droit, mais surtout en a-t-elle vraiment envie ?
C'est l'un des grands noms du documentaire en France : Sébastien Lifshitz. Césarisé avec Adolescentes, très remarqué avec Petite fille, et plus récemment dans la lumière avec Casa Susanna, diffusé sur Arte, sur un sujet méconnu autour d'un groupe d'un réseau clandestin de travestis aux Etats-Unis...
Le prolifique réalisateur est déjà de retour avec un nouveau film documentaire, Madame Hofmann, sur une cadre infirmière, qui a consacré sa vie à l'hôpital. Le film a fait quelques festivals, comme Angoulême, où nous avons rencontré ce cinéaste aussi discret que talentueux, qui nous dévoile les contours de ce nouveau film.
Un magnifique portrait, sensible et politique
"L'idée était de faire le portrait d'une femme, d'une femme en lutte. Le hasard a voulu que je rencontre Sylvie Hoffmann à Marseille. Elle devait me renseigner sur des numéros de téléphone d'infirmière que je cherchais à contacter pendant le casting du film. Et tout d'un coup, j'ai vu cette femme arriver, je l'ai trouvée incroyable. Quelqu'un qui a une très forte personnalité, qui est sans filtre, vraiment à la Marseillaise. Elle est restée dans un coin de ma tête pendant tout ce casting et je n'arrivais pas à l'oublier. Et tout d'un coup, un jour, je me suis dit: il faut que je la revois. Je suis allé la voir à l'hôpital. En la voyant travailler, il y a eu comme l'évidence que la femme que je cherchais, c'était elle."
Finalement, le film, c'est toi !
Sébastien Lifshitz poursuit, à notre micro : "Souvent, dans le documentaire, vous partez d'idées comme ça, ou vous avez un désir, mais qui n'est pas peut-être complètement défini. Ce sont finalement les rencontres qui font les films. Il y a quelqu'un comme ça qui surgit du réel et qui s'impose à vous. Et tout d'un coup, un film peut commencer. Le film se déplace, se complexifie, ramène le lieu de l'hôpital parce qu'elle est infirmière et j'ai trouvé tout ça passionnant. Et d'autant plus quand je suis allé dans son service et que j'ai rencontré aussi son équipe. C'était aussi filmer un lieu. C'était non seulement faire un portrait, mais c'était aussi filmer un métier et toute une équipe. Et donc, tout ça a été finalement déterminant pour que la production et moi, on se décide à se lancer.
Un état des lieux de l'hôpital
Le film est aussi une sorte d'état des lieux de l'hôpital, comme le souligne le réalisateur. "On est à un moment très particulier et où, évidemment, le COVID est présent. Le film suit aussi l'évolution de l'épidémie. Comment Sylvie essaye de se battre comme une dingue pour essayer de faire fonctionner tout simplement un service comme le sien ? On voit que c'est une lutte permanente, il n'y a jamais de répit. Elle en paie d'ailleurs le prix assez cher. Et cette cohésion, ce monde de femmes que je filme, j'ai trouvé ça fantastique."
Dans notre entretien à écouter en intégralité en podcast, le cinéaste évoque également avec nous Casa Susanna (actuellement disponible en DVD) et revient sur d'autres de ses réalisations dont Adolescentes et Petite fille. Il se confie également sur son retour annoncé à la fiction.
Madame Hofmann est actuellement en salles.
Propos recueillis au Festival du film francophone d'Angoulême 2023