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    La fièvre sur Canal+ : que vaut la nouvelle mini-série politique du créateur de Baron Noir ?
    Thomas Pouilly
    Thomas Pouilly
    -Rédacteur
    D’Ici Tout Commence à Squid Game, en passant par Chair tendre, Thomas Pouilly sait qu’il passera toujours une bonne soirée en matant une bonne série.

    Habituée des stades de football, c’est un match aux enjeux assez différents que nous invite à découvrir Canal+ à partir de ce lundi soir. On vous dit ce qu’on a pensé de "La Fièvre", avec Ana Girardot, Nina Meurisse et Benjamin Biolay.

    De quoi ça parle ?

    En cette fin de saison, tout le monde est, comme chaque année, sur son 31 pour la soirée qui récompense le meilleur du football français.

    Seulement, cette année, la cérémonie tourne au scandale : Fodé Thiam, l’un des footballeurs stars du championnat et titulaire en équipe de France, assène un coup de tête à son entraîneur devant les caméras, en le traitant de "sale toubab". "Toubab" signifie "blanc" en wolof.

    La Fièvre
    La Fièvre
    Sortie : 2024-03-18 | 52 min
    Série : La Fièvre
    Avec Nina Meurisse, Ana Girardot, Benjamin Biolay
    Presse
    3,9
    Spectateurs
    3,8
    Voir via MyCanal

    Aussitôt, les médias s’emparent de la polémique. Appelée au chevet du club, en pleine tempête médiatique, Sam Berger, communicante de talent mais dévorée par son hypersensibilité, doute du fait que, cette fois, un nouveau scandale plus "vendeur" suffira à balayer la crise.

    Et pour cause : face à elle, depuis la scène du théâtre où elle joue systématiquement à guichets fermés, Marie Kinsky instrumentalise, elle, la polémique en attisant les déchirures identitaires et sociales qui lézardent le pays.

    Les deux femmes, autrefois très proches, en sont toutes les deux convaincues : au-delà du destin d’un grand joueur de football va se jouer celui de la France toute entière, qui couve un sérieux état fiévreux.

    C’est avec qui ?

    Derrière Sam Berger et Marie Kinsky se trouvent deux actrices qui bénéficient déjà d’une certaine notoriété grâce au petit écran, à savoir Nina Meurisse (Mixte, Petite maman, Cœurs noirs) et Ana Girardot (Les revenants, La flamme, Babyphone).

    A leurs côtés, Alassane Diong (Tirailleurs) interprète le footballeur Fodé Thiam, Assa Sylla (Bande de filles, Skam France, Le visiteur du futur) sa femme, et Benjamin Biolay (Stella, The Eddy) le président du club.

    A noter, enfin : Xavier Robic (Tropiques criminels, La promesse, Lupin) joue, lui, Tristan, le patron de l’entreprise pour laquelle travaille Sam, et Gustave Kervern (Groland, En même temps, Panda) le psy de son employée.

    Ça vaut le coup d’œil ?

    "Je ne suis pas un oracle. Je ne prévois rien. J’essaie simplement de bien comprendre le réel, l’air du temps. Peut-être que demain, il existera quelque chose que j’avais évoqué, mais ce que je montre existe déjà d’une façon ou d’une autre", assurait Eric Benzekri, créateur et co-scénariste de la série, en conférence de presse en février dernier.

    En réponse au réalisateur Ziad Doueiri, qui estimait, lui, que "La Fièvre est tellement au courant de ce qui se passe qu’elle prévoit ce qui va se passer", "comme Baron Noir", la précédente série d’Eric Benzekri.

    Thibault Grabherr, Quad+Ten, Canal+.

    Alors, ce dernier fait-il à nouveau preuve, après Baron noir, d’une excellente clairvoyance sur notre époque, ou bien est-il simplement parvenu ici à imaginer et à écrire un récit effrayant de crédibilité ?

    Quoi qu’il en soit, comment, dans les derniers épisodes, ne pas faire un parallèle entre l’inquiétant projet défendu par Marie Kinsky et le bond en arrière récemment réalisé par les États-Unis en matière d’IVG ? Une situation elle-aussi inenvisageable il y a encore quelques années et aujourd’hui, pourtant, une réalité...

    A ce titre, La Fièvre agit avec finesse lorsqu’elle fait notamment le choix d’expliquer avec pédagogie les ressorts de la communication de crise ou les possibilités en matière de manipulation de l’opinion publique grâce aux réseaux sociaux.

    La "fenêtre d’Overton" est ainsi un concept que nous ne sommes pas près d’oublier pour mieux comprendre certaines prises de parole politiques à l’avenir.

    Outre la finesse d’écriture et la pédagogie dont la série fait preuve, Nina Meurisse et Ana Girardot incarnent aussi merveilleusement bien ce qui semble être les deux états d’esprit du moment : l’un anxieux, tantôt pessimiste tantôt optimiste pour le futur, parfois perdu, mais souvent combatif ; l’autre séducteur, cynique et opportuniste, même si cela implique de capitaliser sur la tentation réactionnaire du moment.

    Probablement aidée par cette envie récurrente du public de jouer à se faire peur, Ana Girardot crève l’écran dans la série.

    Rémy Grandroques, Quad+Ten, Canal+.

    Si Baron noir et La Fièvre ne sont, à priori, pas liées, si ce n’est par le fait d’être deux séries politiques écrites successivement par Eric Benzekri, toutes deux se complètent finalement assez bien.

    En effet, l’une comme l’autre dressent un portrait politique et critique de la société française d’aujourd’hui, en montrant que tout est politique et que le peuple français reste un "peuple politique".

    Alors que la première le démontre à travers les milieux strictement politique et institutionnel, la seconde, elle, l’aborde plutôt à travers l’idée de "bataille culturelle" qui se jouerait actuellement dans notre pays, et s’inscrit, pour cela, dans les mondes médiatique, intellectuel et sportif.

    Ne reste plus qu’à imaginer une troisième série autour de la société civile et des abstentionnistes (souvent décrits comme "le premier parti de France") pour achever le triptyque qui se dessine avec Baron noir et La fièvre.

    La Fièvre est une mini-série française à découvrir chaque lundi à partir du 18 mars à 21h sur Canal+. Deux épisodes inédits seront diffusés pour la soirée de lancement, puis un épisode inédit chaque lundi.

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