Véritable icône du petit écran grâce à son rôle emblématique de Victor Newman dans Les Feux de l'amour (la série est diffusée du lundi au vendredi dès 11h sur TF1), Eric Braeden accorde à AlloCiné une interview dans laquelle il se remémore avec sincérité et humour son parcours dans le feuilleton culte...
AlloCiné : Le soap opera "Les Feux de l'amour" a fêté ses cinquante ans en 2023. Qu'est-ce que cela représente pour vous en tant que star de la série depuis 1980 ?
Eric Braeden : Pour être honnête avec vous, je suis tout simplement reconnaissant de pouvoir jouer dans la série depuis tout ce temps. Et nous sommes encore numéro un ! Je suis également très reconnaissant de pouvoir aller faire mon travail tous les jours. Bon nombre d'acteurs que j'ai connus quand je faisais de la télévision dans les années 1960 et 1970 ne travaillent plus ou sont morts aujourd'hui !
Vous avez récemment combattu et vaincu le cancer. Cette maladie a-t-elle affecté votre travail dans le feuilleton ?
Par bonheur, cela n'a pas impacté mon travail. Peut-être quelques jours mais de manière générale, pas du tout.
Vous incarnez donc Victor depuis plus de quatre décennies. Comment le décririez-vous : comme un patriarche aimant qui ferait tout pour sa famille ou comme un homme manipulateur et vindicatif envers sa femme et ses enfants?
Tout ça ! J'aime l'interpréter quand il est gentil et méchant. Cela dépend vraiment de qui il a en face de lui.
Comment préférez-vous jouer Victor avec Nikki (Melody Thomas Scott), son grand amour : en tant que couple solide et marié ou en tant qu’ennemis mortels et divorcés ?
(rires) Non, non, non. Je les préfère amoureux, bien sûr ! Je trouve leur relation réaliste et j'aime jouer ce qui est réaliste.
Quelles intrigues avez-vous préféré interpréter au cours de toutes ces années ?
Je dois vous avouer quelque chose : je ne pense pas beaucoup aux Feux de l'amour une fois que j'ai terminé ma journée... Donc, je ne me rappelle pas de tout ce que j'ai joué mais j'en ai fait beaucoup ! Hélas, une fois que la scène est terminée, je n'y pense plus. C'est fou...
Cela dit, je compte parmi mes moments favoris quand Victor était avec sa mère Cora [Dorothy McGuire, ndlr]. Quand elle est arrivée dans sa vie et qu'il pensait que c'était une menteuse, puis quand il a découvert qu'elle était vraiment sa génitrice...
William J. Bell [le créateur des Feux de l’amour décédé en 2005, ndlr] avait écrit une scène où elle parlait d'un trou dans le pull de Victor. Ce dernier s’était alors souvenu du jour où elle l'avait laissé enfant à l'orphelinat… Ceci était un élément capital de son histoire, je ne sais pas pourquoi.
Enfin, mon autre scène préférée était entre Victor et son père Albert, incarné par George Kennedy, des années plus tard. C'est tout.
Victor est sans doute le seul personnage au monde à avoir subi des vasectomies mais demeurant capable d’avoir des enfants malgré tout… Ne trouvez-vous pas que "Les Feux de l’amour" va parfois trop loin ?
(rires) Victor a eu une vasectomie, et alors ?
Il en a eu trois...
Eh bien, pourquoi pas ?! (rires) Il y a eu des fuites, c'est tout...
Savez-vous combien de fois Victor s’est marié ?
Je ne m'en souviens pas. (rires)
Et combien de fois a-t-il été présumé mort ?
Non plus. Mais cela s'est produit quelques fois ! (rires)
Avez-vous déjà suggéré aux scénaristes d'écrire une intrigue qui vous aurait fait envie en tant que comédien ?
Je l'ai fait une fois et ce fut totalement déformé... Je ne l'ai plus jamais refait. Écrire est un travail difficile, je pense que c'est le métier le plus difficile dans notre milieu. Cela dit, je pense souvent que l'histoire d'Ashley [Eileen Davidson, ndlr] et Victor aurait pu être plus importante...
A part Nikki et Ashley, d’ailleurs, quelle autre femme aurait pu être "la bonne" pour Victor ?
Il y avait Sabrina qui était jouée par Raya Meddine entre 2008 et 2009. C'était une actrice formidable, très intelligente et charmante.
Qui est selon vous le pire ennemi de Victor : Jack (Peter Bergman), Adam (Mark Grossman) ou peut-être lui-même ?
Jack, évidemment !
Par le passé, vous avez presque quitté définitivement la série. Pourquoi ?
Ca n'a toujours été qu'une question de négociations de contrat. Rien de plus.
Vous doutiez-vous à l’époque que rejoindre Les Feux de l’amour allait changer votre vie ?
Je n'en avais aucune idée. Rien ne l'indiquait. Au début, je n'aimais pas du tout la série ! Il m'a fallu un an et demi ou deux, lorsque certaines intrigues ont été lancées... Comme quand William J. Bell a brillamment eu l'idée de raconter que Victor avait grandi dans une orphelinat.
Mon intérêt est né car j'ai pu trouver ici un potentiel émotionnel. C'était un personnage intéressant. Ainsi, quand j'ai joué ces premières scènes, avec la mère de Victor puis plus tard quand il racontait son passé à Nikki, j'ai su que j'allais rester. Avant cela, je n'aimais pas le feuilleton.
Avez-vous un regret au sujet de votre parcours ?
C'est une question intéressante mais je ne suis pas quelqu'un qui a des regrets. Le passé est le passé et je vais de l'avant. Je suis un optimiste. La seule chose que je pourrais regretter est le fait que William J. Bell soit décédé trop tôt…