Sorti en 1963, La Grande évasion a marqué l'Histoire du cinéma et révélé au monde entier un jeune comédien de 33 ans, Steve McQueen. Ce dernier vole la vedette à Charles Bronson, Donald Pleasence ou James Coburn et contribue à faire de ce film un grand classique.
Cette incroyable évasion, qui paraît totalement surréaliste et hollywoodienne, est pourtant tirée d'une histoire vraie ! Le récit du film se déroule en 1943, durant la Seconde Guerre mondiale. Des aviateurs britanniques, canadiens, australiens, polonais et américains se retrouvent dans un camp de prisonniers de la Luftwaffe, le Stalag Luft III.
Les militaires profitent de leurs conditions de vie relativement confortables pour organiser une fuite collective prévue pour 250 personnes à travers 3 tunnels. 76 d'entre eux réussissent à s'enfuir avant que l'alerte ne soit donnée. Mais la plupart des évadés sont repris et exécutés par les Allemands.
La réalité dépasse la fiction
Le camp Stalag Luft III se situait à Sagan en Pologne, dans la province de Basse-Silésie, à environ 150km au Sud Est de Berlin. Dans la nuit du 24 au 25 mars 1944, 76 soldats britanniques et canadiens sont parvenus à se faire la belle, au nez et à la barbe des nazis. Pourtant, cet endroit était réputé inviolable.
Il était censé être le mieux gardé en raison de la présence de nombreux soldats ayant déjà tenté de s'évader de d'autres camps. Ces militaires d'élite sont prêts à tout pour rendre la vie impossible aux allemands. Ils n'étaient pas du genre à attendre sagement que la guerre se termine enfermés dans un camp.
Le chef d'escadron Roger Bushell, pilote de chasse de la Royal Air Force, prend la tête de ce plan d'évasion de masse nommé Comité X. Avec ses collègues triés sur le volet, ils vont élaborer un système ultra-sophistiqué de tunnels dans le but de prendre la tangente. Ce camp ultra sécurisé a été érigé sous les ordres directs d'Hermann Göring.
Pour le commandant en chef de la Luftwaffe, c'est un "camp dont on ne s'échappe pas". Pour y veiller, il a nommé un de ses proches à la tête du Stalag, l'implacable colonel Friedrich Lindeiner, un vétéran de la Première Guerre mondiale.
Les soldats sont bien conscients que, même s'ils réussisent à quitter le camp, ils auront beaucoup de mal à atteindre un pays qui ne soit pas sous le joug des allemands. C'est pourquoi leur but premier est de mobiliser le plus d'ennemis possibles à leur poursuite pour qu'ils ne puissent pas commettre de crimes de guerre ailleurs. Dans le long-métrage, c'est le personnage de Roger Bartlett (Richard Attenborough) qui est directement inspiré de Bushell.
Les tunnels Harry Dick & Tom
Les soldats décident de nommer les 3 tunnels "Tom", "Dick" et "Harry". Le capitaine d’aviation Wally Floody ayant déjà travaillé dans l’industrie des mines à Kirkland Lake en Ontario, il peut s'occuper de dessiner les plans des futurs tunnels. Ce dernier est malheureusement transféré dans un autre camp avant l'évasion. Il survivra et sera fait officier de l’Ordre de l’Empire britannique pour "son courage et son dévouement au devoir".
Par la suite, des dizaines d'hommes se sont attelés à constuire les 3 tunnels en toute discrétion, sans attirer l'attention des gardiens. La tâche n'était pas de tout repos car il fallait trouver les matériaux afin de réaliser un système de ventilation à l'intérieur des tunnels, en plus d'y amener l'électricité et un chemin de fer.
D'autres prisonniers étaient chargés d'évacuer la terre grâce à des petits sacs qu'ils dissimulaient dans leurs pantalons. Ils répandaient ainsi les gravats dans la cour de promenade. En tout, 600 hommes ont participé à cette gigantesque entreprise d'évasion.
Pour fabriquer les outils et matériaux nécessaires à cet ouvrage gargantuesque, les prisonniers ont utilisé tout ce qu'ils pouvaient autour d'eux : panneaux de lit, lattes de sommier, matelas, chaises, tables, couteaux, cuillères, pelles, fourchettes, bidons de lait ou fils électriques. MacGyver lui-même n'aurait pas mieux fait.
Ils sont même parvenus à corrompre quelques gardes allemands pour obtenir du matériel. Ils échangeaient avec eux des vivres reçus dans des colis humanitaires de la Croix Rouge. Très inventifs, ils réussissent aussi à se fabriquer des vêtements civils pour se noyer dans la masse après l'évasion, ainsi que des faux papiers.
La construction du tunnel Dick a finalement dû être abandonnée, la galerie s'avérant trop dangereuse et instable. Le second, nommé Tom, a été découvert par les gardiens en septembre 1943. Les soldats Alliés décident alors de se concentrer sur le tunnel Harry, celui qui les mènera tout droit à la liberté. Ils ont de la chance ce soir de mars 1944 ! Une attaque aérienne dans le secteur oblige les dirigeants du camp à instaurer un black out total. Ainsi, les sentinelles ne pourront pas déclencher de projecteurs.
Plus de 200 prisonniers se tiennent prêts à déguerpir du Stalag III grâce à Harry. Normalement, le tunnel devait déboucher dans la forêt, hors de la vue des sentinelles. Les courageux aviateurs se rendent malheureusement compte que leur ouvrage est trop court de 10 mètres. Long de 110 mètres, le tunnel ne leur permet pas d'être à l'abri des regards. Les soldats doivent donc attendre que la sentinelle ait le dos tourné pour sortir et courir se cacher dans les bois.
LA PLUS GRANDE EVASION DE MASSE DE L'HISTOIRE
Très tôt le matin, un gardien se rend compte de l'évasion et donne l'alerte. 76 prisonniers ont pu se faire la belle. Très vite, une horde de gardes se lancent à leur poursuite. Ils reprennent 73 personnes, qui sont pour la plupart rapatriés au camp. Afin d'empêcher toutes nouvelles velléités de fuite, la Gestapo, sous le commandement d'Adolf Hitler, ordonne l'exécution de 50 soldats Alliés d'une balle dans la nuque (en violation totale des Conventions de Genève). Seulement 3 soldats sont parvenus à rejoindre l'Angleterre : le sergent Peter Bergsland, le sous-lieutenant Jens Müller et le capitaine d'aviation Bram "Bob" Van der Stok.
Après les exécutions des 50 prisonniers, un 4ème tunnel a été creusé, appelé George. Ce dernier n'a jamais servi car il a été mis en oeuvre pour stocker du matériel et des armes, en dernier espoir. Le camp a finalement été évacué avant l'arrivée de l'armée soviétique. Après la guerre, 18 gardiens du Stalag III ont été arrêtés et jugés par un tribunal militaire.
13 seront exécutés et 5 autres condamnés à la prison à vie. Plusieurs autres responsables du massacre des 50 soldats seront traqués et liquidés. D'anciens SS parviendront à passer entre les mailles du filet, en s'exilant sûrement en Amérique du Sud. L'évasion du camp Stalag III de Sagan reste à ce jour considérée comme la plus spectaculaire de l'Histoire.