L’amour d’un père pour sa fille peut-il être suffisant ? Comment grandir, apprendre et s’épanouir avec un papa déficient ? C’est à ces questions que tente de répondre le film Les Enchantés.
Librement adapté du roman Les Demeurées de Jeanne Benameur, Les Enchantés suit l’histoire de Thierry (Grégory Montel), un homme atteint d’une déficience mentale depuis la naissance et qui élève seul sa fille Luce (Daphné Richard) âgée de six ans.
S’ils sont complices et soudés, ce père et sa fille sont surtout liés par un amour indéfectible. Mais la petite bulle dans laquelle ils vivent est sur le point d’éclater lorsque Luce fait son entrée au CP et qu’elle prend conscience du handicap de son père.
Comment grandir lorsqu’on est tiraillé entre sa soif d’apprendre et l’amour sans faille que l’on porte à son papa ? Craignant que le savoir ne l’éloigne à tout jamais de son père, Luce décide donc de ne plus apprendre. Cependant, les institutions ne vont pas mettre longtemps avant de s’en mêler.
C’est donc à travers les yeux de Luce que nous suivons cette histoire émouvante. Sans jamais sombrer ni dans le pathos ni sans la mièvrerie, Les Enchantés trouve son équilibre grâce à un scénario délicat tout en nuance ainsi qu’une réalisation impeccable.
Tandis que Gregory Montel livre une prestation époustouflante, la jeune Daphné Richard est quant à elle bluffante. Complices, les comédiens parviennent sans aucun mal à nous emporter dans cette histoire aussi magnifique que bouleversante.
Rencontré au mois de septembre dernier lors du Festival de la fiction de La Rochelle, Grégory Montel, l’interprète de Thierry, s’est confié au micro d’Allociné sur ce film qui ne devrait laisser personne indifférent.
Comment avez-vous abordé ce projet ?
Grégory Montel : J'avais très peur et j'ai vraiment réfléchi à faire ce film. Je ne m'en sentais pas vraiment capable au départ.
C'est le rôle de Thierry qui vous a fait peur ?
Oui. Et puis qui suis-je pour parler de quelqu'un que je ne suis pas ? Et en même temps, je suis un acteur donc c'est mon métier de me plonger dans la peau d'un autre. Je me suis vraiment tâté. Beaucoup d'acteurs avaient déjà refusé le rôle. Finalement, je me suis dit qu'il fallait y aller et ce n'était pas si compliqué que ça en définitive.
Qu'est-ce qui vous a séduit dans le scénario?
J'ai bien aimé l'histoire et que ce soit traité un peu comme un conte. J'ai tout de suite compris que Stanislas Carré de Malberg, le réalisateur et scénariste du film, voulait être dans un réalisme au niveau du jeu mais qu'on allait se permettre d'être dans quelque chose de l'ordre du conte où l’on s'éloigne un peu de la vérité.
Je suis un papa, j'ai beaucoup aimé la relation de ce père avec sa fille également. Il y a 38 ans d'écart entre Thierry et Luce mais ils ont finalement presque le même âge. Il a peut-être cette autorité naturelle de papa sur sa fille et en même temps il peut se mettre en colère comme un camarade de sa classe en lui disant : "tu es méchante". Ce rapport-là, d'égal à égal, m'a beaucoup intéressé.
Dans ce film, vous jouez donc Thierry, un homme atteint de déficience mentale. Comment se prépare-t-on pour un tel rôle ?
J'ai regardé beaucoup de films pour voir ce que je voulais faire et surtout ne pas faire. J'ai discuté avec des médecins et des éducateurs spécialisés. Je suis également allé dans un foyer pour discuter avec des personnes en situation de handicap essentiellement mental. Je me suis imprégné de tout ça pour l'adapter à ma manière.
Thierry est un individu à part entière. Il a ses propres façons d'agir. Il ne marche pas droit donc je me penchais un peu en avant pour sa démarche. Je parlais également doucement pour qu'il ait sa propre diction.
Quel message espérez-vous faire passer à travers ce film ?
Je ne sais pas si je ne me tire pas une balle dans le pied en disant ça mais je crois que, fondamentalement, ce film n'a pas d'autre message que celui de vivre l'amour à l'instant T.
Comment s’est passée la collaboration avec Daphné Centoni avec laquelle vous affichez une superbe alchimie à l’écran ?
On a essayé de se rencontrer bien en amont et de se voir beaucoup. Je passais mon temps à essayer de faire en sorte que la situation soit la plus naturelle possible sans trop l'infantiliser.
Ce qui n'empêchait pas d’ailleurs que Daphné avait parfois un peu peur de moi. C'est normal, il y a des situations comme ça dans le film. Et puis il arrivait que je la gonfle parce je suis un peu volubile sur un plateau. Elle avait besoin d'un peu de calme à certains moments (rires).
Mais on arrivait toujours à trouver nos instants et nos moments. On a quand même eu la chance de tourner ce film en sept semaines, ce qui n'est pas rien pour un téléfilm de 90 minutes.
On a eu le temps pour nous, pour aller chercher des moments un peu exceptionnels, des relations plus fortes entre Daphné et moi. On n'était pas dans l'urgence. Ça nous a permis de garder les jolis moments où on avait envie d'être tous les deux.
Avez-vous vu le film et qu'en avez-vous pensé ?
Je vous avoue que j'avais très peur. Je vois toutes les imperfections mais globalement, on m'a dit que ça marchait alors ça me rassure. J'ai envie que le film fonctionne et que le public rentre dans l'histoire.
Est-ce que vous avez d'autres projets dont vous pouvez nous parler ?
Je vais jouer Le Signal, la première série française de Paramount +. Je serai avec Clotilde Hesme et Sarah Pachoud. C'est une adaptation du roman de Maxime Chattam réalisée par Slimane-Baptiste Berhoun et Karim Ouaret.