Six femmes pour l'assassin, réalisé par Mario Bava en 1964, signe l'acte de naissance d'un genre qui deviendra culte : le giallo. Il s'agit d'un mouvement cinématographique principalement italien, se situant à la frontière du cinéma policier, du cinéma d'horreur et de l'érotisme. Il a connu son âge d'or entre les années 1960 et 1980.
59 ans après sa sortie en salles, Six femmes pour l'assassin revient au cinéma en version restaurée en 4K grâce à Tamasa Distribution, qui propose une rétrospective de 6 longs-métrages de Mario Bava : Les Vampires, Le Masque du démon, La Fille qui en savait trop, L'île de l'épouvante, Les Chiens enragés et Six femmes pour l'assassin.
Cette dernière œuvre nous présente une série de meurtres perpétrée sur des modèles dans une maison de haute couture à Rome. La comtesse Christina, propriétaire des lieux, semble être étrangement au courant du passé des victimes et son amant, le sinistre Morlacchi, paraît en savoir long sur le maniaque du crime.
"L'ACTE FONDATEUR DU GIALLO"
Selon Olivier Gonod de DVD Classik, le film "apparaît bien comme l’acte fondateur du giallo, avec sa multitude de crimes fétichistes perpétrés par un tueur masqué et ganté de cuir. Six femmes pour l’assassin est une merveille pour les yeux grâce au talent de coloriste du grand Mario Bava", indique-t-il.
Cette œuvre dérangeante et plastiquement étonnante, s'amusant avec la couleur rouge et un esthétisme subtil, a notamment inspiré des réalisateurs comme Martin Scorsese ou Pedro Almodóvar.
Pour Jean-François Rauger, de la Cinémathèque française, "Six femmes pour l'assassin, avec sa figure inoubliable d'assassin sans visage, se déconnecte radicalement de toute analogie avec le monde réel par un emploi démentiel des couleurs et une vision rejetant le naturalisme obligatoirement rattaché à tout récit policier qui se respecte.
La mise en scène, à la fois raffinée et barbare, de divers assassinats effleure une forme subtile d'étrangeté tout en maltraitant les nerfs du spectateur."
Si Mario Bava a signé l'acte de naissance du giallo, Dario Argento le popularisera 6 ans plus tard avec L'Oiseau au plumage de cristal. Cette œuvre emprunte beaucoup à Six femmes pour l'assassin, notamment ses séquences de meurtre.
Porté par Cameron Mitchell, Eva Bartok, Thomas Reiner ou Mary Arden, le film n'a pas connu un tournage de tout repos. Arden, qui incarne le rôle de Peggy Peyton, a expliqué avoir dû réécrire elle-même certains dialogues en anglais.
Tamasa
UN TOURNAGE CHAOTIQUE
"L'Italien qui l'a écrit [Marcello Fondato] n'avait pas une grande connaissance de la conversation américaine ou anglaise et le scénario était donc plein d'erreurs", a expliqué la comédienne, citée dans le livre de Tim Lucas, Mario Bava - All the Colors of the Dark.
Petit budget oblige, les comédiens ont également réalisé leurs cascades eux-mêmes, le tout supervisé par le coordinateur Goffredo Unger. L'actrice Mary Arden en a fait les frais, se blessant lors du tournage d'une séquence où un ressort de porte l'a frappée au visage, manquant de peu son œil. Un accident qui a déclenché la colère de la comédienne. Il a fallu un Mario Bava diplomate pour apaiser les tensions.
Par ailleurs, il fallait 4 heures au maquilleur Emilio Trani pour appliquer de fausses brûlures sur le visage de Mary Arden dans les scènes où elle incarne un cadavre. Ces dernières ont nécessité 5 jours de tournage.
Pour éviter d'avoir à ajouter et retirer le maquillage chaque jour, l'actrice le laissait appliqué sur son visage les derniers jours des prises de vues. Son apparence terrifiait sa mère, qui séjournait avec elle à Rome le temps du tournage.
Exploité dans de nombreux pays, Six femmes pour l'assassin a remporté un beau succès critique et commercial. Cependant, au-delà de ça, le film a marqué l'Histoire de son empreinte en signant l'acte fondateur du giallo italien.
