De la chanson au film
Tout le monde connaît la chanson Je t'aime moi non plus. L'une des plus célèbres du répertoire de Serge Gainsbourg, d'abord interprétée avec Brigitte Bardot en 1967, puis en 1969 avec Jane Birkin dans une version plus érotisée. Un titre si mythique que la formule est entrée dans le langage courant et est devenue une expression maintes fois utilisée pour définir des relations contradictoires et ambiguës entre deux êtres.
Mais connaissez-vous Je t'aime moi non plus, le film ? Il s'agit du premier long métrage écrit et réalisé par Serge Gainsbourg, sorti il y a presque 50 ans, en 1976 précisément. Frappé d'une interdiction aux moins de 16 ans, le film avait rassemblé à l'époque plus de 500 000 curieux*.
C'est la toute première ressortie du film, distribué par Splendor, ce qui en fait une vraie rareté à ne pas manquer si le film passe dans une salle près de chez vous !
De quoi ça parle ?
Deux garçons, Padovan et Krass, parcourent une route déserte à bord de leur camion lorsqu'ils tombent sur un snack-bar isolé, où Johnny, une jeune Anglaise à l'allure de garçon manqué, travaille comme serveuse. Le quotidien ennuyeux et triste de la jeune femme vole en éclats lorsque Krass pose les yeux sur elle pour la première fois ...
Une réputation sulfureuse, un parfum d'interdit
Pourquoi faut-il voir ou revoir ce film ? C'est peu dire que Je t'aime moi non plus a une réputation sulfureuse. Un long métrage dont on peut louer la poésie, l'audace, mais pour lequel on peut aussi exprimer une forme de rejet, pour sa forme notamment. Je t'aime moi non plus est un film plutôt âpre et rugueux, qu'on pourrait qualifier de western intimiste. Avec ses décors arides, son ambiance poisseuse, et ses évocations du genre western.
Interdit aux moins de 16 ans, le film est plutôt cru et quelques scènes sont à réserver à un public averti. Il contient un certain nombre de scènes de sexe, qui peuvent déranger. Le film aurait d'ailleurs échappé de peu au classement X en France. "Si les films sont sexuels, c'est parce que c'est dans la vie", expliquait Jane Birkin à l'époque du tournage, dans cette archive INA, qui permet de se faire une bonne idée de l'atmosphère du film et du tournage à Uzès.
"Les personnages sont touchants. Les spectateurs ne vont pas être choqués, mais ils vont être troublés. Tout le monde est un peu bisexuel", dit Jane Birkin, faisant référence au triangle amoureux qui se forme dans le film. Pour incarner ces personnages, Gainsbourg s'est entouré de Jane Birkin, sa compagne de l'époque, mais aussi de l'égérie warholienne Joe Dallesandro et Hugues Quester.
Serge Gainsbourg était un artiste touche à tout, et c'est avec cette approche qu'il s'est emparé du scénario et de la réalisation de Je t'aime moi non plus. "C'est la résultante de beaucoup de choses que j'ai effleurées comme la peinture, l'architecture, la musique de films, etc.", dit-il toujours dans cette archive INA. D'aucuns voient des parallèles entre de la peinture en mouvement et son cinéma. Les sensations prédominent, laissant peut être sur leur faim les spectateurs en attente d'un récit plus narratif. Soyez prévenus, ce film déstabilise, désoriente, mais c'est bien l'intention de son metteur en scène.
Les cinéphiles s'amuseront à débusquer quelques petites anecdotes : la voix de Francis Huster pour doubler Joe Dalessandro, et des apparitions des tous jeunes Michel Blanc et Gérard Depardieu.
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Précisons que Serge Gainsbourg réalisera ensuite trois autres longs métrages : Equateur en 1983, Charlotte for ever en 1986 et Stan the Flasher en 1990.
Également dans l'actualité de ce jour, il y a l'ouverture officielle de la maison et du musée consacré à Serge Gainsbourg, rue de Verneuil.
Je t'aime moi non plus est visible au cinéma depuis le mercredi 20 septembre.
*Source CBO Box-office