Après les sauterelles, la pluie mortelle. Avec Acide, présenté hors compétition au Festival de Cannes, Just Philippot réalise son deuxième long métrage et s’impose, définitivement, comme un cinéaste qui manie l’hybridation des genres avec brio.
Si La Nuée s’aventurait dans l’horreur agricole, le réalisateur plonge désormais dans l’horreur climatique avec, comme le prédit le titre, des averses susceptibles de réduire la faune et la flore en poussière.
Dès sa première séquence, le film ancre le spectateur dans un univers social des plus réalistes qui renvoie directement aux manifestations des Gilets jaunes.
“C’était important de parler de nous aujourd’hui, lance Just Philippot. Pas simplement d’ancrer le film dans cette idée de réchauffement climatique, mais de parler de nous dans cette situation-là. Je voulais désaxer le récit qui, avant de se présenter comme un film catastrophe, serait capable de montrer un miroir dans notre société actuelle.”
Pour La Nuée, qui évoquait en partie la détresse des agriculteurs, le cinéaste imaginait un savoureux mélange entre La Mouche de David Cronenberg et Petit Paysan d’Hubert Charuel.
Ici, il s’inspire de la colère du documentaire de David Dufresne, Un pays qui se tient sage, pour la mêler à un film de grand spectacle. Parmi ses références : Steven Spielberg, Jeff Nichols ou encore Alfonso Cuarón.
C'est un petit film dans un grand film, une histoire intime dans un film catastrophe populaire.
Guillaume Canet, qui tient le premier rôle d’Acide, n’a pas hésité à rejoindre ce projet. “Just est un cinéaste de son temps et il écrit sur ce qui le touche, explique-t-il. Ce sont des questionnements, des thèmes qui font partie de sa vie de citoyen et il a réussi à dessiner la période que nous vivons aujourd’hui, entre la situation sociale et environnementale.”
L’acteur poursuit : “C’est un petit film dans un grand film, une histoire intime dans un film catastrophe populaire. Dès le début, parce qu’on se soucie des personnages, le spectateur ressent toute la nervosité ambiante.”
Acide renvoie également aux instincts de survie de l’être humain qui, devant une situation exceptionnelle, peut autant faire preuve de courage que de lâcheté.
“Pour nous, jouer un truc pareil, c'est passionnant car on vient creuser un état que l’on ne connait pas, détaille Guillaume Canet. Personne ne sait comment il pourrait réagir dans ces moments-là. Mon personnage est déjà épuisé par la vie, par l’injustice, donc il va puiser dans ses dernières ressources pour survivre.”
À l’image de la tension d’Acide, le tournage a été intense. Pour Laëtitia Dosch, partenaire de Guillaume Canet à l’écran, cela a été d’autant stimulant qu’elle vient du cinéma d’auteur.
“Alors que je n’ai même pas le permis, je me retrouve au volant d’une voiture avec Guillaume Canet et une jeune fille à l’arrière, tandis que des figurants se jetaient sur la bagnole, s’amuse-t-elle. J’ai également dû m’entrainer en eau froide pour une séquence. Il y a tout un parcours de film d’action que je n’avais jamais fait auparavant.”
Comme pour La Nuée, Acide a été tourné avec le maximum d’effets spéciaux en direct. Le son de la pluie sur la plateau a été retravaillé pour créer une musicalité et instaurer un vrai climat pour le public.
Le climat, c’est qu’il y a de plus important pour Just Philippot. Il conclut : “J’essaie de ne jamais relâcher le spectateur et de l’emmener le plus loin possible pour lui faire vivre des expériences.”
Propos recueillis par Thomas Desroches, à Cannes, en mai 2023.
Acide, au cinéma le 20 septembre.