Imaginez un monde dans lequel des mutations transforment les êtres humains en animaux. Cette idée folle et intrigante est le point de départ du second long métrage de Thomas Cailley, Le Règne animal. Dans une France touchée par un étrange virus, François, un père de famille accompagné de son fils, Emile, part à la recherche de son épouse portée disparue. L’adolescent craint sa mère depuis qu’elle ressemble moins à une femme qu’à un ours, mais il ne sait pas encore qu’il est, lui aussi, contaminé.
Le réalisateur, qui coécrit le scénario avec Pauline Munier, propose un film impressionnant, à la fois pour son ambition visuelle que pour sa force émotionnelle. Il dessine les contours d’un monde où les frontières entre l’homme et la créature s’effacent peu à peu. Dans cet univers, le rejet et la discrimination ne sont que plus présents.
Dans la peau du héros principal, Emile, Paul Kircher - révélé dans Le Lycéen de Christophe Honoré - livre une interprétation plus que convaincante. Il parvient à créer un adolescent attachant qui, malgré lui, s’éloigne de son caractère humain. A ses côtés, on retrouve Romain Duris, Adèle Exarchopoulos et Tom Mercier, sous les traits de Fix, un homme-aigle.
Le Règne animal est une œuvre multiple, à la croisée des genres, mêlant le drame à la science-fiction et au fantastique avec, aussi, beaucoup d’humour. Novateur, le film réussit à trouver un équilibre entre une histoire intime, centrée autour d’une relation père-fils, et un conte qui s’inscrit dans l’héritage des grands films de monstres. Impossible de ne pas penser à L’Île du docteur Morceau - adaptée plusieurs fois au cinéma, on retiendra seulement la version de 1977 -, mais aussi La Mouche de David Cronenberg.
A l’écran, les effets spéciaux laissent bouche bée. Le cinéaste, soucieux de préserver le réalisme de son intrigue, se tourne davantage vers des effets pratiques que des effets numériques. Pour certaines créatures, l’utilisation des CGI est indispensable, mais Le Règne animal met en valeur un savoir-faire français sur le travail du maquillage, des prothèses et des marionnettes électroniques.
Le film de Thomas Cailley prouve, une fois de plus, que le cinéma de genre français est promis à un beau et grand futur. Sans aucun doute, l’un des films majeurs de cette seconde partie de l’année 2023.
Le Règne animal, au cinéma le 4 octobre 2023.