Indiana Jones et la dernière… Croisette. Quinze ans après la présentation du Royaume du crâne de cristal, quatrième opus d'une saga que l'on pensait pourtant terminée depuis 1989 et ce plan du héros galopant vers le soleil couchant, le célèbre aventurier est de retour pour un cinquième épisode. Et Harrison Ford jure qu'on ne l'y reprendra plus.
Y compris à notre micro, sans que nous ne lui demandions de confirmer ce qu'il se dit sur le film depuis quelques semaines et mois. C'est entouré du réalisateur James Mangold (qui succède à Steven Spielberg devant la caméra), de sa nouvelle acolyte, la géniale Phoebe Waller-Bridge ou de ses adversaires Mads Mikkelsen et Boyd Holbrook qu'Harrison Ford est venu à Cannes pour dire adieu à l'autre grand rôle iconique de sa carrière, après celui d'Han Solo.
Un au revoir qui se veut autant comme une conclusion qu'un retour aux sources. Peut-être pour rectifier le tir après la déception de l'épisode 4. Et cette manière de renouer avec l'essence de la franchise est aussi bien narrative et visuelle que thématique, et elle s'incarne tout particulièrement dans la séquence d'ouverture, qui nous renvoie en 1939, époque des trois premiers films de Steven Spielberg.
Contrairement au début de La Dernière croisade, autre flashback dans lequel le héros était incarné par River Phoenix, c'est bien Harrison Ford que l'on retrouve sous le chapeau. Et l'acteur octogénaire en profite pour rajeunir de plusieurs décennies, grâce à la magie des effets spéciaux. Une cure de jouvence numérique teasée dès les bandes-annonces et dont le rendu est particulièrement impressionnant.
La technologie n'est certes pas encore parfaite, car l'œil humain parvient toujours à voir une petite différence (selon les jeux d'ombre et de lumière notamment). Mais les progrès effectués depuis certains Marvel et Star Wars, ou même entre deux bandes-annonces du Cadran de la destinée, sont flagrants, et ce nouvel Indiana Jones lui permet de passer un cap.
Réalisé grâce à "des centaines d'heures de rushes de [Harrison Ford], des gros plans, des plans moyens, des plans larges, avec tous types d'éclairage, de nuit comme de jour" selon James Mangold, ce trucage nous renvoie, nous aussi, à l'époque des trois premiers films de Steven Spielberg. Mais ça n'est pas qu'une coquetterie ou un moyen d'appâter les fans - même si cela ne manquera pas de leur plaire.
La séquence permet notamment d'introduire le méchant incarné par Mads Mikkelsen, le mystérieux Cadran de la destinée du titre et l'opposition entre le passé d'aventurier d'Indiana Jones et son présent de tout jeune retraité. Lesquels vont se retrouver mêlés par l'entremise d'Helena, filleule du héros à qui Phoebe Waller-Bridge apporte son énergie, sa modernité et son impertinence, jusque dans certains dialogues qui portent manifestement sa patte.
Comme La Royaume du crâne de cristal, dans lequel Indy s'interrogeait déjà sur sa place dans le monde (manière pour Spielberg de questionner la sienne à Hollywood ?), Le Cadran de la destinée parle de la vieillesse et du temps qui passe. Et ce n'est pas un hasard si le long métrage s'ouvre sur le tic tac d'une horloge.
INDY ET LA QUÊTE DU TEMPS PERDU
Que reste-t-il à un archéologue de sa trempe en cette année 1969 qui marque la fin d'une époque, alors que l'homme s'apprête à marcher sur la Lune et que les meurtres de la famille Manson vont traumatiser une Amérique embourbée au Viêtnam ? C'est l'une des questions que pose, en creux, cet opus qui fait bien évidemment la part belle à l'aventure alors que le héros renoue, une dernière fois, avec sa jeunesse.
S'il réussit à capturer l'essence de la saga (même si le brio de Steven Spielberg manque par instants), James Mangold n'en fait pas un film passéiste. Bien aidé par le personnage d'Helena, qui sert de passerelle entre les générations, il fait cependant tourner la nostalgie à plein régime. A tel point que la première séquence peut aussi être vue comme un souvenir du vieil Indy que l'on voit se réveiller chez lui ensuite.
L'accueil que le public réservera à ce Cadran de la destinée est, à ce jour, l'un des derniers mystères du film. Mais le plaisir de revoir Harrison Ford dans la tenue d'Indiana Jones demeure intact, tout autant que celui de replonger, une dernière fois, dans cette saga avec laquelle beaucoup ont grandi en rêvant d'aventure et de trésors légendaires.