Second long-métrage de Romain Quirot après Le Dernier Voyage, le film de genre français Apaches se déroule en 1900. De Montmartre à Belleville, Paris est aux mains de gangs ultra violents qui font régner la terreur sur la capitale : les Apaches. Prête à tout pour venger la mort de son frère, une jeune femme intègre un gang. Mais plus elle se rapproche de l’homme qu’elle veut éliminer, plus elle est fascinée par ce dernier.
Ce film de gangsters s'inspire d'un vrai gang qui a fait régner la terreur dans les rues de la capitale à La Belle Époque.
À l'occasion de la promotion du long-métrage, Romain Quirot nous explique : "Quand j'ai entendu parler des Apaches, je me suis dit qu’il y avait dans ces gangs de la Belle Époque une énergie, une rage et une cinématographie. J’y ai tout de suite vu un nouveau terrain de jeu, un nouvel univers à explorer.
Les Apaches étaient assez jeunes. C'était un gang qui avait quelque chose d'assez punk : "on vit jeune, on refuse de travailler, on n'ira pas à l'usine mourir comme nos parents". Ils sont portés par une énergie mais il y a aussi une forme de jeunesse qui se brûle les ailes en assumant complètement."
Et pour incarner ces voyous, le cinéaste a fait appel à la nouvelle génération de comédiens français : Alice Isaaz, Niels Schneider, Rod Paradot, Artus et Armelle Abibou.
Qui étaient les Apaches ?
Les Apaches sont des bandes de criminels qui prolifèrent de Montmartre à Belleville au début du XXème siècle. Ces gangs détestent la police, les bourgeois et le travail qu'ils jugent asservissant.
Lors de l'Exposition universelle de 1889, les Parisiens découvrent le spectacle Wild West Show de Buffalo Bill et les Indiens d’Amérique pour qui ils se fascinent. Dès 1900, un journaliste du Matin baptise ces bandes de malfrats "Apaches", et le surnom est repris.
Henri Fouquier, qui rédige un article sur l'assassinat de deux ouvriers, définit le terme : "Nous avons l'avantage de posséder, à Paris, une tribu d'Apaches dont les hauteurs de Ménilmontant sont les Montagnes rocheuses. Ceux-ci font beaucoup parler d'eux [...]. Ce sont des jeunes hommes pâles, presque toujours imberbes, et l'ornement favori de leur coiffure s'appelle les rouflaquettes. Tout de même, ils vous tuent leur homme comme les plus authentiques sauvages, à ceci près que leurs victimes ne sont pas des étrangers envahisseurs, mais leurs concitoyens français."
Paris est en plein bouleversement et en travaux avec la construction du métro et le découpage de la ville par le Baron Haussmann. Les ouvriers et les classes populaires ont été déplacés du centre vers les arrondissements périphériques. Ces derniers vivent dans des bidonvilles et tentent de survivre dans cette ville en pleine mutation où l'on ne veut plus d'eux. C'est là que vivent les Apaches.
Ces derniers sont en marge de la société et refusent de travailler dans les usines. Ils survivent en commettant des vols et n'hésitent pas à faire couler le sang, agresser les passants et à prostituer les filles de leur groupe. On estime qu’ils sont entre 30 000 et 80 000 au tout début des années 1900.
Les différentes bandes, composées le plus souvent de jeunes garçons ayant entre 15 et 20 ans, se donnent des noms qui font références à leur quartier : Les Loups de la Butte (la Villette), Les Gars de Charonne, Les Monte-en-l’air des Batignolles. On les reconnaît souvent à leur style bien particulier : casquette portée sur le côté, foulard autour du cou, veste d’ouvrier, bottines, tatouages et langage argot.
Les Brigades du Tigre contre les Apaches
La presse relaie régulièrement dans ses colonnes les meurtres et vols de ces gangs qui terrorisent les Parisiens. Si bien que Georges Clemenceau, alors ministre de l’Intérieur, décide de créer des unités de police judiciaire spécialisée, qui sont baptisées les Brigades du Tigre. Ces brigades auront d'ailleurs les honneurs dès 1974 d'une série télévisée par Claude Desailly et d'un film sorti en 2006.
La Première Guerre mondiale met fin aux agissements des Apaches puisque ces derniers sont envoyés au front. Ils laissent néanmoins derrière eux un héritage et des codes qui seront récupérés par les différents gangs partout en France.
Un sujet cinématographique pourtant peu traité
Avec son long-métrage, Romain Quirot souhaitait assumer la culture populaire française. "Les Apaches sont des gangs très cinématographiques. Pourtant il n’y a qu’un seul film qui en parle : Casque d’or avec Simone Signoret, et c'est très éloigné d’un film de gang. Le mot Apaches n’y est même pas prononcé." déclare-t-il à notre micro.
Le cinéaste est parvenu à recréer le Paris de La Belle Époque et nous offre ainsi un film de genre français dans la lignée de Gangs of New York de Martin Scorsese.
Romain Quirot nous précise : "Nous avons tourné dans une petite ville parce que Les Loups de la Butte étaient à Montmartre, mais en l'occurrence, Montmartre aujourd'hui, c'est un musée. C'est très joli, mais on ne peut pas faire un film d'Apaches là-bas.
L'idée était de trouver une ville qui ait des pavés, des murs sales, où on puisse se dire qu’on a au moins quelques rues qui vont nous permettre de recréer l'illusion du Paris de 1900. Et après, nous avons ajouté des effets spéciaux qui vont prolonger le décor.
Par exemple, au début du film, les enfants ont une planque dans une église. Et il y a un trou dans le mur par lequel on voit Paris avec la Tour Eiffel en construction. C'est un petit détail, mais ça permet de créer un univers."
Avec Apaches, le cinéma français se réapproprie son Histoire et casse les codes du film historique en y incorporant de la vengeance, de l'action et une histoire d'amour impossible. Un film à voir au cinéma.
Le réalisateur nous explique pourquoi c'est si dur de faire un film de genre en France.