Parmi les Harmon, il y a le père, psychiatre adultère. Après avoir été pris sur le fait par sa femme, chacun des trois membres de la petite famille s’imagine que partir loin de Boston serait une bonne idée. Un départ à zéro. Quand ils tombent sur une grande demeure au charme certain, à un prix défiant toute concurrence, on leur annonce que celle-ci fut le lieu du double-meurtre des deux précédents propriétaires. La fille, sombre adolescente, s’en trouve particulièrement contente. Cependant, on ne leur a pas tout dit… Un pilote de génie. Du suspense. Des personnages fascinants. Des situations bluffantes. Un second épisode à la même hauteur. Un troisième. Un quatrième. Un cinquième. On pense un instant avoir affaire à un chef-d’œuvre du petit écran puis soudainement, la rupture. Le sixième épisode, « Spécial Halloween », apporte sa part de paradoxe : une série horrifique qui se laisse gâcher par un épisode d’Halloween, alors que même Les Simpson savent exploiter ce principe du mieux qu’ils peuvent… Dès lors, il n’est plus même plus question du twist qui clôturait jusqu’alors chaque épisode de la série, nous faisant impatiemment attendre la suite. Comment un tel potentiel aura-t-il été gâché, pour finalement laisser ce goût amer d’une excellente demi-série, en contraste avec une autre moitié parfois détestable, au mieux pas trop mal. Le fait est que le moindre parti pris par les réalisateurs lors des cinq premiers épisodes ne réapparaîtra pas. Du tout. Tandis que le début multipliait les hommages virtuoses à des modèles comme Shining, Orange Mécanique ou Rosemary’s Baby, c’est malheureusement lorsqu’American Horror Story tente d’obtenir sa propre identité – qui était pourtant déjà bien présente, en dépit des nombreuses influences – que le tout part en cacahouètes. Les moments d’angoisse où le suspense régnait en maître laisse place à un genre de mini-feuilleton grotesque et grand-guignolesque. Nous suivons désormais la cohabitation entre les vivants et les morts, partagés entre mesquineries ridicules et vengeances disproportionnées. À trop vouloir nous faire avaler des fantômes de toute forme, tout âge, Ryan Murphy et Brad Falchuk ne nous font ressentir qu’un mince écœurement : on n’y croit plus, la fascination n’opère plus. Plus. Plus. Plus. Beaucoup trop de plus pour une série qui se sera finalement montrée trop inégale pour être le coup de cœur évoqué par un certain nombre de spectateurs. Les acteurs, eux-aussi, apparaissent comme légèrement contrastés – ce qui est assez naturel dans le monde de l’audiovisuel. À partir d’un certain stade, devoir se coltiner Dylan McDermott (Ben Harmon) s’avère assez fastidieux. Au contraire, Evan Peters (qui interprète Tate) est à l’origine d’une majeure partie de l’intérêt que l’on pourrait éventuellement porter à la série, lorsque celle-ci se trouve en déchéance. Le personnage est intriguant, mystérieux. L’acteur a un charisme indéniable. Il rappelle souvent le Malcolm McDowell, immortalisé par l’image d’Alex DeLarge, le jeune psychopathe aux faux-cils. Parfois aussi, le double-rôle attribué à la bonne, parfois effrayante (Frances Conroy), parfois chaudement sexy (Alexandra Breckenridge). Pas de doute : les personnages du début surpassent en tous points les nouveaux arrivants « post-Halloween » – le père étant l’exception qui confirme la règle. Pas mauvaise, pas excellente non plus, cette première saison d’American Horror Story pourrait directement se joindre aux synonymes du mot « frustration ». Convoquant toute notre attention sur le début pour finalement se laisser aller dans du grand n’importe quoi : cela s’apparenterait-il à de la publicité mensongère ? Quoiqu’il en soit, la deuxième saison pourra faire office de rattrapage.