La vengeance d’une blonde
Chabrol sort de ce corps ! Marc Fitoussi fait pour la 1ère fois dans le thriller psychologique avec cette adaptation d’un roman suédois. Après, Copacabana, La Ritournelle, Maman a tort, il se sort avec les honneurs de cette histoire servie par un casting de luxe en état de grâce. Vienne, ses palais impériaux, son Danube bleu et… sa microscopique communauté française. Jeune couple en vue, Ève et Henri, parents d’un petit Malo, ont tout pour être heureux. Lui est le chef d’orchestre de l’Opéra, elle travaille à l’Institut français. Une vie apparemment sans fausse note, jusqu’au jour où Henri succombe au charme de l’institutrice de leur fils. 110 minutes à la réalisation soignée, basées sur un scénario bien écrit, au suspense bien menée et aux dialogues brillants. Une belle surprise !
C’est donc l’histoire d’une femme qui découvre que son mari la trompe, mais elle ne se résout pas à l’affronter et préfère passer par des chemins de traverse – c’est une litote ! -, pour essayer de le récupérer. C’est évidemment le côté milieu de notables fermé miné par pas mal de turpitudes qui fait penser au grand Chabrol. Mais le fait de situer l’action dans le milieu d’ »expats » français crée un sorte de huis clos excitant et contemporain. Le titre du film est décliné à tous les niveaux : apparences conjugales, familiales, sociales, morales et à tous les personnages, même secondaires. Ces « apparences » concernent également Vienne, ville d’apparat de la valse et des pâtisseries, mais aussi capitale du pays où se sont déroulés des faits divers sordides, sans parler du passé nazi. Ici, on est loin de Lubitsch et plus proche d’Haneke. Le film exploite également tous les aspects des nouvelles technologies, à la fois outil pratique du quotidien et terrible instrument de surveillance et de manipulation. Fitoussi évoque Hitchcock, Chabrol, Buñuel, mais aussi Demy qui est expressément cité, voire Truffaut. A saluer également la BO très homogène signée Bertrand Burgalat. Bref, c’est complexe et malin, feutré et acide, glacé et vénéneux… Donc un régal !
Karin Viard explose encore une fois de talent – mais j’ai l’impression de me répéter -. Pour une fois on comprend presque tout ce que dit Benjamin Biolay, mais j’ai toujours du mal à comprendre l’intérêt que lui portent les réalisateurs. Par contre, les autres rôles sont magnifiquement campés par la sublime Pascale Arbillot, l’excellente Laetitia Dosch, Lucas Englander et la délicieuse Evelyne Buyle. Une romance grinçante et malsaine qui tient en haleine jusqu’au bout. Du bon film français !