Dersou Ouzala fut un trappeur de la taïga bien réel, qui guida l’explorateur russe Vladimir Arsenyev dans des régions reculées, au début du 20ème siècle. Les deux hommes devinrent très bons amis, à tel point qu’Arsenyev lui dédiera ses mémoires.
Des décennies plus tard, c’est un Akira Kurosawa au fond du trou qui adapte ce livre sur grand écran. Marqué par un précédent échec commercial et une tentative de suicide, le réalisateur va donc tourner « Dersou Ouzala » sur place, dans la taïga russe, dans une co-production japano-soviétique qui connaîtra un joli succès au box-office.
« Dersou Ouzala » est avant tout une bien jolie histoire d’amitié. Entre un militaire éduqué qui ne connait rien des dangers de la nature, et un « sauvage » qui en maîtrise parfaitement les règles. Moqué par les subalternes de l’officier, Dersou gagnera vite leur respect par ses profondes connaissances du terrain, son humilité, et sa bonté sans limite. L’ironie étant que Dersou connait les dangers et les saluts de Mère Nature, mais ne peut envisager que l’Homme soit mauvais ou régi par des lois absurdes ! L’interprétation pleine de bonhommie de Maxim Munzuk permettant de le rendre immédiatement attachant aux yeux du spectateur.
Au-delà de ceci, le film traite diverses thématiques avec finesse. Beauté et violence de la nature, absorption de celle-ci par une civilisation toute aussi violente dans les faits, ou encore difficultés de la vieillesse lorsque l’on ne compte que sur soi-même. Il faut bien dire que dans tout cela, il y a quelques petites longueurs (le rythme est loin d’être frénétique !), et une voix-off qui demeure toujours un procédé un peu lourd au cinéma.
Mais heureusement, c’est Akira Kurosawa derrière la caméra ! Le réalisateur nous livre ses fameuses compositions savantes, où les choix d’angles de caméra et de placements des personnages suffisent à faire passer une grande émotion. En plus de cela, « Dersou Ouzala » a été tourné en décors naturels, dans des conditions difficiles. On sent pleinement le poids des saisons passer, tandis que la nature est présentée comme aussi sublime que cruelle. La séquence sur le lac étant peut-être la plus emblématique et la plus poétique du film.
Une très belle œuvre.