Après avoir décroché le prix de la meilleure actrice dans une comédie musicale aux Golden Globes 2008, Marion Cotillard a remporté successivement le bafta, le césar et l'oscar de la meilleur actrice pour sa brillante interprétation d'Edith Piaf.
La Môme a été projeté en ouverture du Festival de Berlin 2007. Le film était également en lice pour l'Ours d'Or.
Le tournage de La Môme s'est déroulé en quatre mois et demi pendant l'hiver 2006, entre Paris, Los Angeles et Prague.
Trois ans après Les Rivières pourpres 2, Olivier Dahan retrouve le producteur Alain Goldman pour La Môme.
Olivier Dahan avait depuis longtemps envie de faire un film sur le fonctionnement intérieur d'un artiste. En janvier 2004, alors qu'il se trouvait dans une librairie à feuilleter un livre sur Edith Piaf, l'idée de faire un film sur elle lui est apparue subitement. Il a alors envoyé le texto suivant au producteur Alain Goldman : “Un grand film d'amour, musical, populaire, tragique et romanesque. Un sujet français, un film international, un grand film sur Piaf.”. Olivier Dahan reçoit l'accord de Goldman cinq minutes plus tard.
Pour le réalisateur, “Le véritable élément déclencheur a été une photo d'[Edith Piaf] jeune, dans la rue, avec Momone, son amie. Peu de gens l'ont vue à cet âge-là. On garde surtout d'elle l'image de ce qu'elle a été à partir des années 50-60, la frêle icône à la robe noire. Sur cette photo, j'ai perçu quelqu'un de très différent, qui ne s'appelait pas encore Edith Piaf et qui m'a intrigué. J'ai imaginé un pont entre l'image que tout le monde a plus ou moins d'elle et cette photo où elle apparaît de manière bien plus brute.”
C'est grâce au producteur Alain Goldman qu'Olivier Dahan est aussi le scénariste du film. Il témoigne : “Aborder la vie de quelqu'un à l'écran demande toujours un long processus. Mon expérience sur Vatel et Christophe Colomb m'a appris qu'il faut aux environs d'un an pour s'imprégner des informations, les digérer et trouver une forme narrative intéressante. Au départ, Olivier, homme de sensations et d'images, n'avait pas très envie d'écrire. C'est moi qui l'ai convaincu. Je voulais sa justesse, son sens de l'essentiel, je savais qu'il aurait envie de dire des choses très personnelles – que lui seul pourrait dire. C'est sa vision singulière de la vie de Piaf qui m'intéressait.”
C'est en faisant des recherches que le producteur s'est rendu compte que Piaf fait partie de ces gens aimés de tout le monde. Il affirme : "Piaf est un des rares personnages qui fasse l'unanimité chez les hommes, les femmes, les jeunes et les moins jeunes. Elle ne nivelle pas par le bas, elle nous entraîne tous vers le haut. Sa voix fascine au-delà de toutes les barrières sociales ou culturelles. Tout le monde se reconnaît en elle. Piaf est une icône, un repère et nous en avons plus que jamais besoin. Son statut unique dépasse nos frontières et c'est aussi pour cela que le film intéresse de nombreux pays, y compris les Anglo-Saxons souvent hermétiques aux films français.”
Selon Alain Goldman, “Le projet m'a aussi bouleversé parce que, pour des raisons qui resteront mystérieuses, c'est un sujet très personnel pour Olivier. Comme pour Piaf, l'amour et la musique sont des composantes essentielles de sa vie. Ils ont aussi en commun un même mode de vie, le goût de la nuit, cette force qu'ils tirent de leurs blessures d'enfance. Olivier a pu entrer dans ce personnage en restant lui-même. Comme elle, il n'a jamais oublié d'où il vient.”
Presque toutes les scènes tournées correspondent au premier jet du scénario. Olivier Dahan a retravaillé la coupe et la structure du scénario, mais pas le contenu. Pour s'imprégner de la manière de penser et du langage de Piaf, Dahan a lu ses lettres, publiées ou non. Il a été frappé par sa qualité d'écriture, son honnêteté ainsi que sa justesse. Afin que cela reste un projet personnel, Dahan a délibérément choisi de ne rencontrer personne de l'entourage de la chanteuse pendant l'écriture du scénario. Une fois celui-ci achevé, il l'a envoyé à Ginou Richer, la meilleure amie de Piaf pendant vingt ans, pour que celle-ci lui donne son avis. Elle l'a alors rappelé pour lui dire qu'il ne s'était pas trompé sur le personnage.
Le réalisateur a tout de suite pensé à Marion Cotillard pour le rôle de Piaf. Il explique pourquoi : “Piaf est un personnage en soi, une icône. Tout le monde connaît son visage, sa voix, sa silhouette. Pour que le public accepte ce que je racontais, le décalage entre l'actrice et Piaf ne devait pas être trop grand. La ressemblance était nécessaire. Marion est plus jolie mais elle ressemble vraiment aux premières photos de Piaf. Je lui ai d'abord envoyé le scénario, puis nous nous sommes rencontrés. Faute de temps, nous n'avons pas vraiment fait d'essais, uniquement une demi-journée pour le maquillage. Mais j'avais demandé à Marion de faire le même travail que moi, c'est-à-dire de lire, de voir des films. Je pense qu'elle a, tout comme moi, fait ce film à l'intuition, et c'était la meilleure façon.”
Marion Cotillard raconte comment elle s'est préparée pour avoir le rôle : “Avant l'entretien, j'avais simplement regardé quelques photos de Piaf. Je ne voulais surtout pas mettre la charrue avant les boeufs et m'investir trop sur le personnage avant d'être certaine d'être choisie, mais je ne pouvais m'empêcher d'aller à la découverte de cette femme. Quand j'ai compris qu'Olivier avait vraiment envie de faire le film avec moi, j'ai tout de suite désiré m'investir à fond. Il m'a donné le livre de Jean Noli sur les trois dernières années de Piaf. J'avais déjà de l'admiration pour elle, mais j'en ai eu encore plus lorsque j'ai découvert ce qu'avait été sa vie."
Marion Cotillard nous livre ce qu'elle a retenu de son personnage : “Je n'aborderai plus jamais un rôle de la même façon. Piaf m'a appris beaucoup de choses. Par rapport au travail, je pense que je prendrai encore plus de plaisir qu'auparavant parce que je sais maintenant que les personnages existent à part entière. J'aurai une manière de les faire vivre encore plus intense.”
Olivier Dahan commente la relation qui s'est établie entre lui et son actrice principale, ainsi que le travail qu'elle a fourni sur les chansons : “C'est la première fois que j'ai une relation aussi forte avec une actrice. Nous partagions la même perception de Piaf. Son travail et le mien se sont faits en symbiose. Elle chante elle-même à quelques reprises, mais la plupart du temps, nous avons utilisé le play-back. Le play-back de Piaf est complexe. Il ne s'agit pas seulement de mettre un disque et de chanter dessus. C'est quelque chose qu'elle a travaillé en amont pour retrouver les souffles, les rythmes. Elle a réussi à associer l'âme du personnage à son incarnation. Elle la rend vivante.”
Olivier Dahan a choisi la comédienne Clotilde Courau pour interpréter Anetta, la mère de Piaf. Elle l'a abandonnée alors qu'Edith n'était qu'une enfant pour aller tenter sa chance en tant qu'artiste. Le cinéaste commente : “Clotilde a un rôle court mais déterminant. C'est un personnage très difficile. La mère de Piaf demandait régulièrement de l'argent à sa fille qui, malgré sa rancune, l'a toujours aidée. C'est la seule de sa famille à ne pas être enterrée avec elle...” Quant à Louis Gassion, son père, c'est Jean-Paul Rouve qui lui prête ses traits. Olivier Dahan : “Je connais Jean-Paul depuis longtemps et j'avais envie de travailler avec lui. J'aime ce qu'il dégage, la sensibilité qu'il donne physiquement au personnage.”
La Môme marque la première collaboration entre Olivier Dahan et Gérard Depardieu. Le réalisateur témoigne : “Je ne connaissais pas personnellement Gérard Depardieu et c'est Alain qui m'en a parlé. Il joue Leplée, celui qui offrira sa première chance professionnelle à Piaf. Dès notre première rencontre, nous nous sommes tout de suite très bien entendus. Il a le même profil que Piaf, il ne fait aucune différence entre sa vie et son art. Les deux se mélangent.”
Le manager de Piaf, Louis Barrier, joué par Pascal Greggory, a été le seul personnage à être modifié suite à la relecture du scénario par Ginou Richer. Dahan confie : “J'ai déjà travaillé avec Pascal. C'est lui qui m'a appelé et pour lui, j'ai entièrement réécrit le rôle. C'est le seul que j'aie modifié, sur les conseils de Ginou, qui m'a confié l'un des secrets du personnage. Louis était éperdument amoureux de Piaf et ils étaient même sortis ensemble au tout début. Ce n'est mentionné dans aucune biographie. Cela teinte tout le personnage et Pascal a eu raison de me pousser.”
Concernant les rôles principaux, seul le personnage de Marcel Cerdan a nécessité un casting. C'est finalement Jean-Pierre Martins qui a décroché le rôle. Il fait parti des Silmarils, groupe de musique dont Olivier Dahan a réalisé le premier clip en 1994.
C'est Emmanuelle Seigner qui interprète le rôle de Titine, un personnage inventé par le réalisateur : “J'avais déjà rencontré Emmanuelle pour un autre film qui ne s'était pas fait et j'avais envie de travailler avec elle. Piaf a réellement passé son enfance dans une maison close, mais j'ai inventé le personnage de Titine à partir de données précises. J'ai pensé que les prostituées, avec leur côté maternel, devaient aimer avoir cette petite fille auprès d'elles.”
Avec un répertoire musical aussi vaste que celui d'Edith Piaf, il était nécessaire de faire des choix. Le cinéaste explique : “J'ai choisi les chansons du film guidé par mes envies et mon ressenti. Les plus connues étaient incontournables. J'avais aussi envie d'entendre Piaf chanter en anglais, pour la sortir de l'image d'icône française. En tant qu'artiste, elle n'appartient à personne en particulier, mais à tous ceux qui l'écoutent. L'idéal de tout artiste est de parvenir à l'universel.”
Même si les chansons sont en play-back, Marion Cotillard a dû travailler toute la gestuelle de Piaf sur scène, ainsi que sa manière de chanter. Elle explique : “J'aime chanter, mais le travail technique sur les play-back a été le plus dur pour moi parce que j'avais envie qu'ils soient parfaits. J'ai travaillé avec un prof. Je voulais comprendre comment chantait Piaf, comment elle plaçait son corps, sa langue, la moindre de ses respirations. Je devenais dingue tellement c'était complexe. Si j'avais des vidéos d'elle sur ces chansons, je décortiquais tout. Je me suis aperçue qu'il ne suffit pas d'être en rythme pour faire un bon play-back. La respiration est essentielle. Je notais les moments où elle prenait ses respirations sur des feuilles. Après, je mettais la musique, je me filmais avec une caméra. J'ai passé des nuits entières à prendre des notes sur ce qui n'allait pas ! Je voulais que ce soit Piaf."