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    La Guerre selon Charlie Wilson : pourquoi il est urgent de revoir le film porté par Tom Hanks
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Sorti en 2008, "La Guerre selon Charlie Wilson" évoquait l'histoire de ce politique US qui joua un rôle important dans le financement des moudjahidines en Afghanistan. L'ultime réplique du film résonne comme un douloureux écho à l'actualité du pays.

    Paramount Pictures France

    Féroce satire politique sortie en 2008 chez nous et réalisée par Mike Nichols, portée par un impeccable Tom HanksLa Guerre selon Charlie Wilson évoquait l'histoire authentique de cet ancien officier de l'U.S Navy qui fut représentant fédéral sous l'étiquette démocrate du 2e district du Texas, de 1973 à 1997.

    Mais il fut surtout un rouage très important de ce que l'on a appelé "le programme Afghan" mis en place par la CIA durant la guerre d'Afghanistan, de 1979 à 1989, qui consistait à armer et entraîner les Moudjahidines afghans opposés au gouvernement communiste afghan, soutenu par l'URSS.

    Nommé au sous-comité américain des crédits à la Défense, où neuf parlementaires de la Chambre des représentants étaient responsables des fonds des opérations secrètes de la CIA, Wilson parvint à faire considérablement augmenter le budget de la CIA pour les opérations menées en Afghanistan.

    En 1983, il emporta par exemple l'approbation de plus de 40 millions $, avec notamment 17 millions $ spécialement destinés à l'achat d'armes antiaériennes. L'année suivante, Wilson fut contacté directement par un agent de la CIA, Gust Avrakotos (incarné par le formidable et regretté Philip Seymour Hoffman dans le film) qui, brisant le tabou de la CIA de ne pas faire pression sur les parlementaires pour obtenir des budgets supplémentaires, lui demanda 50 millions de plus. Wilson accepta la demande, et réussit à convaincre ses collègues du bien-fondé de celle-ci.

    Comme un éternel recommencement...

    Si l'on évoque le film de Nichols, c'est bien entendu parce qu'il fait un écho troublant à la terrible situation que traverse l'Afghanistan actuellement, avec le retour au pouvoir des Talibans, vingt ans après leur chute, et l'évacuation du pays par les Américains, qui ont déversé sur le pays pas moins de 978 milliards de dollars de subventions en 20 ans.

    La fin du film résonne d'ailleurs comme un tragique recommencement : il s'achève alors que Charlie Wilson échoue à convaincre le Congrès américain d'investir positivement en Afghanistan. Dans un ultime échange, l'agent de la CIA Gust Avrakotos le presse de rallonger encore les crédits. "Faites plus !" dit-il à Wilson. "On est passé de 5 millions à 1 milliard ! Le Stinger, le Milan, c'est moi ! Un congrès démocrate rigide a appuyé un président républicain" lui rétorque Wilson. "Ca ne suffit pas, car je vais vous transmettre une information secrète, et vous comprendrez que les fous arrivent à Kandahar en nombre incalculable" lui répond alors Avrakotos.

    Revoici l'extrait...

    Il évoque bien évidemment les Talibans, dont la ville de Kandahar est le berceau de ce mouvement rigoriste, stratégique dans la conquête de la capitale Kaboul. "Kandahar est totalement prise. Les moudjahidines ont atteint la place des Martyrs dans la ville." C'est par un tweet qu'a d'ailleurs été annoncée dans la nuit de jeudi à vendredi dernier la prise de la deuxième plus grande ville d'Afghanistan par les Talibans. Immense symbole pour les combattants insurgés, car c'était là que se trouvait le centre du pouvoir pendant leur régime ultra-rigoriste de 1996 à 2001. Une prise qui a aussi représenté un coup terrible porté au moral des troupes afghanes régulières.

    Entre le désengagement des Américains en Afghanistan et le retour des Talibans à la tête du pays vingt ans après en avoir été chassé, cet ultime échange dans le film sonne comme un douloureux écho à la tragique actualité du pays. "Afghanistan, pays lointain, en guerre, dont tout le monde se fout, ou presque..." commentait tristement le regretté cinéaste Christophe de Ponfilly, en ouverture de son poignant documentaire Massoud l'Afghan, assassiné deux jours avant les attentats du 11 septembre 2001. Evènements qui déclencheront l'intervention américaine dans le pays...

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