(...) La première force de Downton Abbey tient dans la qualité de son scénario, certes simple, mais efficace, et aux rebondissements spectaculaires. Passés les trois premiers épisodes introductifs de présentation, et quelques éventuels préjugés sur le monde aristocratique, la série trouve immédiatement sa couleur, sa véritable tonalité (...) Vous retrouverez indéniablement l’univers de Gosford Park i de Robert Altman (2001), l’illustration du fonctionnement d’une grande maison de la noblesse anglaise, la scénographie verticale « upstairs / downstairs » (déjà présente dans la série Maîtres et Valets, 1971), et l’œuvre chorale nobles et domestiques. Mais Downton Abbey est bien mieux rythmée (...) Julian Fellowes élabore des récits bien ficelés à la simplicité insolente. Downton Abbey tire sa force de sa simplicité (...) Ensuite, c’est la direction artistique exquise qui donne à Downton Abbey son véritable blason de noblesse : la réalisation évidemment, une mise en scène chatoyante, des costumes authentiques, une musique qui envoûte les sens, des dialogues ciselés, d’une rare perfection. Sans compter des décors resplendissants : tourner dans des décors réels constitue une vraie valeur ajoutée, et Highclere Castle devient une star à part entière. Tous ces éléments doublés d’une interprétation particulièrement inspirée, vous plongent immédiatement dans une autre époque, et permettent une immersion totale (...) Downton Abbey se distingue également par la dimension humaine de ses intrigues, son humilité et la foi en ses personnages dotés d’une profondeur psychologique et d’une sobriété très anglaises. Nul machiavélisme dans la série. Au fond, il n’y a pas vraiment un monde d’en haut ou un monde d’en bas, ou du moins s’ils existent ou cohabitent, ils ne diffèrent pas significativement dans leur humanité : on retrouve les mêmes faiblesses et tourments de l’âme humaine, les mêmes trahisons, les mêmes manigances et petites manipulations, les mêmes doutes, les mêmes ambitions, les mêmes désirs d’amour et de romance… Comme le dit Julian Fellowes, également producteur de la série : « Dans Downton Abbey, il y a des bonnes et des mauvaises personnes à tous les étages, il n’y a pas de divisions sociales dans la manière dont sont faits les personnages » (...) Ce qui est le plus intelligemment fait, demeure bien entendu l’interaction entre les deux mondes à travers des portraits réalistes, attachants, voire drôles, d’aristocrates, de grands bourgeois et de domestiques. La série est pleine d’émotion simple, on rit, on pleure, on a peur pour les personnages et on sent leur douleur. Peu importe au fond que l’histoire se passe au début du XXe siècle, elle est avant tout universelle : on ne peut tout simplement pas rester indifférent à ces personnages attachants, bousculés comme nous, par le cours de l’histoire, et l’évolution du monde (...) Downton Abbey évolue en effet, comme ses personnages, dans un monde qui change. La grande histoire influe sur les petites histoires de ce microcosme, et l’aristocratie anglaise, une des plus conservatrices d’Europe, doit peu à peu s’habituer aux changements et bouleversements sociétaux. De l’autre côté, la domesticité n’échappe pas à ce même sentiment que des changements immenses vont bientôt bouleverser le monde (...) De la saison 1 à la saison 5, 12 années se sont écoulées devant nos yeux. Même si la série perd un peu de sa superbe au fil des saisons, Dontown Abbey dresse le portrait passionnant d’une Angleterre écartelée entre modernité et tradition, entre aristocratie et bourgeoisie, entre machisme et féminisme. Elle montre le passage des mœurs du 19ème au 20ème siècle, d’une société anglaise de classe à une société plus libérale (...) La saga vaut autant pour sa reconstitution historique soignée que pour l’écriture des personnages. Regarder Downton Abbey, c’est remonter le temps pour avoir un aperçu des deux mondes, contempler un spectacle qui se savoure avec délectation sans se presser, qui détend aussi, tant la combinaison de fraîcheur et de classicisme vous captive tout le long (...) Cette belle fresque historique vient couronner l’âge d’or des séries anglaises, rivalisant avec les plus grosses productions HBO, et prouvant que les séries peuvent égaler le délice rétinien du 7ème Art (...)