Luther est à mon humble avis, une petite pépite dans le paysage télévisuel. Elle reprend des codes assez classiques tel que l'enquête policière, l'anti-héros etc… Mais là où Luther étonne et finalement passionne, c'est par le charisme de deux de ses protagonistes et cette mise en abime de ces êtres propulsés dans un univers sublimement noir.
Je parle ici de deux personnages principaux car pour moi, la dualité de Luther ne serait pas aussi bien exploitée sans la présence de la dérangeante et fascinante Alice Morgan. Luther lutte contre ses propres démons, tentant de les contrôler mais souvent en vain puisque chaque pas qu'il fait le rapproche un peu plus de ce qu'il tente de fuir. Alice quand à elle a embrassé sa part d'ombre, la désignant elle-même comme son identité. A la différence de Luther, elle n'est ainsi plus contrôlé mais en plein contrôle.
Et cette rencontre est pour elle une révélation. Elle qui accepte totalement ce que Luther ne peut accepter de lui-même. De cette manière, même si le personnage d'Alice n'est pas physiquement présent à chaque épisode, sa connexion avec Luther est indiscutable.
Le show va même plus loin en présentant Alice comme une sauveuse puisque grâce à elle, Luther se tire de situations assez inextricable. Elle devient une sorte de héros pour notre personnage principal et on ne peut pas s'empêcher de s'attacher à elle alors qu'elle est et demeure une psychopathe aussi intraitable qu'efficace.
D'une certaine manière, je trouve que si Alice est explicite dans sa volonté de libérer la face cachée de Luther, ce dernier lui apporte une parte d'humanité qu'elle-même semble ignorer.
Ainsi, autour de ces deux individus, gravitent d'autres personnages souvent pris en étau par cet univers assez sordide. On sent derrière Luther, l'influence de comics noir où les super-héros doivent sans arrêt concilier leur volonté de faire le bien/rendre justice et les moyens qu'ils peuvent employer pour y arriver. Déterminer les limites restent une tache difficile et souvent trouble. Et comme ces super-héros qui protège et règne sur une ville en particulier, Luther évolue dans un Londres sombre et morbide. La ville devient ainsi un personnage à part entière, tirant ces personnages vers le bas, les rappelant inlassablement à leur condition.
Alors, oui, Luther n'est pas une série joyeuse (si vous voulez vous remontez le moral, passez votre chemin) mais elle est captivante. On veut savoir jusqu'où Luther est capable d'aller, à quel point il va tomber et surtout s'il va réussir à se tirer de ce merdier dans lequel il navigue à vue. On assiste à la descente aux enfers d'une homme qui malgré tout cherche toujours à rendre justice.
Mais voilà, malgré tout le bien que je pense de cette série et de ces acteurs que je trouve magnifique (Idris Elba et Ruth Wilson sont justes grandioses), la saison 3 n'a pas su renouveler l'histoire. Luther se mord la queue mais à force, je me suis lassée de le voir se prendre les mêmes pains dans la face. On voit venir ce qu'il va perdre et la chasse aux sorcières est toujours la même. La saison 3 n'est pas mauvaise mais en répétant le même schéma que les saisons précédentes, elle affaiblie son propos.
Néanmoins, une conclusion est enfin apportée et cette fin me satisfait amplement, si fin elle était restée. Car oui, une saison 4 de deux petits épisodes est sortie. Remettant en cause tout ce qui avait été conclue. Et quel dommage !! Pour Luther, plus que pour toutes autres séries, je suis énervée de voir jaillir une nouvelle fois ce besoin de faire durer une série qui fonctionne bien certes, sans pour autant apporter quelque chose de nouveau et de pertinent. Il faut apprendre à s'arrêter à temps sous peine de gâcher une excellente série.
Bref, une série qui fait sans aucun doute partie de mes inoubliables. Si vous aimez les univers sombres, les personnages cérébrales et moralement ambiguë, cette série est faite pour vous. Juste un conseil, les trois premières saisons suffisent, la saison 4 ayant pour seul intérêt de replacer le personnage dans une boucle qui avait pourtant été brisée.