Le géant américain de la vidéo à la demande, Netflix, après la passation de The Killing par AMC, livre une saison finale raccourcie, 6 épisodes d’une heure, tout-à-fait satisfaisante, voire plus. Toujours sagement dirigée par Veena Sud, le show policier, sombre et pessimiste, tend à un final à la fois douloureux et rédempteur et le résultat ne fait mentir cette présomption. Le tandem Sarah Linden et Stephen Holder, profondément marqué, meurtri, par les évènements passés et présents s’en va exécuter son dernier tour de piste, dans la douleur, dans l’effroi et dans l’incertitude. Les actes du final de la troisième saison sont une épée de Damoclès sur le tête de nos enquêteurs, le contexte sourd et étouffant d’une quatrième saison qui offre tout de même une nouvelle enquête à se mettre sous la dent, une nouvelle et pénible énigme à mener à terme alors que les circonstances n’y sont jamais favorables.
Le passage d’un Major à l’autre n’aura alors pas porté préjudice à une série soigneusement élaborée, de ses balbutiements à sa conclusion. Ces six derniers épisodes, certes un peu plus longs que les précédents, s’inscrivent dans la droite ligne de ceux découverts précédemment. La photographie, grisâtre mais adaptée, le jeu des comédiens, la bande originale, tout est parfait, comme précédemment. On aurait même tendance à saluer une certaine montée en puissance des deux comédiens principaux, Mireille Enos et Joel Kinnaman, deux individualités parfaitement complémentaires, inséparables. Cette montée en puissance s’explique logiquement du fait que leurs destins, liés, soient le principal enjeu de ce final, imprévisible, surprenant. Les deux acteurs entrent sans discussion possible dans la légende des tandems de flics parmi les plus attachants de l’histoire de la télévision, du fait, notamment, d’une juste humanité, d’un mix très probant de leurs faiblesses et de leurs forces respectives.
Malgré toutes les louanges possibles et imaginables, malgré toutes les bonnes appréciations que l’on pourrait créditer à la version américaine de The Killing, il apparaît pourtant qu’au terme de cette saison, la série en était à la survie, la survie de son concept ne pouvant pas être d’avantage encore élargit. Oui, le pessimisme latent, les cris et les efforts surhumains déployés par nos personnages pour perdurer dans un monde d’une rare noirceur ne peuvent pas continuer indéfiniment. On salue alors la décision prise par la production de mettre un terme au show. Si cette ultime saison est plus courte que les précédentes, c’est sans doute le fait d’une conscience artistique louable de la part du showrunner et de ses financeurs, conscients du fait que pousser le bouchon trop en avant reviendrait à discréditer, sur le moyen et long termes, une série formidable qui devait s’achever sans s’éterniser.
Je noterais finalement qu’en dépit des révélations fracassantes qui mettront un terme à l’affaire Stansbury, l’intrigue strictement policière de cette quatrième saison est loin d’être aussi passionnante que l’affaire Larsen ou du joueur de flûte. Mais bon, nous nous contenterons de cela, sachant que le véritable enjeu, ici, et de savoir vers quoi avance notre tandem de flic. Une petite surprise attend par ailleurs pour sortir de sa boîte lors de l’épisode final. A découvrir. 16/20