The Killing, au sortir de deux saisons captivantes consacrées à l’enquête sur la mort d’une jeune fille, Rosie Larsen, se renouvelle, toujours sous la tutelle d’AMC. On procède ici à la réouverture des vieilles blessures du lieutenant Linden, dossier évoqué durant les deux saisons précédentes, afin d’orienter le public vers une nouvelle intrigue policière plus pessimiste encore. Si le show d’AMC ne s’était jusqu’alors pas caractérisé par sa bonne humeur et son propos léger, le postulat devient ici encore plus sombre. Un condamné à mort, un tueur en série, des vidéos pornographiques pédophiles, une jeunesse des rues qui se prostitue, nos deux enquêteurs sont à nouveau empêtrer dans le fange, au plus près du malheur d’autrui, condamné à briller pour renaitre de cette fosse en sauvant avec eux un maximum de victimes. Mais tout n’est jamais facile dans The Killing, à tel point que pour l’occasion, les efforts des scénaristes pour assombrir incessamment leurs propos tendent à rendre parfois artificielle une saison, il faut l’avouer, un poil en déca des deux références précédentes.
Nous retrouvons les lieutenants de la criminelle de Seattle, Sarah Linden et Stephen Holder, un an après les faits Larsen, une enquête à l’aboutissement explosif mais jubilatoire. La découverte d’un corps rappellera très vitre l’un des deux flics au bon souvenir d’une terrible affaire. De connexion à connexion, les dossiers se croisent pour ne faire qu’un. Il n’y a rien là de mystérieux tant le ton semble résolument tourné vers un potentiel final dramatique. L’affaire est poisseuse, difficile, d’autant que le temps pourrait presser pour un potentiel innocent en attente de la potence, que le temps compte double pour les jeunes filles des rues alors qu’un tueur guette. Dans une certaine forme de précipitation, les deux enquêteurs tentent de joindre les deux bouts, dans la douleur, dans la tourmente. On connaît certes la musique, mais comme précédemment, Veena Sud et son team semble savoir y faire pour rendre leur show policier captivant, sombre et durement réaliste. Est-ce là la marque de la froideur nordique exportée aux USA? Sans doute.
Les deux comédiens principaux, Mireille Enos et Joel Kinnaman, livrent une fois encore une prestation impeccable. Les deux enquêteurs sont complémentaires, indissociables mais fatalement opposés dans bien des domaines. Les nouvelles apparitions au casting de quelques pointures, notamment Elias Koteas, très impressionnant de retenue, ainsi que de Peter Sarsgaard, imposant détenu, troublant de par son jeu fort, amène une réelle plus-value à cette troisième saison, certes ambitieuse de par son script, mais surtout d’avantage encore orientée vers le cinéma que précédemment. Pour autant, malgré ses efforts de justesse, malgré une rehausse du budget promotionnel et technique, cette saison ne sera jamais aussi captivante que les deux précédentes. A force de pousser le suspens vers ses limites, à force de peindre tout en noir, les scénaristes ne seront pas parvenus à complètement éblouir, le tout s’égarant souvent vers des twists passablement improbables et vers une conclusion à fin ouverte pour le moins en désaccord avec les franches prises de position de l’affaire Larsen.
Le tout n’en reste pas moins impeccable, malgré bon nombre de petits défauts. Cette troisième saison marque aussi l’abandon d’AMC, qui lègue son bébé policier à Netflix. La plateforme VOD et productrice de shows originaux, ayant largement distribué la série jusque-là, s’occupera de produire les 6 épisodes qui constitueront la quatrième et dernière saison du show. Ceci marque l’imposante stature du magnat du VOD aux Etats-Unis, capable de perpétuer des traditions alors que les chaînes câblées se lancent de nouveaux défis en sachant leur progéniture en de bonnes mains. Espérons alors que les six derniers épisodes soient à la hauteur de l’ensemble. 15/20