Comment donc le royaume de France a t-il fait pour se retrouver dans la Guerre de Cent ans ?
Claude Barma y répond en 9 heures avec le feuilleton Les Rois Maudits, avec l'aide de Marcel Jullian qui adapte les 6 livres de Maurice Druon, chaque livre représentant un épisode.
Il y aurait tant de choses à dire sur Les Rois Maudits, qui ne répond plus du tout au code actuel de la télévision/plateforme, et c'est dommage pour ces dernières. À première vue, ça peut donc paraître désuet, par le côté très théâtral, par les décors peints ou tout simplement de privilégier les dialogues au sensationnalisme. Pourtant, tous ces points sont très bien gérés !
En effet, très théâtral dès l'introduction des épisodes, Les Rois Maudits pousse la porte des coulisses du royaume de France lors de la fin de règne de Philippe le Bel, aucun de ses trois fils (qui seront tour à tour roi) n'auront de descendance mâle en bonne santé ce qui engendrera la fin de l’extraordinaire dynastie directe des Capétiens. C'est donc à coup de dialogues et d'action en coulisse que se joueront des successions, des guerres ou des luttes d'influence, et l'écriture est ici remarquable, tant dans les actions que les dialogues.
Cette écriture permet une passionnante lecture des évènements, que ce soit les conflits pour les terres d'Artois, la fin de l'ordre des templiers ou les intrigues secondaires, comme celle autour de Guccio. Maurice Druon garde une fidélité historique pour les évènements connus, et n'hésite pas à proposer une version bien personnelle de ceux qui le sont moins (la mort de Louis le Hutin et de son fils, les manigances de Robert d'Artois ...). Respectant les lieux et les coutumes d'alors, on se retrouve totalement plongé dans cette époque et au cœur du royaume, avec des intrigues extrêmement bien écrites, et il en est de même des personnages (et ce qu'importe leurs importances).
Ces derniers sont d'ailleurs sublimés par de remarquables comédiens, Jean Piat en tête, n'hésitant pas à en faire des caisses dans son rôle de Robert d'Artois et il est tout simplement irrésistible. On aime le suivre, le découvrir dans de nouvelles péripéties et la façon dont il va s'en sortir à chaque fois. La variété des personnages est l'une des grandes réussites des Rois Maudits, ils sont nombreux, certains ne sont là que pour un épisode, mais on ressent l'importance de chacun, ainsi que l'évolution, en fonction de leurs intérêts, qu'ils ont au fil des épisodes.
Par exemple, Philippe le Bel (remarquablement joué par Georges Marchal), présent sur un seul épisode, est inoubliable, par sa stature, sa grandeur et son rôle. De la même manière, les personnages récurrents comme Tolomei ou Guccio (inoubliables Louis Seigner et Jean-Luc Moreau) apportent une réelle plus-value au feuilleton, avec des apparitions pertinentes et inoubliables lors de chaque épisode ou presque. Si les intrigues anglaises ont un peu moins de mordant que celles françaises, elles n'en demeurent pas moins intéressantes, et ne plombent jamais le récit.
Des intrigues françaises à celles anglaises, Les Rois Maudits présente de superbes décors peints, ainsi que des costumes permettant une belle reconstitution. Jamais clinquants, ils sont justes et s'accommodent parfaitement au ton du feuilleton et des intrigues dans le royaume de France. On retiendra aussi la bande-originale signée Georges Delerue, inoubliable dès l'introduction des épisodes.
Les Rois Maudits nous emmène au cœur des intrigues du Royaume de France alors que le temps de la dynastie des Capétiens est compté, et la série est sublimée par, notamment, une écriture de grande qualité ainsi que de parfaits comédiens.