Six Feet Under ou quand le brillant scénariste d’American Beauty, Alan Ball, prend le train HBO en marche et au bon moment. 2001, en effet, là où OZ et les Soprano sont désormais des séries cultes, là ou pointe à l’horizon les prestigieuses confrontations entre flics et trafiquants, The Wire, la chaîne câblée propose cette série familiale teintée d’humour noir, de mélancolie et d’un zeste de fatalisme. Oui, comme son titre l’indique bien, nous voici plonger au cœur du marché de la mort, dans l’antre d’une maison familiale de pompes funèbres, là où l’on pleure les disparus, ou l’on embaume les corps, ou l’on vend les funérailles comme l’on vendrait un buffet de dessert. Tout débute, somme toute assez logiquement, par le mort du père, le tenancier en chef de la petite entreprise familiale. Le deuil rapprochera la famille Fisher, lui fera prendre de nouveaux virages.
Les fils du disparu reprennent la boutique. Mais relèveront-ils le défi. David, l’appliqué, digne successeur d’un père qu’il ne connaissait pas vraiment, peinant à assumer son homosexualité et Nat, le fils volatile, celui qui revient après avoir fui le nid familial parviendront-ils, d’abord, à concilier leurs tempéraments, à effacer leurs différents? Sans compter, bien entendu, sur la petite sœur, Claire, en quête d’identité, sur Ruth, la mère, veuve remettant sans cesse sa vie en question, la famille dysfonctionnelle de la petite amie de Nat, Brenda, sans compter aussi sur une concurrence féroce dans le marché des pompes funèbres. Un défi pour la descendance Fisher, un défi rythmé de séquences touchantes, marrantes, étonnement justes, sincères. Oui, Six Feet Under est avant tout une série d’une profonde délicatesse, un show sans tabou qui parle à cœur ouvert de la mort, du deuil, du sexe, du remords, de confiance en soi, qui parle d’assumer ou non ses choix, son mode de vie.
Alan Ball réussit donc parfaitement son entrée chez HBO, offrant avec une certaine grâce la quintessence même de ce que doit être une série familiale, une série qui illustre parfaitement et toutes leurs complexités les rapports humains, en famille ou entre étrangers. Une série qui illustre, par ailleurs, tout aussi bien, les rapports qu’entretiennent les vivants avec la mort, le nerf de la guerre dans le cas qui nous occupe. La douleur ou la colère? L’amour ou la haine? La peur ou la détermination? Pour sa première saison, une volée de 13 épisodes d’environ 55 minutes, Six Feet Under frappe fort, très fort. De bon augure pour la suite. 17/20