A vouloir ressembler à tout le monde, on finit par ne ressembler à personne. C’est bien ce pari risqué que la nouvelle série policière, "Mentalist", a pris et a (peut-être) remporté. Les ressemblances avec des séries ou des films existants sont si nombreuses qu’elles ne peuvent pas être fortuites et indépendantes de la volonté des scénaristes. Au contraire, elles ne peuvent être que voulues au risque de virer à la pâle copie, à la répétition médiocre et chronophage. Et pourtant, quand apparaît le générique de fin, on se prend à éprouver un frisson d’impatience, une brusque envie de connaître la suite des aventures de Patrick Jane (Simon Baker), sorte de consultant ou de "pigiste" pour le California Bureau of Investigation, spécialisé dans la résolution des crimes violents. Autrefois, Jane participait à des émissions de télévision telles qu’en regardent les ménagères de plus ou de moins 50 ans (comme on veut), l’après-midi aux Etats-Unis. Il se faisait passer pour un télépathe. Cheveux blonds ondulés, yeux bleus, sourire parfait, un rien moqueur, Jane a tout du personnage de TV comme les affectionnent les grandes chaînes généralistes, afin de fidéliser l’audience féminine. Mais Jane a préféré se faire recruter par le Bureau qui n’a pas vraiment pu refuser son offre car il possède deux qualités inhabituelles : un sens extrêmement aigu de l’observation et une relation particulière avec un tueur en série, Red John, qui a assassiné sa femme et sa fille. Le premier parallèle qui vient à l’esprit est celui que l’on pourrait tenter avec Gregory House. Jane, comme House, est un type supérieurement intelligent, un homme dont le pouvoir de déduction échappe à ceux qui l’entourent. Il y a une ressemblance flagrante entre le groupe d’adjoints du médecin misanthrope et l’unité des enquêteurs pendus aux explications de l’ancien animateur permanenté. Tous deux parlent avec une franchise qui les fait passer pour des goujats ou des rustres, et tous deux le font, d’abord par conviction de leur supériorité intellectuelle et ensuite par souci d’aider les autres à réfléchir ou à affronter la vérité. Tout comme House, Jane regarde des programmes télévisés sans intérêt en faisant semblant de les trouver passionnants. Tout comme House, Jane a une propension à l’auto-médication. Seul problème, il n’est pas médecin et ne peut donc pas piocher dans la pharmacie. Enfin, tout comme House, il mène ses enquêtes à la façon d’un Sherlock Holmes, se servant des erreurs d’autrui (Dr. Watson) pour découvrir la solution. Les ressorts psychologiques de "Mentalist" sont aussi usés que ceux d’un vieux matelas, creusé par la forme et le poids du corps car on a trop souvent dormi du même côté du lit. Pourtant, on reste parfaitement en éveil tout au long de cette série. On se laisse entraîner par le personnage, parfaitement joué par Simon Baker, qui n’attend qu’une seule chose de la vie : obtenir sa vengeance. On compatit à sa souffrance et on a envie de l’aider, exactement comme le fait Teresa Lisbon (Robin Tunney), chef du CBI, qui ne cesse lui adresser des moues exaspérées tout en le regardant avec une admiration incontrôlable. Bref, une série policière américaine classique mais vraiment bonne et tout à fait divertissante