La bande-annonce insistait beaucoup sur le côté action, alors qu'il s'agit avant tout d'un polar orienté critique sociétale.
Ici, un journaliste noir réputé découvre le cadavre d'un suprémaciste blanc lors d'un week-end en forêt.
Dès les premiers instants, les réseaux sociaux lui mettent le crime sur le dos, avec pour seul argument sa couleur de peau.
Les auteurs de la série pointent avec beaucoup de justesse la division de la société, le racisme institutionnalisé, la haine sur les réseaux sociaux, les fake news, rumeurs absurdes en tout genre, et les stéréotypes et clichés de l'inconscient collectif américain, dont le héros est la victime.
Dans le reste de la série, on alterne entre fuite, enquêtes, rencontres dangereuses avec différents protagonistes, jusqu'à ce que la machination soit exposée au grand jour, avec un épilogue, qui essaye de donner des leçons de vie au téléspectateurs.
Si une fois de plus, je salue le courage de transposer cette réalité effrayante des États-Unis, la série n'est pas exempte de défauts qui font tiquer le téléspectateur.
Déjà, le fait que Muncie omet régulièrement des informations aux policiers et agents du FBI, se contenant de donner une partie des informations qu'il possède, sans que cela ne soit jamais expliqué.
Il y a également des incohérences dans la caractérisation du personnage : Muncie est présenté comme un battant, personnage retors, qui n'abandonne jamais. Et on le voit régulièrement baisser les bras, être pris par le doute, la culpabilité, voir choisir la fuite au lieu de faire face à ses accusateurs.
PS : s'enfuir a Djibouti pour américain n'est guère une option, sachant que l'armée américaine y possède une base militaire...
Si la série est très critique sur la société américaine, elle dérange dans sa vision : la violence est souvent justifiée, aussi bien que le port d'arme, ou le fait que les Noirs Américains ne sont en "sécurité" que dans leurs ghettos noirs...
L'auteur semble avoir la critique facile pour tous les médias américains comme pour les réseaux sociaux, ce qui donne à son œuvre un côté un peu réactionnaire par moment.
À aucun moment l'auteur ne donne le sentiment d'une Amérique où le vivre ensemble serait possible.
La fin de la série semble assez précipitée, surtout lorsque le méchant fait son long monologue absurde sur les lobbys, le pouvoir de l'argent, le contrôle des médias, etc.
Un aspect absurde de cette fiction : le héros est journaliste, mais il raisonne soit comme un vigilante, soit comme un militant, mais jamais comme un journaliste. À aucun moment, il n'essaye de prendre contact avec son employeur pour faire taire les rumeurs à son sujet, ni donner sa version des faits.
Il y a également une problématique concernant le FBI montré dans la série, il fait à la fois les enquêtes, arrestations et les poursuites légales.
Aux USA, les poursuites légales sont du ressort du Procureur (district attorney) et des juges, en aucun cas du FBI.
Il y a également un mélange des genres dans la série entre la police locale et le FBI : dans la série, on apprends que la police abandonne sa traque à l'homme car le FBI renonce à enquêter sur le héros, ce qui n'a aucun sens...
Si l'acteur Colman Domingo fait le taff, on sent que la série ne laisse pas vraiment la place aux autres personnages.
Ce qui est dommage a vu du casting : on retrouve le sympathique John Ortiz (Bad Monkey), la britannique Alison Wright (Snowpiercer), le vieux sage Stephen McKinley Henderson (Dune, Civil War), Bradley Whitford (The Good Guys).
On découvre la sublime Tamsin Topolski dans le rôle d'une ancienne suprémaciste blanche, ainsi que Gabrielle Graham, dans le rôle de la fille de Muncie, une afro-américaine dévouée à sa communauté et déterminée.