En Bref [Saison 1]
Si l'on aime le personnage et son univers musical, ce documentaire est très satisfaisant. Clément Cotentin ayant filmé énormément de choses bien avant que son frère et sa bande ne deviennent des incontournables du rap français, on découvre les dessous du groupe et s'émerveille de voir à quel point ces artistes sont vrais. Après, même si je comprends le choix de prendre du temps pour montrer les premières années, avant la célébrité, je regrette un peu que l'on soit passé si vite sur les succès plus récents, notamment la manière dont ils sont vécus de l'intérieur.
Plus en Détail ("spoilers", dans le sens où je dévoile des cheminements et mécaniques du documentaire)
Retrospective totale pour le collectif Orelsan-Gringe-Skread-Ablaye, un quatuor qui s'est rencontré à Caen et qui est rentré dans le show biz comme personne. Créateurs d'un style de rap unique, sortant un premier album totalement "maison" après environ 10 ans à composer et se faire un peu connaître sur Internet, le collectif est surtout devenu malheureusement célèbre après la polémique qui a éclaté sur un de leurs premiers morceaux.
Ces débuts (2000-2011) prennent 3 épisodes de 40 minutes à eux tous seuls, alors que le premier album d'Orelsan n'est sorti qu'en 2009. 2h d'archives et de commentaires sur ces années où Aurélien ne sait pas quoi faire de sa vie dans sa ville normande, ce qui inspirera fortement son personnage de loser procrastinateur jusqu'à son film "Comment c'est loin" (2015). C'est là que son frère intervient, en filmant absolument tout, convaincu que le groupe connaîtra un jour le succès et que le public voudra voir ces images exclusives. Avec ce documentaire, on voit qu'il a eu raison.
On découvre alors les caractères de chacun des 4 artistes et les images de "Comment c'est loin", de "Bloqués", les paroles de "Perdu d'avance" résonnent très nettement dans chaque image d'archive. Tout y est, Orel qui ne croit pas en son talent, Gringe qui se sait talentueux et qui ne pousse pas, Skread le méthodique qui perce avant les autres, des moments de vie et anecdotes que l'on retrouvera dans les chansons... Même quand il fait veilleur de nuit dans son hôtel, en off, Orel balance des réflexions sur sa situation, très similaires à ce qu'il dira dans ses premiers morceaux. Enfin pas tous...
La suite, ceux qui suivent l'artiste la connaissent mieux. C'est donc logique que le rythme s'accélère un peu, mais ceux qui ne connaissaient pas vont apprendre plein de choses sur l'état d'esprit assez unique du groupe. Notamment la nouvelle image imposée par David Tomaszewski pour "Le Chant des Sirènes" qui a marché extrêmement bien mais qui était quand même assez éloignée de la vision d'Orel ; ou alors le caractère de Gringe, ce que les autres disent de lui et même son état dépressif (tout ce qu'il raconte dans son album d'ailleurs). Bref, il y a beaucoup d'infos personnelles présentées avec un montage énergique et très minutieux. Au passage j'adore le générique.
Mais du coup, je pense que Clément Cotentin a dû faire quelques impasses, notamment sur la manière dont le succès est ressenti par les artistes. A chaque projet on a droit au même témoignage : "on s'attendait pas à ce que ça marche autant". Souvent on voit Skread ressentir l'arrivée d'un tube, mais à chaque fois il s'étonne de l'ampleur succès. Comment peuvent-ils être aussi peu sûrs d'eux avant la sortie du projet et autant des bêtes de scène derrière ? Le documentaire met une barrière entre le succès immense d'Orelsan aujourd'hui et le ressenti très minimaliste des artistes à ce sujet. C'est comme s'ils faisaient leur truc sans considérer le nombre de personnes qui pourraient y adhérer. Sauf que ce n'est pas non plus dit explicitement.